Infos Business of Friday, 12 November 2021

Source: Aurore Plus

Loi de finances 2022 : risques d’un budget artificiel sur fond de surfacturation, détournements

Paul Motaze, le ministre des Finances Paul Motaze, le ministre des Finances

L’enveloppe de 5762,4 milliards de francs, proposée par le gouvernement, pourrait n’être qu’un leurre au moment où le Minfi, en personne, dresse une situation macroéconomique plus que préoccupante du Cameroun.

Le gouvernement propose un budget de l’ordre de 5762,4 milliards de francs en hausse de 282 milliards de francs en valeur absolue par rapport à 2021 (5480,4 milliards de francs), a-t-on appris jeudi à l’ouverture de la session parlementaire consacrée à l’examen du projet de Loi de finances. Un des points d’orgue de ladite session sera le débat sur la dette publique, en constante augmentation soit, selon la Caisse autonome d’amortissement (CAA), un encours actuel de 10.927 milliards de francs hausse de 8,2% par rapport à l’année dernière.

La session consacrée à l’examen du projet de Loi-de finances intervient, note-t-on, à l’heure où le Cameroun peine à mobiliser les ressources pour le budget en cours. Une situation qui, aux dires du ministre des Finances (Minfi) himself, Louis Paul Motaze, «ne favorise pas la mise en œuvre harmonieuse des politiques publiques et expose le pays à des risques de surendettement».

Sur la période 2022-2024, indique-t-il, les projections budgétaires sont en effet «exposées à divers types de risques qui pourraient remettre en cause l’équilibre budgétaire et financier établi», l’occasion de la présentation des lignes directrices du document de programmation économique et budgétaire à moyen terme pour la période considérée, il a déclaré que ces risques ont notamment trait à l’évolution de la pandémie du Covid-19, à l’évolution du contexte macroéconomique et à la mobilisation des appuis budgétaires attendus de la mise en œuvre du nouveau programme économique avec le Fonds monétaire international (FMI).

«Au plan macroéconomique, une efficacité limitée des politiques du gouvernement pour atténuer les effets de la crise sanitaire sur les entreprises et les ménages, pourrait conduire à un niveau d’activité moins important que celui projeté, et conséquemment à un niveau de recettes fiscales et douanières en deçà de celui attendu. Par ailleurs, le cours mondial du baril de pétrole présenterait un gros risque pour les budgets 2022 et suivants, si la production pétrolière annoncée et le prix mondial du baril utilisé dans les projections ne sont pas au rendez-vous», a précisé M. Motaze en juin devant la commission des finances et du budget de l’Assemblée nationale.

Ainsi, en plus de la couverture de son déficit budgétaire, le gouvernement doit affronter d’autres charges de financement et de trésorerie. Il s’agit, entre autres, du service de la dette extérieure et intérieure y compris le paiement de ses arriérés et les sorties nettes de trésorerie des correspondants. En 2022, ces besoins sont évalués,à 12437 milliard de francs en diminution de 67,8 milliards de francs par rapport à 2021, contre 1 154,8 milliards en moyenne entre 2023 et 2024.

L’éternel déficit
Dans les grandes masses, et en 2022, les ressources de financement de l’État devraient se situer à 1676,5 milliards y compris le tirage spécial du FMI de 200 milliards de francs et les appuis budgétaires de 259 milliards de francs liés à la mise en œuvre du nouveau programme économique et financier avec le Fonds.

Ceci représente une diminution de 376,9 milliards (-18,2%) par rapport à 2021. Une baisse imputée au retrait en 2022 des financements exceptionnels des partenaires techniques et financiers, notamment les appuis dans le cadre la lutte contre le Covid-19 et de l’allègement de la dette extérieure du groupe des 20 pays les plus industrialisés (G20), ainsi que de l’émission des Eurobonds sur le marché international.

Projetant une croissance économique de 4,4% du produit intérieur brut (PIB) en 2022 contre 3,4% en 2021, 0,7% en 2020 et 3,7% en 2019, une hausse essentiellement tirée par la dynamique du secteur agricole, la reprise des investissements et l’amélioration de l’offre d’énergie, les projections des ressources totales du budget général en 2022 s’élèvent à 5 649,7 milliards, en hausse de 68,4 milliards en valeur absolue et 1,2% en valeur relative par rapport à 2021. En mettant, par ailleurs, en relation les projections de recettes propres et dépenses de l’État, il se dégage un déficit budgétaire global de 516,8 milliards en 2022 contre 753,9 milliards en 2021, représentant une réduction de 237 milliards du besoin de financement de l’État.

Selon le Minfi, en plus de la couverture de son déficit budgétaire, le gouvernement doit .faire face à d’autres charges de financement et dé trésorerie, notamment le service de la dette extérieure et intérieure y compris le paiement de ses arriérés et les sorties nettes de trésorerie des correspondants. En 2022,. ces besoins sont évalués à 1 243,7 milliards soit une diminution de 67,8 milliards (-5,2%) par rapport à 2021, contre 1154,8 milliards en moyenne entre 2023 et 2024.

S’agissant des intérêts de la dette publique, ils sont projetés à 257 milliards en 2022 contre 190 milliards en 2021, en hausse de +35,3% du fait de la sortie du Cameroun de l’initiative d’allègement la dette extérieure du G20.

C’est dire si les horizons ne sont ni dégagés, encore moins lisibles et traçables. Comment le gouvernement entend-il alors mobiliser 5762,4 milliards de francs, alors qu’il a déjà maille à partir avec la communauté financière internationale, que le pillage des maigres ressources se poursuit dans une impunité rampante, que le Coût des crises sécuritaires ne cesse de s’alourdir ? Comme ces dernières années, le Cameroun se retrouve face à une équation budgétaire à mille inconnues.