Depuis quelques semaines, des informations relayées par des journaux et sur les réseaux sociaux font état du détournement des 45,9 milliards de FCFA destinés au financement d’un projet de construction de 55 ponts métalliques en sections préfabriqués pour desservir plusieurs bassins de production à travers le Cameroun.
Mais un échange de courriers entre le ministre des Travaux publics et son homologue de l’environnement, de la protection de la Nature et du Développement durable permet de constater que bien qu’ayant pris du retard, le projet suit bel et bien son cours.
Le 30 janvier 2015, le Cameroun représenté par Emmanuel Nganou Djoumessi alors ministre de l'Économie, de la Planification et de l'Aménagement du Territoire (MINE PAT), signait avec les entreprises la Société Générale de Banques et US Exim, après la signature de 2 contrats commerciaux avec Acrow Bridges (États-Unis) et Ellipse Project SAS (France), deux accords de prêt d’un montant global de 45,9 milliards de FCFA, portant sur la construction sur deux ans de 55 ponts métalliques en sections préfabriquées modulaires pour desservir les grands bassins de production à travers le territoire national.
L’accord avait été signé en présence de plusieurs autres membres du Gouvernement dont Patrice Amba Salla, alors ministre des Travaux publics et quelques ambassadeurs accrédités à Yaoundé.
Avec 11 ponts sur les 55 prévus, la Région de l’Est est censée enlever la plus grosse part dans ce projet, devant le Nord-Ouest (9 ponts). Suivent l’Ouest et le Sud avec 7 ponts, puis l’Adamaoua et le Centre (5 ponts), le Sud-ouest (4), le Littoral (3), le Nord et l’Extrême-Nord avec deux ouvrages chacun. Si rien n’est encore véritablement visible sur le terrain, il faut noter que les études techniques et d’impact environnemental et social suivent leurs cours.
D’après des informations venant de sources crédibles, plus de 30 études techniques sont déjà à la disposition du Ministère des Travaux Publics. Les Études d’impact environnemental et social seront attendues en janvier 2017. De plus, les informations selon lesquelles le projet a pris un retard de plusieurs mois relèveraient d’une interprétation erronée des termes du contrat. Il est important de signaler que même si les conventions ont été signées en janvier 2015, les travaux sur le terrain n’ont en effet commencé qu’en janvier 2016, une fois que les avances de démarrage ont été payées aux 2 entreprises.
L’autre preuve que le projet suit son cours c’est cette correspondance envoyée le 9 décembre 2016 par le ministre délégué auprès du Ministre de l’Environnement et de la Protection de la Nature et du Développement durable à son collègue des Travaux publics, dont la rédaction de Cameroon-Info.Net a pu s’en procurer une copie.
Plus de 40 milliards toujours disponibles
Dans ledit courrier, Nana AboubakarDjalloh proposait de revoir les programmes des consultations publiques proposés quelques jours plus tôt par le MINTP dans le cadre des études d’impact environnemental et social relatives à ce projet dans quatre zones concernées par les travaux. Il s’agit de la zone écologique des hautes savanes de la Région de l’Adamaoua; la zone écologique forestière bimodale des Régions du Centre, du Sud et de l’Est; la zone écologique forestière monomodale des Régions du Littoral et du Sud-Ouest; la zone écologique soudano-sahélienne des Régions du Nord et de l’Extrême-Nord.
«L’examen desdits programmes a révélé que les dates retenues pour les réunions dans les quatre zones sont très proches et ne laissent pas la possibilité d’information préalable des populations dans les délais réglementaires de trente jours», mentionne la correspondance.
Cette correspondance pourra ainsi permettre de lever les inquiétudes suscitées par plusieurs articles de presse et sorties sur les réseaux sociaux, faisant état du détournement des fonds alloués à cet important projet.
Dans sa parution du lundi 5 décembre 2016, le bihebdomadaire «La Meteo» mettait notamment Emmanuel Nganou Djoumessi (actuel ministre des Travaux publics et signataires de cet accord lors qu’il était au Ministère de l’Économie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire (MINEPAT)) et Louis-Paul Motaze (son successeur au MINEPAT) au banc des accusés. Sans oublier l’homme d’affaires camerounais Patrice Ndongo Seh, basé aux États-Unis et qui a joué les facilitateurs dans ce projet qui a permis à l’entreprise Acrow Bridge de se voir décerner le prix «Affaire de l’année (Deal of the year)» aux États-Unis par la banque US Exim en 2016.
Des sources proches du dossier révèlent même que 85% pour Acrow et 80% pour Ellipse des fonds destinés à ce projet n’ont pas encore été débloqués et sont encore sous le contrôle du MINEPAT et de la Caisse Autonome d’Amortissement. L’on apprend que la transaction a été ralentie par des problèmes techniques et qu’à ce jour, plus de 40,0 milliards de FCFA de ces fonds sont toujours disponibles.
Il faut rappeler que ces fonds prêtés au Cameroun sont garantis par US Exim et de ce fait il appartient au Gouvernement américain si le Cameroun est dans l’incapacité, de les rembourser.