Apparemment floué, un substitut du procureur, en service à Nanga Eboko, département de la HauteSanaga, région du Centre, aurait fait des révélations. Au banc des accusés, un sous-directeur au ministère de la Justice.
L ’affaire fait grand bruit dans certains milieux. Un magistrat ambitieux, mais impatient, menacerait de tout déballer. Exerçant, apprend-on, comme substitut du procureur de la République à Nanga Eboko, l’homme dont l’entourage dit avoir, via des pots-de-vin, et la complicité de son chef hiérarchique, décroché son deuxième grade, lors de la commission de 2020, serait dans tous ses états du fait du double langage de son acolyte, qui serait tapis à la sousdirection du personnel judiciaire au ministère de la Justice. Ce substitut aurait, à des proches, révélé avoir déboursé des millions pour une nomination comme juge au tribunal de première instance de Douala-Bonanjo, grâce à un réseau bien huilé et dont un sous-directeur serait la personne indiquée à la chancellerie. Pour davantage l’appâter, le sous-directeur lui aurait montré le projet de nominations, qui devait être soumis à la validation du Conseil supérieur de la magistrature, présidée par le président de la République, si les différentes dates de la session souvent avancées avaient été respectées. Las, l’assise ne se tenant toujours pas, le jeune magistrat, apprend-on, menacerait de tout déballer. En guise de compensation, ce substitut du procureur se serait vu proposé un poste juteux dans les services du Premier ministre par un autre réseau, que lui propose le sous-directeur de la chancellerie. Promesse qui, aussi, tarde à se réaliser malgré ses multiples relances. D’où son courroux. S’estimant floué, ce substitut du procureur multiplie des indiscrétions, dont certaines seraient parvenues à votre journal. Déjà vendus à coups de dizaines millions, tous les postes juteux de la cour suprême, notamment celui du premier président (poussé à la retraite par ses ennemis et adversaires et dont le successeur, un de ses collaborateurs, de la même cour suprême, serait déjà connu).Tous les autres postes juteux des Cours d’appel et parquets généraux seraient également achetés. A Yaoundé et Douala, les prétendants au ‘’bon endroit’’ débourseraient un peu plus. L’on apprend donc que des sommes colossales transiteraient, aussi, par ce substitut du procureur. Conséquence, il serait l’objet de pressions quotidiennes des autres magistrats, qui, ne voyant aucune assise se tenir, réclameraient leur argent. Comptoir. Nos tentatives en vue de recueillir la version des faits du substitut du procureur sont, pour l’heure, vaines. Toutefois, à en croire lesdites langues, la montée en grade se monnayerait à 4 millions, 50 millions pour le poste de procureur général, 30 millions pour être nommés juge dans les régions autres que le Centre et le Littoral où, compte tenu de la forte demande, les enchères iraient jusqu’à 50 millions. «Ici, tout semble s’acheter. Vous voulez être promu, vous payez. Vous voulez être affecté, vous payez. Vous voulez être maintenu à un poste juteux, vous payez. Vous voulez voir votre dossier disciplinaire effacé, vous payez. Des gens auraient ouvert un comptoir à Yaoundé et sembleraient s’enrichir comme Crésus», lance un magistrat à la retraite. «Ces pratiques seraient à l’origine des actes rocambolesques de certains magistrats, car ils voudraient d’abord récupérer leurs investissements ou amasser une fortune pour assurer leur maintien», regretterait un observateur proche des milieux judiciaires. On comprendrait, dès lors, l’activiste de certains lobbys en vue de la convocation du Conseil supérieur de la magistrature (Csp). Ce serait, pour eux, le lieu d’obtenir des postes pour lesquels ils auraient, selon nos sources, payés de fortes sommes. Certains journaux et réseaux sont, régulièrement, mis à contribution pour accentuer la pression sur Etoudi. A contrario, des juges, visés par des enquêtes judiciaires, redoutent la tenue du Csp, car elle pourrait déboucher sur de lourdes sanctions pouvant impacter leurs carrières. Cette instance a siégé pour la dernière fois en 2020. Depuis lors, quatre promotions attendent leur intégration dans le corps de la magistrature. En rappel, le 27 juin 2024, lors des questions orales aux membres du gouvernement, le ministre d’État, ministre de la Justice, Laurent Esso, a déclaré que « l’inspection générale des services judiciaires est actuellement saisie de 865 procédures d’enquêtes ». Le garde des Sceaux réagissait aux inquiétudes des sénateurs suite à la récurrence des scandales, supposés ou réels, qui ternissent l’image du système judiciaire camerounais. A un moment, du côté de Douala par exemple, des messages whatsApp et enregistrements audio, ont provoqué le buzz sur les réseaux sociaux. Les justiciables, pour leur part, aimeraient que le président de la République les débarrassent des magistrats corrompus, véreux et affairistes.