Lors d’une visite officielle en France en juillet 2009, le président Paul Biya avait promis de faire examiner et de trouver des solutions aux principales doléances de la diaspora. Si le droit de vote est un acquis depuis 2011, la double nationalité n’est toujours pas reconnue.
En visite officielle en France en juillet 2009, le président Paul Biya avait non seulement demandé à la diaspora camerounaise de France, et à travers elle à tous les compatriotes de l’étranger de mettre leurs compétences au service de leur pays, mais il avait aussi fait des promesses : « Je sais qu’il y a dans nos communautés de l’étranger des « trésors » de compétence et de dévouement qui restent inexploités. Aujourd’hui encore, je vous réitère cet appel. Car votre contribution est déterminante pour la mise en œuvre de notre politique des Grandes Réalisations(…).
Comme vous le dites vous-mêmes, vous êtes une diaspora de progrès. Pour ma part, je n’en ai jamais douté (…). Je prends bonne note de (vos doléances) et de celles que vous venez de me soumettre, par la voix de votre Représentant, au cours de la présente rencontre. Soyez assurés que j’y accorde tout mon intérêt et ne manquerai pas d’y apporter des solutions en temps opportun », avait déclaré Paul Biya.
Double nationalité : un serpent de mer ?
Deux importantes promesses avaient été retenues : le droit de vote pour les Camerounais de l’étranger et la résolution du problème de la double nationalité. Le 13 juillet 2011, Paul Biya promulguait la loi relative au vote des citoyens camerounais établis ou résidant l’étranger. C’est ainsi que lors de l’élection présidentielle du 9 octobre 2011, les Camerounais de l’étranger ont pu exercer pour la première fois leur droit de vote. Mais ce ne fut que pour une partie des Camerounais, car beaucoup ayant la double nationalité ou ayant acquis une autre nationalité – belge, française, suisse, allemande, italienne, anglaise, etc. – ne pouvaient en principe pas participer à cette élection présidentielle. C’est pourquoi la question de la double nationalité ne cesse de resurgir. Certaines sources font de ce que les Camerounais qui ont acquis une autre nationalité représentent au moins 80% des camerounais de la diaspora.
Le 1er février 2013, le Président Paul Biya est à Paris, en France. Mais, il esquive les compatriotes en laissant au Ministre des Relations extérieures de l’époque, Pierre Moukoko Mbonjo, le soin de répondre aux questions de la diaspora. La promesse non réalisée de la reconnaissance de la double nationalité est encore sur la table. Ainsi qu’une nouvelle revendication. Celle de « pouvoir disposer des structures gouvernementales dédiées à la gestion de leurs préoccupations (…) comme c’est le cas des diasporas d’autres pays». La diaspora camerounaise souhaitait alors que le Cameroun prenne les exemples du Mali et du Sénégal qui disposaient d’un Ministère des Maliens de l’extérieur et de l’Intégration africaine et d’un Ministère des Sénégalais de l’extérieur.
Créer un dispositif institutionnel approprié
Au lieu de résoudre la question de la double nationalité ou au moins de créer un véritable ministère des Camerounais de l’Extérieur, la diaspora a appris avec étonnement la création, au Ministère des Relations extérieures (Minrex), d’une Direction des Camerounais à l’étranger, des étrangers au Cameroun, des questions migratoires et des réfugiés. Une Direction chargée de la mise en œuvre de la politique gouvernementale en matière de gestion, promotion et protection sociale et juridique des Camerounais à l’étranger, du suivi et de l’élaboration des politiques et stratégies en vue de la participation des Camerounais de l’étranger au développement politique, économique et social du pays, en collaboration avec les autres administrations concernées.
Cette solution bureaucratique et non opérationnelle ne correspond pas aux attentes de la diaspora qui revient à la charge en insistant uniquement sur la reconnaissance de la double nationalité. Paul Biya a-t-il peur de la diaspora camerounaise ? Pourquoi ne pas réviser la loi sur la nationalité et permettre à ceux qui possèdent la double nationalité d’exercer aussi officiellement leur droit de vote ? Comment Paul Biya veut-il compter sur une diaspora camerounaise qui n’a ni les facilités juridiques nécessaires pour donner le meilleur de lui-même ni un dispositif institutionnel approprié créé et mis en place pour son information et son accompagnement ?
Vivement un grand débat national
Disponibilité et diffusion permanentes de l’information dans les domaines économique, social, culturel et commercial; des mesures incitatives spécifiques en faveur de la diaspora; une plus grande reconnaissance des aptitudes et compétences intellectuelles, scientifiques et techniques de la diaspora à contribuer au développement du Cameroun. Le Cameroun, qui veut émerger en 2035, fait encore partie des rares pays africains qui ne reconnaissent pas la double nationalité.
Un autre débat reste d’actualité. Celui de la possibilité pour les détenteurs d’une double nationalité à occuper ou non certains postes de responsabilité au sein des institutions étatiques ou la possibilité à accéder ou non à la fonction de président de la République ! Vivement un grand débat national sur la double nationalité au Cameroun.