Culture of Wednesday, 22 March 2017

Source: chapchapmag.com

Au secours, sauvez notre Makossa

Lettre ouverte intrepellant Manu Dibango sur le Makossa Lettre ouverte intrepellant Manu Dibango sur le Makossa

Chers pères, grands-pères et arrières grands-pères;

Vous qui avez marqué la plus belle épopée de notre musique,c’est avec des pincements de cœur,une douleur et tristesse effroyables, des larmes bien chaudes que je me permets de vous écrire aujourd’hui pour implorer vos réactions afin de sauver notre Makossa qui se meurt.

En effet,depuis l’ascension des musiques dites urbaines pour la plupart importées du Nigeria,de la côte d’ivoire,de la France ou des USA,notre beau Makossa va de plus en plus mal,il croupit dans une agonie et plus que jamais nécessite votre intervention.

Depuis bientôt déjà 5 ans les musiques étrangères appelées musiques urbaines ont pignon sur rue dans notre beau pays et attirent tous les regards, ils les appellent souvent Rap,TRAP,Afro-Trap,RnB, Afro-pop etc;ce sont de belles mélodies sur des beats et avec des voix fabriquées grâce aux nouvelles technologies informatiques.

Que dites-vous de cette génération qui a pour sujet commun les »dessous de ceinture » dans leur chanson?

Que pensez-vous de cette génération qui évolue dispersée,individuellement,où chacun se bat seul et s’autoproclame « KING » « meilleur »?

Que faites-vous quand notre Makossa séjourne dans les oubliettes?

Où sont passés vos enfants Sergeo Polo, Samy Diko, Longue Longue, Nguea Laroute,Nicole Mara etc qui ont essayé d’assurer votre relève depuis la fin des années 90?

Leurs plus jeunes frères Mathematik,Erico,Hugo Nyame,Mony Eka et bien d’autres n’ont plus que leurs yeux pour pleurer et constater le désastre.

Qu’est-ce qui n’a pas marché? Pourquoi ne se sont-ils pas adaptés aux tendances actuelles?

Papys je souffre au plus profond de moi oui j’ai mal de ne plus écouter ce Makossa qui faisait notre fierté en Afrique et dans le monde,nous garantissait un accueil chaleureux dans les aéroports du Togo,en Côte d’Ivoire,au Burkina Faso,ce Makossa qui nous ressemblait, lui qui nous rassemblait et nous unissait du Nord au Sud,de l’Est à l’Ouest sans distinction de langue ni d’ethnies; tout le pays pouvait danser sur les mélodies de Ndedi Eyango,Kotti François,Kotto Bass ou encore Tim et Foty.

Je suis sûr que Hoïgen Ekwala,Tom Yom’s,Guy Lobe,Eboa Lotin,Joe Mboule,Bébé Manga,Charlotte Mbango se retourneront du fond de leur tombeau,seront si tristes de voir le Rythme pour lequel ils ont donné leur vie mourir à petit feu.

Pourquoi n’organisez-vous plus les masters classes comme Aladji Touré?

Faites des castings, des concours de Makossa,organisez des tournées nationales pour éduquer les jeunes sur l’importance de notre patrimoine culturel,des émissions de sensibilisation,encadrez, recadrez les plus jeunes,fusionnez avec la nouvelles génération urbaine et adaptez le Makossa aux rythmes actuels.

Je ne sais pas si vous y parviendrez ou s’il existe une stratégie adéquate pour convaincre les jeunes de nous jouer encore ce Makossa comme dans les années 60 à 90.

Qui leur a dit que le Makossa est une musique de « vieux »?

Oui comme le zouglou,le Ndombolo,la rumba les jeunes peuvent chanter le Makossa et briller en Afrique et dans le monde;il suffit de l’adapter à ces musiques urbaines ou fusionner avec les anciens.

Pourquoi ne viennent-ils pas vers Sam Fan Thomas,Dina Bell,Henry Njoh Annie Anzouer?

Qui n’a pas aimé les collaboration de Jovi & Eko Roosevelt,Sine & Petit Pays,Daphné et Ben Decca?

Pourquoi leurs confrères ne suivent ils pas ce bon exemple pour sauver notre culture?

J’aimerai écouter un Dynastie feat Dina Bell,un Franck Bell feat Maalhox ou un Stanley Enow feat Grâce Decca.

Je ne suis ni jaloux ni aigri du succès de mes frères bien au contraire,j’en suis fier et leur tire un coup de chapeau.

Je suis plutôt inquiet de l’état piteux dans lequel ils ont abandonné leur vraie culture.

Oui les artistes camerounais brillent mais la musique camerounaise sombre. Oui les artistes urbains avancent mais la culture camerounaise stagne.

À quand une chanson comme fleur des Antilles qui va regrouper une dizaines d’artistes urbains sur les rythmes de chez nous?

L'artiste Pat Cool l’a essayé avec le titre « Coran » mais s’est vite épuisé.

Lady Ponce fait du Bikutsi mais n’est-elle pas au sommet?

S'il vous plaît chers aînés revenez et remettez les pendules à l’heure.Sur ce que vous avez de plus cher,venez sauver notre Makossa qui disparaît peu à peu.

Venez enseigner votre humilité, vos techniques de chant aux plus jeunes,venez leur transmettre votre savoir-faire,vos inspirations.

Je sais que vous n’êtes jamais partis mais votre silence fait de vous des complices du meurtre de notre Culture.

Où sont passés les amoureux de la musique que vous étiez?

Avec vos collaborations,vous aviez enchaîné hits sur hits et aviez fait briller le vert rouge jaune.Si vous ne voulez pas assister aux obsèques du Makossa d’ici 5 ans,faites quelques choses.

Remettez au Makossa ce que le Makossa vous donne: la gloire.

Dans l’espérance que ma lettre arrivera jusqu’à vous et que vos réactions seront immédiates et simultanées, veuillez recevoir chers parents mes salutations les plus distinguées.

Votre petit-fils Diosky Moresmo qui vous aime tant!