Dans cette interview exclusive, Simon William Kum, réalisateur camerounais de renom, nous raconte son parcours inspirant qui a mené à la sortie de sa série à succès, "Vengeance", disponible sur l’application TV5Monde Plus. Depuis ses rêves d'enfance jusqu'à sa carrière florissante dans le cinéma, il partage ses influences artistiques, ses défis et ses succès dans l'industrie cinématographique.
Question : Pouvez-vous nous parler de votre parcours professionnel et de ce qui vous a inspiré à devenir réalisateur ?
Simon William Kum : C'est une très belle question. Qu'est-ce qui m'a motivé à devenir cinéaste ? Déjà tout part du rêve. Faire du cinéma, c'est un rêve d'enfance. C'est vrai qu'à la base, je rêvais de faire une carrière dans les forces armées camerounaises, mais plus tard, il y a eu ce virus du cinéma qui a été un peu plus fort et j'ai opté pour le métier dans les débuts de ma vingtaine.
J'ai commencé avec des formations au Cameroun, dans des centres comme l’Espace Arts 2000, où j'ai d’abord eu des diplômes en actorat, et plus tard, j'ai essayé de perfectionner ma carrière en faisant des formations en réalisation à Nollywood Arts & Culture Training Center, une structure qui forme dans le domaine du cinéma à Abuja, au Nigéria. Donc il y a eu toutes ces petites formations pratiques en présentiel et en ligne.
Dès les années 2015, j'ai commencé avec mon tout premier court-métrage intitulé ‘’Hawa’’, où j'étais réalisateur et producteur, et après cela, il y a eu des films comme mon tout premier film ‘’Hunted’’, diffusé sur TV5 Monde et ça s'est enchaîné avec des séries télévisées, ‘’Échec et Mat’’, ‘’Guerre et Sexe’’, et aujourd'hui, nous sommes à ‘’Vengeance’’.
Question : Nous parlerons de ‘’ Vengeance’’ dans quelques instants, mais dites-nous déjà quelles sont vos principales influences et inspirations artistiques ?
Simon William Kum : J'ai été beaucoup influencé par un cinéaste camerounais qu'on appelle Bassek Ba Kobhio, dont on suivait les films lorsque nous étions enfants. Je pense à ‘’Le Grand Blanc de Lambaréné’’, et bien d’autres films. Il y a aussi des grands cinéastes camerounais comme Daniel Kamwa avec un film comme ‘’Pousse-pousse’’ qui nous a bercé dans l'enfance. Ce sont donc ces cinéastes qui m'ont vraiment motivé. En voyant leur réussite, je me suis dit, on peut faire de ça un métier, et je me suis lancé.
Il y a aussi le fait que déjà tout petit, on avait beaucoup d'admiration pour le cinéma hollywoodien. Tout petit, on rêvait tous d'être Rambo, Arnold Schwarzenegger, et on s'est dit, pourquoi est-ce qu'on ne se focalisera pas pour en faire une carrière ?
Question : Aujourd’hui, vous avez lancé la série "Vengeance’’, qu'est-ce qui vous a poussé à le faire ?
Simon William Kum : Avant ‘’Vengeance’’, j’avais en 2018 réalisé ma toute première série intitulée ‘’Échec et mat’’, qui a beaucoup cartonné, surtout dans la diaspora et sur les plateformes VOD. J’ai fait la rencontre il y a quelques années, lors d'une masterclass dans une université de l'Ouest du Cameroun, d’un jeune scénariste qui avait regardé ‘’Échec et mat’’, et qui m'a déclaré qu’en la regardant il a eu une inspiration, celle d’écrire un film dans le registre de ce dernier.
À ma grande surprise, deux mois après notre conversation, il m'envoie un synopsis de trois épisodes qui attire mon attention. Il n’était pas mal du tout. J’ai tellement apprécié les épisodes que j’ai décidé qu’on se lance avec ma jeune structure de production. Nous avons ensuite lancé un casting de no-names, c'est-à-dire recruter des acteurs pas très populaires et je pense que nous avions à peine deux à trois acteurs ayant déjà une certaine renommée tels que Edith Monkam, Jean-Claude Sutchou, ceux qui jouent les rôles respectivement de Adama et Richard Bouma.
Voici donc comment les choses sont parties. Nous nous sommes lancés dans une aventure de 60 épisodes, et on a eu le résultat final que vous avez aujourd’hui.
Question : Peut-on déduire que vous avez choisi ces no-names, à cause des moyens qui faisaient défaut, ou c'était une initiative qui consistait à donner sa chance à ces jeunes acteurs ?
SWK : Un peu des deux, je dirai. Financièrement, ‘’Vengeance’’, c'est du lourd. En termes de budget, il était vraiment énorme, et les acteurs, ça coûte assez cher, faire un casting international ou un casting, c'est énorme, donc on a opté pour cette technique-là, prendre ces jeunes et faire des formations. Je me rappelle, on a eu à faire des formations sur le projet, on parle généralement de répétition, rejouer les scènes, les trainings sessions, pendant plus de 5 mois. Je dirai donc que c'est un mélange de ces deux facteurs, manque de finance et le besoin de former des jeunes qu'on pourra mettre en avant.
Question : Comment avez-vous développé l'intrigue et les personnages de cette série ?
SWK : J’ai cette habitude d’être attentif sur le travail d’écriture de mes scénaristes à l'écriture. Lorsque je commente l'écriture d’un scénario, je m’efforce de faire comprendre au scénariste de la série, Bernard Noubissi, ce que je veux transmettre à mon public. D’abord, il y a un style particulier de scénario que j’affectionne. J'ai mon style à moi, je veux plus d'action, plus de suspense, plus d'intrigue, c'est ça, dans mes scénarios. Ensuite, j'aime travailler librement. J'ai ma petite structure de production indépendante et j’évolue en fonction de ma vision.
Je fais deux styles de casting, c'est-à-dire, il y a ce qu'on appelle le casting grand public, où on fait des annonces, des acteurs viennent, et il y a le fait qu'en écrivant, j'ai déjà une idée de qui peut jouer quel rôle. J’ai la chance de connaître un peu tout le monde dans le milieu, j'ai quelques têtes d'affiches et je sais déjà, par exemple, qui jouera le rôle d'Adama Bouma. Pour ce rôle-ci, pas besoin de passer par un casting, parce que moi, je savais quelle actrice pourrait l’incarner parfaitement.
Question : Quels sont les principaux thèmes explorés dans ‘’Vengeance’’, et pourquoi avoir choisi un tel titre ?
SWK : Cette série traite une dizaine de thématiques, mais il y a des problématiques sociétales qui ressortent le plus. Le premier, c'est la lutte des inégalités sociales, parce qu'il y a la toute puissante famille Bouma qui pense qu'avec l'argent, avec leurs richesses, elle peut faire ce qu’elle veut dans la société. On y aborde la corruption.
L’histoire tourne autour d’une jeune dame pauvre et défavorisée qui tombe amoureuse d’un enfant de ce puissant et terrible couple qui va tout faire pour les combattre, mais leur amour finit par vaincre. C'est donc l'injustice sociale qui est essentiellement présentée dans cette série.
La série ’appelle ‘’Vengeance’’ pour relever le fait que tous les actes que nous posons dans cette vie peuvent plus tard avoir des conséquences. Des actes posés même dans la jeunesse peuvent nous suivre toute une vie et nous nuire, un peu comme si la vie se vengeait de nos actes tortueux du passé.
Question : Nous avons constaté que la série est diffusée sur l'application TV5MONDE Plus. Comment se passe cette collaboration et comment TV5MONDE a-t-elle contribué à la diffusion et au succès de "Vengeance" jusqu'à aujourd'hui ?
Simon William Kum : TV5MONDE est un partenaire qui m'élève. En tant que petit producteur et réalisateur africain, c'est une consécration de travailler avec ce média international. Collaborer avec TV5MONDE est le rêve de tout producteur et réalisateur. Pourquoi ? Parce que c'est un média de portée mondiale, couvrant les cinq continents avec 8 chaînes de télévisions généralistes.
Pour regarder "Vengeance" sur l'application TV5MONDE, c'est très simple. La série se trouve dans la rubrique “Série et Films TV” sur la plateforme, qui est totalement gratuite d'accès, ce qui signifie qu'avec une connexion internet, vous pouvez la visionner comme vous le souhaitez.
Grâce à eux, nous avons pu toucher un public mondial. Aujourd'hui, je reçois des messages de personnes vivant aux États-Unis, au Canada, et même en Chine, qui nous disent qu'ils ont regardé "Vengeance". Les retours sont tellement positifs que je me sens honoré. Je voudrais donc remercier sincèrement TV5MONDE pour cet appui et ce soutien qui nous ont permis de nous révéler au monde.
Question : Selon vous, les médias ont-ils un rôle crucial dans la promotion du cinéma africain ? Comment travaillez-vous avec TV5Monde dans la promotion du cinéma africain et dans le soutien aux créateurs africains ?
Simon William Kum : Bien sûr que oui ! Les médias jouent un rôle plus qu'important dans le développement du secteur cinématographique. Malheureusement, en Afrique subsaharienne, notamment au Cameroun où je connais bien l'environnement, nous n'avons pas toujours la chance d'être appréciés à notre juste valeur ni d'être diffusés comme nous le souhaiterions. Mais avec des médias comme TV5MONDE, nous pouvons nous ouvrir à tout le monde francophone, et même au-delà, car la série est sous-titrée en plusieurs langues.
Les médias ont donc un rôle crucial à jouer. Je leur demande de nous soutenir et de nous accompagner dans nos productions, parce que le gros problème du cinéma africain est l'accompagnement financier.
Il ne faut pas non plus oublier le problème de la formation, qui est aussi crucial. Cependant, ce problème est en voie de résolution car nous avons de plus en plus de structures de formation aux métiers du cinéma.
Maintenant, il faudrait que nos gouvernements et nos médias puissent résolument nous accompagner. Je dis souvent aux médias que les programmes TV sont leur nourriture, ils ne peuvent pas vivre sans cela. Que vous soyez une chaîne généraliste ou spécialisée, vous avez besoin de contenus. Alors, accompagnez-nous pour en avoir. De plus, le monde est de plus en plus exigeant en termes de qualité des programmes. Certaines chaînes de télévision le font déjà, ce qui est bien et apprécié, mais elles gagneraient à collaborer davantage avec des producteurs pour offrir des programmes de qualité.
Question : Monsieur Kum, on aura bientôt terminé cette entrevue. Après ‘’ Vengeance’’, quelles sont vos perspectives, quelles sont les prochaines étapes de vos projets cinématographiques ?
Simon William Kum : Actuellement, nous sommes en pleine promotion de l'une de nos séries intitulée ‘’Kiga la Reine du Mal’’. Après cela, nous avons une série d'environ 52 épisodes prévue pour 2026, qui portera le nom de ‘’Côte Bleue’’. Je vous l’annonce en toute exclusivité. Cette série plongera les téléspectateurs dans l'univers médical. Je n’en dirai pas plus pour l'instant.
Question : De nombreux jeunes passionnés de cinéma liront cette interview dans notre média. Quel conseil donneriez-vous à ces jeunes réalisateurs africains souhaitant se lancer résolument dans l'industrie cinématographique ?
Simon William Kum : Très belle question. J'adore cette question parce qu'elle me permet de m'adresser à la jeunesse. En Afrique, il y a des dizaines d’années, nous pensions que le cinéma de qualité était l’apanage des Occidentaux. Mais aujourd’hui, nous avons toutes les raisons de croire que nous possédons les leviers pour produire des œuvres cinématographiques de grande qualité.
Personnellement, je vis uniquement du cinéma, j'ai ma petite famille, donc c'est possible pour tout le monde. Mon conseil aux jeunes est de se former, se former et encore se former, car on ne peut rien accomplir sans formation. Certains jeunes africains diront peut-être qu'il n'y a pas de structures de formation de qualité ou de grandes écoles de cinéma dans notre pays, mais je leur répondrai que je n’ai pas fait de très grandes écoles de cinéma.
Je voudrais leur dire que c’est sur le terrain qu’on se forme le mieux. S’approcher des aînés, faire des recherches sur internet, c’est aussi se former. Alors, il faut y croire et persévérer.
Interview réalisée par Dieu Beni Amvem