Poursuivi pour coaction de détournement de 595 millions de francs, l’ancien ministre de l’Economie et des Finances a démarré son oral devant le TCS en se présentant comme la victime des jalousies suscitées par ses succès dans le redressement de l’économie et des finances publiques. Kalara restitue la substance du jeu de question-réponse entre l’ancien ministre et Maître Marion Nko’o, l’un de ses avocats.
Question : quelles étaient vos fonctions à l’époque des faits ?
Pendant la période des faits, qui va du 27 janvier 2005 au 31 décembre 2006, j’occupais le poste de ministre de l’Economie et des Finances (Minefi). J’ai été nommé à ce poste le 8 décembre 2004 par décret N° 2004/322 du président de la République, son excellence Paul Biya.
Quelles étaient les attributions du ministre de l’Economie et des Finances que vous étiez ?
En cette qualité mes attributions étaient nombreuses. Faut-il le rappeler, le Minefi, créé par décret N° 2004/320 du 8 décembre 2004 portant organisation du gouvernement, était en réalité une mégastructure regroupant en un département ministériel unique les anciens ministères des Finances et du Budget, d’une part, et de l’Economie, d’autre part. Vous pouvez donc très aisément imaginer l’immensité des attributions qui étaient les miennes.
Toutes tournaient autour de l’ordonnance du 7 février 1962 réglant le mode de présentation, les conditions d’exécution du budget de la République fédérale du Cameroun, de ses recettes, de ses dépenses, et toutes les opérations s’y attachant ensemble ses divers modificatifs et textes d’applications subséquents.
Dites au tribunal si, en votre qualité de Minefi, vous avez réduit de 40% les ressources affectées au fonctionnement de la CRTV ?
Non ! En ma qualité de Minefi, je n’ai ni réduit, ni ordonné encore moins instruit qui que ce soit de diminuer les ressources de la CRTV en 2005. En effet, je n’avais pas la capacité juridique de le faire. Je voudrais avec votre permission du tribunal, rappeler que les ressources affectées au fonctionnement de la CRTV, notamment ses recettes ainsi que ses dépenses, sont arrêtées dans le cadre d’un budget annuel.
Il s’agit d’une obligation légale qui s’impose non seulement à l’Etat, mais aussi aux entreprises publiques telle que la CRTV. Je voudrais également me permettre de vous rappeler que, pendant la période des faits, la redevance audiovisuelle (RAV) allouée à la CRTV n’était plus l’objet d’une subvention arrêtée par l’Etat dans le budget de l’Etat. Il ne me revenait donc pas d’arrêter l’enveloppe budgétaire de la CRTV. Et je ne l’ai jamais fait.
Pour conclure, je dois dire au tribunal que j’ai été nommé le 8 décembre 2004 à la tête du Minfi et que M. Amadou Vamoulké a été nommé à la tête de la CRTV , si mes souvenirs sont exacts, le 16 janvier 2005. Qu’entre ma nomination et la sienne, il y a un intervalle de 45 jours. Comment aurais-je pu prendre les mesures contre sa gestion, alors que nous sommes arrivés pratiquement au même moment.
Mon sentiment réel est que la déclaration de Vamoulké ne procède que des incompréhensions auxquelles j’ai fait allusion, car il ne savait certainement pas les modalités d’affectation des ressources destinées à la CRTV ne faisaient plus l’objet de subvention arrêtées dans le cadre du budget de l’Etat mais étaient fonction des recouvrements effectifs de la RAV, processus dans lequel je n’intervenais pas.
Je suis persuadé qu’il n’était non plus au courant de la situation économique et budgétaire réelle dans laquelle l’Etat se trouvait au moment où il est nommé DG de la CRTV, ni des instructions données par le chef de l’Etat pour y faire face. Donc, simple incompréhension. Je ne parle pas des procès d’intention.
Prévue pour le 10 et 11 mars, la suite de l’interrogatoire de l’ancien ministre a été repoussée à la période du 22 au mars 2022, l’accusé témoin ayant rendez-vous avec son médecin entre-temps.
Rappelons que dans le volet 2 de l’affaire de la CRTV en cours, M. Polycarpe Abah Abah répond d’un présumé détournement de la somme de 595 millions de francs en coaction avec M. Vamoulké. Troisième et dernier accusé à prendre la parole dans ce procès, il n’a pas encore directement abordé les faits précis pour lesquels il est poursuivi, lesquels se rapportent à ses fonctions antérieures de directeur des impôts.