Elle sent le danger venir et se confie : « Je m'appelle Annie... J'ai 34 ans et je suis mariée ça fait exactement 4 ans. Diplômée de l'Enset de Bambili dans la région du Nord-Ouest, je suis actuellement en service dans la ville de Limbe dans la région voisine du sud-ouest. Je suis la 4ème née d'une famille de 7 enfants, dont 5 filles. La dernière de mes sœurs (Carine 28 ans) est sur le point de se marier. En fait, depuis quelques mois, elle nous avait fait part d'une relation qui était en train de devenir sérieuse avec un monsieur travaillant au Congo dans une compagnie pétrolière occidentale.
Vu l'état de ma jeune sœur depuis quelques mois, et les gestes financiers de son mec vis-à-vis de ma famille (mes parents surtout), il était évident que c'était quelqu'un très au-dessus du seuil de la pauvreté. Pour le 70ème anniversaire de papa, il lui avait fait parvenir, en plus d'un écran plasma de 70'' et d'un iPhone hors de prix, un magnum de whisky de 5L et une caisse de vin premier choix ; et pour le départ en retraite de maman dernièrement, c'était une cuisinière/gazinière ultra-moderne, un salon en rotin acheté en boutique et un téléphone chic, en dehors des 10 kg de gambas (10mille francs le kilogramme) ramenées par sa sœur cadette, venue assistée à la cérémonie.
Le truc c'est que personne à la maison ne connaissait ce gars, moi en particulier, je ne l'avais pas encore rencontré, déjà que j'étais loin. Je savais juste qu'il avait 37 ans l'année dernière et qu'il travaillait au Congo et venait au pays deux fois par trimestre environ. Sa famille était basée à Douala, et c'est là-bas chez ses parents que ma sœur partait le retrouver quand il était au pays.
Certaines de mes sœurs, les aînées, avaient eu l'occasion de le voir en photo, ou lorsqu'il faisait des appels vidéo à ma sœur. Pour tout dire, ça ne m'intéressait pas trop de le connaître, tant que la relation n'était pas encore concrète. Ma sœur m'ayant habitué à avoir constamment un nouveau mec. Elle n'était pas du genre à s'éterniser quelque part où elle ne trouvait ni son compte, ni son bonheur. Je lui avais fait la remarque un jour, comme une aînée, elle m'avait alors expliqué ceci :
- "Sita" [mon petit nom, qui signifiait tante, puisque j'étais l'homonyme de la sœur cadette de notre père], ce n'est pas que je change les gars hein… C'est juste que si je tombe sur un mec dont je sens qu'il n'est pas sérieux, je préfère aller recommencer ailleurs, que de rester là à rêver…
Bref, ma sœur nous avait annoncé que son mec lui avait fait part de son intention de l'épouser.
Ma mère a donc suggéré à papa que Carine invite Jules à la maison un dimanche, à son prochain passage au pays, question de mieux faire connaissance avant que les choses officielles ne se mettent en place entre les deux familles. C'est ainsi que j'ai décidé de faire le déplacement ce week-end là pour enfin mettre un visage sur tout ce que j'entends de bien depuis là sur mon futur beau-frère. Il est venu avec sa petite sœur et son meilleur ami. Il avait apporté un carton de bon vin, et sa sœur avait également fait à manger. Hum… Les choses de la terre !
À leur sortie de voiture, j'étais en train de faire la navette entre la cuisine et la salle à manger, du coup, je n'ai pas pu être à leur accueil avec mes autres sœurs. C'est par le fenêtre de la cuisine que je les ai discrètement observés. Mama Sara ! Si j'avais pu savoir cela plus tôt ! Jules, le fiancé de ma petite sœur, c'était mon ex (Julio, c'est comme ça qu'on l'appelait il y a 10 ans, quand on s'est connus. J'étais étudiante à l'université de Buea, et lui stagiaire à la Sonara, juste à côté, à Limbe.
Pendant un peu moins de deux ans, nous avions vécu une relation plutôt agréable, aux yeux de la jeune fille presque vierge que j'étais. Deux choses nous avaient alors séparés : son départ pour Douala et son penchant de plus en plus prononcé pour des pratiques bizarres pendant les rapports sexuels, notamment il adorait utiliser par la Sim 2. De même qu'il raffolait des parties à plusieurs… J'avais d'abord refusé, et puis amoureuse, j'avais cédé.
Mais quelques "séances" de ces pratiques avaient suffi à me décourager. J'avais trouvé l'une moche et l'autre douloureuse. Cela avait créé un climat froid entre nous, parce qu'il m'avait clairement fait savoir que si je veux fonctionner longtemps avec lui, je dois aimer et faire ce qu'il aime faire. Dans tout ça, il m'avait fait avorter deux fois… Ce qui avait fait que son départ pour Douala m'était apparu comme une sorte de libération.
Aujourd'hui, je découvre que ce mec qui est devenu une sorte de "Superman" aux yeux de ma famille, est sur le point d'épouser ma petite sœur. Ça me dérange profondément. Je sais que beaucoup vont croire que c'est purement par jalousie, mais en réalité, au-delà du fait qu'un mec ne devrait pas voir la nudité d'un membre de ma famille, après avoir vu la mienne, je n'apprécie pas la moralité du personnage, surtout maintenant qu'il a "réussi" financièrement.
Je n'ose même pas imaginer les choses qu'il fait faire à ma sœur. Et la seule pensée qu'elle puisse aimer, cela me donne la nausée. Au moment de le saluer, nous nous sommes reconnus. Et il m'a semblé moins gêné que moi. Et j'ai eu envie de lui demander comment il a fait pour ne pas remarquer que la fille qu'il venait de draguer il y a moins de 15 mois, ressemblait à son ex d'il y a 7-8ans ? Mais je me suis retenu.
J'ai joué le jeu tout comme lui, mais pendant le repas, quand nos regards se croisaient, je lisais dans ses yeux la même malice, le même "démon" qui l'habitait il y a 10ans. Il n'avait pas changé. À la fin du repas, je me suis excusée et je suis sortie faire une course parce que je ne voulais pas me retrouver à échanger des civilités dans le séjour avec lui. Je suis rentrée après leur départ. Je ne sais quoi faire depuis là. Tout déballer à ma sœur au risque de détruire sa relation sérieuse ? Me taire et laisser le destin agir ? Je suis dépassée ».