Classé dans le patrimoine mondial de l’UNESCO, le palais des rois Bamoun est un joyau architectural qui doit son existence au roi Njoya. Au départ, construit en matériaux provisoires, le roi décide d’en faire un grand palais comme celui du gouverneur de Buea.
Pour ses conseillers, c’est une entreprise folle, mais le roi est déterminé. Il veut construire son palais. Après de nombreux échecs, il finit par réaliser son rêve. Plusieurs siècles après sa construction, ce palais est toujours debout. Aujourd’hui Auletch vous emmène à la découverte de ce joyau historique.
Foumban est le chef-lieu du département du Noun. Au fil des siècles cette localité a forgé sa popularité grâce à l’artisanat qui est l’une des activités principales. Mais sa popularité, il la doit surtout au palais des rois des Bamoun qui est non seulement l’instance supérieure de la tradition du peuple, mais aussi un joyau architectural et historique qui attire de nombreux visiteurs.
Situé en plein cœur de la ville de Foumban, où il affiche fière allure, le palais des rois des Bamoun est l’un des chefs-d’œuvre du plus célèbre roi des Bamoun : le sultan Njoya. L’histoire raconte qu’en 1907, lors d’une visite de courtoisie dans la ville de Buea, le roi tombe sous le charme du palais du gouverneur Allemand Jesko Von Puttkamer. En grand observateur, il imagine déjà une telle bâtisse dans son royaume. Pourquoi ? Il faut dire que c’est la qualité première de Njoya, il aime ce qui est beau.
Lorsque le palais construit par Nsangou est entièrementbrûlé en 1913, le sultan Njoya décide de construire un nouveau. Mais cette fois-ci en utilisant des briques de terre. Lorsqu’il réunit tous ses conseillers, pour leur faire part de son projet de construire un palais comme celui du gouverneur Allemand, ces derniers sont un peu surpris.
On peut comprendre leur réaction, d’autant plus que cette nouvelle façon de construire les maisons n’est pas dans leurs habitudes. Ils sont plus habitués à construire en matériaux provisoires (bambou, lattes, boue, pailles etc.).
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Mais Njoya en bon stratège garde son mal en patience.Il sait très bien que, pour enlever le doute dans l’esprit de ses conseillers, il doit leur présenter quelque chose de concret. Njoya a une mémoire exceptionnelle, sans une expertise d’architecte, il va utiliser des bambous, pour monter la maquette de son futur palais, tout en s’inspirant de celui du gouverneur de Buea. Il va même ajouter certains détails, qui font de ce palais un vrai bunker. Lorsqu’il la termine, il réunit à nouveau ses conseillers pour leur présenter la maquette. Toute l’assistance est émerveillée, dès cet instant chacun commence à prendre le projet à cœur tout en mesurant l’envergure de celui-ci.
Maintenant il faut passer par la phase pratique. Njoya n’est pas à son premier projet de ce genre, tout petit, il a monté une maison en étage en utilisant la boue derrière la maison de son père, mais celle-ci n’a pas fait long feu. De cette expérience, il a beaucoup appris. Le nouvel emplacement du nouveau palais est très accidenté. Njoya en est conscient, pour lui c’est un choix stratégique. Mais le roi ne déchante pas pour autant, il réunit tous les artisans du royaume. Une forte mobilisation qui suscite même encore aujourd’hui auprès du peuple Bamoun, une fierté d’avoir participé à cette construction. C’est vrai Njoya n’est pas un ingénieur civil, mais il a le sens de l’observation et sait tirer profit de ses échecs. Après l’écroulement à trois reprises du palais, il décide de changer la technique de travail, et finalement c’est à la quatrième tentative que les murs vont résister. Ce qui va faire pousser un ouf de soulagement.
Le roi Njoya sait qu’il vient de gagner son pari, et aux yeux de son peuple c’est la démonstration de sa puissance. L’intérieur du palais est constitué de grosses parois en pierre qui délimite chaque segment du palais. L’habillage est composé de décorations peul et occidental, car Njoya est un monarque d’ouverture qui aime apprendre des autres cultures. Certaines pièces sont réservées pour les sociétés secrètes dont le roi a la charge. Le palais est une véritable cité organisée avec ses propres activités.
Lorsque le sultan Njoya décède en mai 1933 en exil à Yaoundé, il n’a pas droit aux funérailles au palais comme le veut la tradition. Pour l’administration française de l’époque, Njoya est considéré comme un ennemi, puisqu’il a soutenu les Allemands. Le palais resté sans entretien véritable, va vieillir. Ce n’est qu’avec l’intronisation du prince Seïdou Njimoluh Njoya, après plusieurs démarches auprès de l’administration coloniale, que ce dernier va intégrer le palais et lancer les travaux de rénovations depuis sa construction en 1917. Nous sommes là dans les années 50.
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En 1980, sous l’impulsion de l’UNESCO, un vaste programme de rénovation du palais est lancé, pour restaurer tout le patrimoine historique qui s’y trouve. A l’intérieur du palais, se trouve un musée, où sont gardés des objets qui racontent 600 ans d’histoire de la dynastie des différents monarques qui se sont succédés sur le trône, de Nshare Yen à Mbombo Nyoya.
L’UNESCO a reconnu ce palais comme un héritage culturel mondial, et chaque année, il est un lieu de pèlerinage pour de nombreux touristes venus des quatre coins du monde. Aujourd’hui la ville de Foumban est l’une des villes du Cameroun où le tourisme bat son plein grâce au palais des rois de Bamoun.