Il y a, depuis hier, un tollé suite au post commis par Cabral Libii Li Ngue Ngue, président national du Parti camerounais pour la réconciliation nationale (Pcrn). C'est normal. En effet, face à une telle posture d'un leader politique, cela ne peut susciter que des émotions, passions, pulsions et intentions. Toute chose prêtant le flanc à un débat entre les communautaristes et les anti-communautaristes, entre les laudateurs et les pourfendeurs du fédéralisme communautaire. Et les joutes s'animent bien depuis 24h. Acteurs politiques, leaders de la société civile, journalistes et internautes jettent sur l'anathème sur Libii Li Ngue Ngue. Tout comme ses affidés l'encensent. C'est la matérialisation du manichéisme et du fanatisme dont je parle régulièrement dans mes prises de position publique. Ah ça !
En réalité, ce débat sur la perception des quartiers soit "Bamileke", soit "Nordistes" est un débat ancien autant vieux que la prostitution, le plus vieux métier de la planète. Ce débat réfère à ce que nous appelons, en Sociologie des représentations sociales, aux *constructions sociales*. C'est pourquoi j'ai demandé, dans une plateforme numérique WhatsApp, si quelqu'un a déjà lu l'un des derniers ouvrages de l'Anthropologue culturel, Paul Abouna, intitulé *Le pouvoir de l'ethnie au Cameroun*. Ce Scientifique nous renseigne que tout ce que nous faisons dans le social est régi, délibérément ou inconsciemment, par l'appartenance ethnique. En se focalisant sur le champ politique camerounais, il démontre que même les formations politiques du pouvoir et de l'opposition sont construites sur l'étalon de l'ethnicisme et du communautarisme.
Même si à ce giron, le pouvoir de Yaoundé a davantage travaillé, depuis des décennies et, singulièrement, depuis l'avènement de la démocratisation de la vie publique, à circonscrire les partis dans des aires ethno-régionales précises. Le Sdf perçu comme un parti des anglo-Bami ayant comme fiefs électoraux construits le Nord-Ouest et le Sud-Ouest. L'Udc appréhendée comme le parti des Bamoun tant sa base communale est restreinte au Noun. L'Upc considérée comme le parti des Bassa, les fiefs électoraux construits étant les départements du Nyong et Kellé et de la Sanaga Maritime. L'Undp, l'Andp, le Fsnc et le Mdr sont perçus comme des partis du septentrion, qui se partagent les élus locaux en fonction de la représentativité et de la légitimité de chacune des formations. Dans le Nord, l'Adamoua et l'Extrême-Nord, les derniers résultats électoraux positionnent le parti de Bello Bouba Maigari en tête. C'est, d'ailleurs, la formation politique alliée au Rdpc qui a plus d'élus au parlement actuellement. Aujourd'hui, le même pouvoir de Yaoundé travaille au formatage de la conscience collective pour faire du Mrc le parti des Baham. Et pourtant.... Cette construction sociale est déconstruite, aujourd'hui, par le leader national, des cadres et militants dudit parti tant ils soutiennent, mordicus, que le Mrc a une assise nationale. C'est, d'ailleurs, discutable, défendable et acceptable, toute position étant vouée à la discussion publique. Soit!
Mais alors, peut-on seulement confiner le Mrc dans la région de l'Ouest et, singulièrement, dans le "fief bahamique"? Que nenni! Au Littoral, dans le Centre, ainsi que dans d'autres bastions régionaux, ce parti est autant représenté. La construction des fiefs électoraux des partis politiques en fonction des appartenances ethniques, voire ethnicistes est, a posteriori, transposable à la dynamique de la construction des quartiers dits "Sawa", "Bamileke", "Nordistes", "Bassa", "Beti", etc. Il s'agit, fondamentalement, des constructions sociales, des représentations sociales, des clichés sociaux et, partant, des stéréotypes sociaux