Dans un communiqué rendu public cette mi-journée, Jean Fils Ntamack fait, en moins d’un feuillet A4, le bilan d’une instruction qui est sensée avoir duré un mois. Le Procureur de la République près la Cour d’Appel du Centre livre ainsi ses conclusions et les détails d’une enquête qui n’en finissait plus d’être secrète.
Il aura donc fallu un mois et deux jours, trois autopsies dont deux réalisées par des collèges de médecins locaux (les 02 et 22 juin) et une par une équipe internationale d’Interpol (le 29 juin), pour découvrir « l’absence de toute trace de violence sur le corps » de Mgr Jean- Marie Benoît Bala.
Jean Fils Ntamack conclue à la « noyade », en dépit de tous les signes inadéquats que tous les observateurs avaient relevés lors du retour à la berge de la Sanaga du corps du défunt évêque de Bafia.
Sans surprise
Cette conclusion était d’autant plus attendue que des fuites sur cette enquête conduisaient à la piste des lobbies homosexuels et pédophiles, en rapport avec certains pontes du régime de Yaoundé et éventuellement des membres de la curie. Le mutisme du procureur de la République depuis le début de cette affaire était, de ce point de vue, éloquent.
Elle vient par ailleurs confirmer l’orientation grossière de la mise en scène de ce meurtre effroyable sur le pont d’Ebebda. Mise en scène qui voulait le maquiller en suicide et visait clairement à guider les enquêteurs sur cette piste-là.
Mais elle s’oppose surtout à la thèse de l’Eglise catholique qui affirmait encore sur les antennes de Rfi, il y a quelques jours par la voix de Mgr Samuel Kleda, Président de la Conférence Épiscopale Nationale du Cameroun (CENC), que Mgr Jean-Marie Benoît Bala avait été assassiné.
Une conclusion tirée par les cheveux
Une question s’impose de prime abord. « L’absence de toute trace de violence » est-elle la preuve d’une noyade ? Visiblement oui pour Jean Fils Ntamack. Mais elle est seulement la première, parmi la multitude auxquelles devra répondre le Procureur de la République.
Celui qui sera sans doute dès aujourd’hui la nouvelle star de ce crime odieux laisse dubitatifs les lecteurs de son communiqué. Ainsi, trois équipes de médecins légistes se seraient succédés sur un corps retrouvé dans l’eau pour rechercher des traces de violence. Difficile de comprendre !
Que veut donc prouver le Procureur de la République ? Parle-t-il du corps retrouvé dans les eaux de la Sanaga, après y avoir passé (supposément) trois nuits et deux jours ? Ou Jean Fils Ntamack répond-il aux nombreuses rumeurs ( qui n’en semblent plus seulement) et accablent des barons du gouvernement de Yaoundé ?
En parlant de noyade et non de suicide, Jean Fils Ntamack laisse entendre que Mgr Jean-Marie Benoît Bala serait allé se baigner dans la Sanaga le 30 juin à 23h. Risible, si la circonstance n’était pas si funeste, mais sans doute logique au royaume de l’incongruité.
Comment expliquer qu’un mois après, les conclusions de l’enquête soit différées ? Une seule certitude donc, Yaoundé semble avoir choisi de vérouiller cette enquête. Pour quelle raison ?
Bien malin qui saurait ne pas le dire. Il reste à savoir quelle sera la réaction de l’Eglise. Elle qui devra soit se parjurer, soit affronter le pouvoir.