La femme politique et leader d’opinion Alice Sadio est encore sortie de sa réserve. Dans une longue tribune qu’elle vient de publier, la présidente de L’Alliance des Forces Progressistes tacle violement le système éducatif du Cameroun qui constitue selon elle le nœud gordien du système que quarante années de pouvoir nombriliste, antinationaliste et anti progressiste ont mis en place. La femme politique critique l’équilibre régional qui selon elle s'avère aujourd'hui n'être à la réalité qu'un cynique projet d'asservissement intellectuel de la classe sociale pauvre. Camerounweb.com vous propose en intégralité sa sortie.


Cette affaire de disqualification du major de l'université de Ngaoundéré pour le Master 2 est pour ainsi dire, le nœud gordien du système que quarante années de pouvoir nombriliste, antinationaliste et anti progressiste a mis en place, sous les yeux impuissants des victimes de ses séquelles et candides des bénéficiaires de ses retombées sporadiques et éphémères.

Je parle de retombées sporadiques et éphémères parce-que lorsqu'on y regarde de près, il ressort qu'au bout de quarante ans de pratique d'un tel système, les inégalités intellectuelles sont non pas résorbées mais davantage exacerbées.

Et pour cause,

Ce système jadis emballé sous le concept angélique "d'équilibre régional" s'avère aujourd'hui n'être à la réalité qu'un cynique projet d'asservissement intellectuel de la classe sociale pauvre dont la progéniture, laissée pour compte, n'aura jamais la chance d'être envoyée comme les enfants de l'élite à l'origine de ce système, dans les meilleures universités privées d'ici, de Boston ou encore de la Sorbonne pour se frotter aux meilleurs Maîtres de sciences de la planète.

En d'autres termes, ce sont exclusivement les enfants des autres, j'allais dire les enfants des pauvres, des parents rélégués en marge des sphères de prises de décisions qui sont enrôlés dans un tel système d'évaluation qui condamne ceux-ci à porter sur leurs consciences ce sentiment dégradant d'être intrinsèquement ignares (alors qu'il n'en n'est rien) qui entachera malheureusement ces parchemins qu'on leur aura concédé sur la base de critères et considérations extra ou pire antiacadémiques.

Pis, le système ne s'est pas seulement arrêté là. Il a entre-temps eu l'ingéniosité d'instrumentaliser la brèche antiacadémique ainsi ouverte pour s'octroyer d'autres passe-droits peu orthodoxes. La promotion sans foi ni loi des diplômes canapés, des achats de points, bref, du favoritisme tous azimuts.

Trois catégories de victimes ressortent de ces pratiques

L'Etat: Car cet environnement tortueux de stigmatisation du mérite académique créé des disparités sur le capital de l'intelligentsia initial que ceux qui nous gouvernent avaient normalement pour mission de détecter, d'encadrer, de mettre en lumière afin que le Cameroun, l'Afrique et le monde en tirent le meilleur pour la science, le progrès et l'humanité.

Les ressortissants des régions et/ou ethnies "bénéficiaires" de cette discrimination intellectuelle baptisée "équilibre régional". Premièrement parceque le monde le sait. Or ledit monde est devenu un petit village où les peuples, les races, les pays interagissent sur tous les plans, scientifique, professionnel, business. Domaines dans lesquels personne ne fait de faveur à personne au motif qu'à l'origine un x était en réalité issu ou pas d'un d'une région où sa formation de base a été bâclée par l'absence d'une école primaire, d'une instruction secondaire et universitaire digne de ce nom. Personne ne va chercher à savoir si tel avait des bons livres au programme, des enseignants performants parce-que normalement rémunérés ou pas. La question que l'employeur, l'associé d'affaire ou l'éditeur demandera c'est "are u UP to the TASK or NOT". Et la décision en découlera sans autre forme de procès.

La troisième et ultime victime de ce système qui a perdu le sens de l'ordalie c'est l'Etat-Nation en construction.

Car il n'y a pas moyens plus pernicieux de pérenniser les clivages sociaux que ce système qui suggère à perpétuité au corps social d'un pays qui historiquement a connu la même grandeur et décadences, la même colonisation, le même retard de développement, la même pauvreté que certains ont, on ne sait trop comment, injustement damé le pion de la sapience à d'autres. Un tel postulat idéologique, entretenu par des politiques en manque de vision, de programme et de perspectives est aujourd'hui la gangrène qui ronge de l'intérieur, tel un charançon vampire, le projet d'accouchement, construction de l'être national décliné par les pères fondateurs de ce pays.