Nouvel épisode de notre série sur les palais des dirigeants africains. Pour échapper à sa fonction, l'ancien chef de l'État a surjoué ses ennuis de santé.
Le 3 novembre 1982, Ahmadou Ahidjo rentre à Yaoundé après un voyage éclair en France. Il descend de l’avion d’un pas pesant, le visage crispé, visiblement au plus mal, aux côtés d’une épouse bizarrement radieuse.
De retour au palais d’Etoudi, qu’il a fait construire par Olivier-Clément Cacoub, il convoque son Premier ministre, Paul Biya. L’informe de son intention de démissionner, lui témoigne sa confiance en lui précisant qu’il ne lui force pas la main et lui donne une heure pour réfléchir.
Il en faudra moins à Biya pour lui dire oui. Ainsi se termine dans le plus grand secret la tragi-comédie écrite par l’ex-président camerounais sur sa démission, que nombre de ses compatriotes considèrent encore comme le résultat d’un « coup d’État médical » exécuté par des médecins téléguidés par l’Élysée.
Depuis le congrès de Douala, en 1975, Ahidjo songe à se retirer. Il prend sa décision peu avant le 20 mai 1982, jour anniversaire de la réunification. Début juillet, il fixe la date de sa démission et déroule son scénario hollywoodien. D’abord, jouer les grands malades. Entre le 12 et le 30 octobre, il multiplie les signes de lassitude.
Lors de la présentation des lettres de créance des ambassadeurs d’Algérie et du Canada, il apparaît figé, prononce d’une voix monocorde des discours à peine audibles, s’éclipse d’un Conseil des ministres en se tenant la tête, éconduit presque le président équato-guinéen Obiang Nguema Mbasogo, en visite officielle au Cameroun.