Opinions of Tuesday, 3 October 2017

Auteur: Charly Karl Ékoulé Maneng

'Ambazonie': révélations sur le prétrole vendu aux américains par Sisuku

Le président auto-proclamé de l'Ambazonie et des lobbystes américains Le président auto-proclamé de l'Ambazonie et des lobbystes américains

Depuis quelques heures, une étrange rumeur circule sur les réseaux sociaux: le président de la Scacuf Sisiku AyukTabe aurait vendu à un fond d'investissement américain (Kilimandjaro Capital) des concessions pétrolières dans le Southern Cameroon.

Il n'en fallait pas plus pour que les Francophones qui ne cachent pas leur mépris voire leur haine des Anglophones (en usant du prétexte "patriotique") en fassent des gorges chaudes. A deux jours de la proclamation d'indépendance par la Scacuf, tout est bon pour décrédibiliser les indépendantistes anglophones.

De peur que la minorité des Francophones qui ont de l'empathie pour les Anglophones en soient décontenancés, je me donne la peine d'analyser cette information qui me paraît truffé de bizarreries.

Primo, en tant que président de la Scacuf, Sisiku Ayuk n'aurait pu conclure un tel acte de vente tout d'abord parce que Kilimandjaro Capital l'annonce par communiqué de presse en... 2012 !!! Point n'est besoin de vous rappeler que la Scacuf n'a été créé qu'en 2017. Sisiku l'aurait-il fait dans le cadre d'une organisation ayant précédé la Scacuf telle que le SCNC ou le Gouvernment of Ambazonia ? Trop peu probable. Le SCNC ne s'est jamais considéré comme un gouvernement (privilégiant plutôt l'activisme judiciaire) et le Gouvernment of Ambazonia préfère utiliser le terme "Ambazonia" au lieu de "Southern Cameroon".

Mieux encore, Sisiku était un parfait inconnu jusqu'à ce qu'il soit désigné comme président de la Scacuf. On peut donc penser que jusqu'à la récente crise anglophone, il s'était jamais beaucoup impliqué dans les mouvements autonomistes anglophones comme Wilfried Tassang Wilfred et Agbor Balla d'ailleurs.

Secundo, les réseaux sociaux reprennent un communiqué de presse publié sur le site web de l'organisation UNPO (unpo.org) qui regroupe les associations d'activistes de peuples qui s'estiment marginalisés. Or, ni le SCNC ni le Government of Ambazonia ne sont membres de cette organisation. Apparemment, un de ses employés un peu zélé n'a fait que reprendre un communiqué de presse publié par le média en ligne canadien Digital Journal sans effectuer des vérification sur l'authenticité de l'information.

Or, Digital Journal n'a rien d'un média en ligne traditionnel. Tous ses contributeurs sont des "journalistes citoyens", en fait des gens qui font du journalisme comme hobby (j'en sais quelque chose puisque j'en étais un contributeur). Et je le répète, ce n'était qu'une communiqué de presse (https://goo.gl/g7vrS4) et non un reportage.
Tertio, quand vous jetez un coup d'oeil sur le site web de Kilimandjaro Capital (http://www.kilicap.com), vous vous demandez si cette entreprise était même capable d'investir dans une boulangerie rien qu'avec les fonds de ses fondateurs (apparemment, deux frères)... Je doute fort qu'ils aient pu versé une avance substantielle au SCNC ou à Ambazonia contre une promesse de recevoir des concessions pétrolières le moment venu.

Mon hypothèse est que les frères Karim, en lançant leur fond d'investissement, ont cherché un moyen de créer un petit buzz à propos de leurs actifs et appâter ainsi les clients. Une ou des personnes connaissant bien le Cameroun (peut-être des activistes anglophones) ont du leur parler du Southern Cameroon et du problème anglophone.

Nos jeunes loups de Wall Street ont y vu une belle occasion de faire mousser leur mayonnaise. Rien de plus.

Comme disait quelqu'un, la première victime d'une guerre est la vérité. L'affaire sus-évoqué en ait une évidente illustration.Mais rien n'exclut non plus une possible vente dans un proche futur.