Opinions of Wednesday, 9 February 2022

Auteur: www.camerounweb.com

Analyse : voici la première partie des leçons de Can 2021

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La caporalisation de l'événementiel par le politique au Cameroun

La fête populaire du football africain, dont les lampions se sont éteints le 6 février 2022 à Yaoundé, aura été confisquée par le pouvoir central et les fonctionnaires. Au terme du déroulement de la Can Total Énergies au Cameroun, il est apparu, sans conteste, le phénomène de l'accaparement de cette compétition continentale par l'ordre politique dominant et, singulièrement, par les maillons du régime en place et les fonctionnaires des strates bureaucratiques. Un clin d'œil jeté sur l'architecture organisationnelle de cet événementiel incline, à la fin de la Can, à constater la caporalisation de cette compétition par le politique. D'où le basculement dans la politisation de l'événementiel.

Pourtant, dans la scénographie de l'agencement de l'événementiel dans des pays sérieux, l'organisation est l'affaire non pas des comités nationaux et locaux d'organisation, mais plutôt celle des professionnels recrutés dans ce giron d'activités. En réalité, ce sont des experts non- affiliés idéologiquement à qui est confié le vaste travail organisationnel, fonctionnel et structurel de théorisation, de préparation, d'organisation, d'exécution, de suivi et d'évaluation. Décider de confier l'événementiel à un comité local d'organisation de la Can relève, en effet, d'une démarche archaïque, voire anachronique. C'est pourquoi il est judicieux que l'organisation d'un événementiel à la dimension de la Coupe d'Afrique des nations ou du Championnat d'Afrique des nations passé soit confiée à une ou à des agences d'expertises, à une ossature de professionnels qualifiés œuvrant dans ce domaine à l'échelon supra national.

Mais malheureusement, dans l'imaginaire collectif du politique au Cameroun, cette compétition continentale a été l'apanage des décideurs de l'ordre politique dominant en place ayant désigné une nomenclature de fonctionnaires et de hauts fonctionnaires chargés de peaufiner le déroulé de cet événementiel. Certes, l'on ne doute pas de l'existence des professionnels dans les strates bureaucratiques publiques, mais ces derniers sont englués dans la nasse gouvernante mue par l'idéologie du parti au pouvoir. Sur ces entrefaites, ce n'est pas l'intellectuel, l'universitaire ou le professionnel de l'événementiel enfoui dans les circuits décisionnels qui pense indépendamment de sa chapelle politique, mais c'est plutôt l'intellectuel, l'universitaire ou le professionnel de l'événementiel phagocyté par la strate politique dominante qui pense en fonction des logiques, des aspirations, des desiderata et des représentations du pouvoir en place. Il y a donc, en substance, une inféodation de ces experts du régime à l'idéologie politique dominante du système. Forcément, ce n'est pas le champ scientifique imbibé de la sapientia et de la bene di sciencia qui agira, mais c'est le champ du politique politicien du pouvoir en place qui va réguler tout comme cela s'est, d'ailleurs, passé depuis la mise en place des officiels du Cocan jusqu'au déroulement de cette compétition continentale.

De la caporalisation de cet événementiel par l'ordre politique, il ressort la survivance de la culture du fonctionnariat, lequel gère, contrôle, régule, voire colonise le levier organisationnel. A cause de cet état de choses, il y a donc eu des passifs, des errements et des faits divers créés par les décideurs qui nous ont servi bien de scories et, a fortiori, la cacophonie à travers leurs manières d'agir, de penser, de sentir et de faire. Lorsque vous voyez le ministre d'État Secrétaire général de la présidence de la république (Sgpr) chapeauter l'administration du déroulé de l'événementiel en visitant, par exemple, les chantiers des stades(Douala(Japoma) Limbe, Kouekong, Garoua, Yaoundé (Olembe) de la Can avant l'entame de cette compétition ceci en compagnie des autres officiels du Cocan, cela témoigne de la visibilité du politique ou, du moins, de la théâtralisation du politique. Lorsque vous voyez le ministre des Sports et de l'Éducation physique (Minsep) être désigné président du Cocan, et dont les membres sont, pour la plupart, des fonctionnaires, cela dénote l'emprise des logiques du politique sur l'événementiel. Lorsque vous voyez une tête de proue du cabinet civil de la Présidence de la république organiser, dès l'entame de la compétition, la Can des influenceuses, que dis-je des "sexfluenceuses" aux frais du contribuable camerounais, cela participe du desideratum pathologique d'un membre de l'ordre politique dominant. Illico presto, il est évident de basculer dans la Can des prévaricateurs des deniers publics. Malencontreusement, ces dernières ont été, quelques jours après, contraintes de retourner à l'étranger, où elles sont domiciliées depuis des années. Lorsque vous voyez la mobilisation des ministres de la république, des fonctionnaires, des maires des communes d'arrondissement et d'autres élites politiques urbaines pour contribuer au déploiement massif des catégories sociales dans les stades, cela relève, dans la même veine, de l'agitation des acteurs de l'ordre politique gouvernant et de ses affidés pour la réussite de la Can.

Lorsque vous voyez la saturation des panneaux publicitaires par l'image du Président de la république parallèlement président national du Rdpc(Rassemblement démocratique du peuple camerounais), cela procède de l'instrumentalisation de la figure politique du fahrer à des fins de politisation, voire de personnification de la Can. Ainsi peut-on voir des formules du genre : "C'est la Can de Paul Biya". Le basculement dans la politisation de cette compétition sportive est, ipso facto, faite. Ce type de fonctionnement ne peut qu'entraîner cooptation, collusion, concussion, corruption, prévarication, népotisme, sectarisme, clientélisme, favoritisme, etc au demeurant tant chaque maillon de la chaîne budgetivore travaille avec ses copains, ses coquins et ses fraters. De toutes les façons, l'heure de la reddition a sonné ! Ainsi va la Can avec ses images, visages et virages.