Opinions of Monday, 16 November 2015

Auteur: Ben Christy Moudio

Boko Haram : le paradoxal Cavaye Yeguie Djibril

Le président de l’Assemblée nationale, a orienté son discours de plénière d’ouverture autour de l’accroissement de la lutte contre Boko Haram. Des propos qui rappellent le silence du PAN sur les «agents dormants» de la secte au Cameroun.

Le texte de Cavaye Yéguié Djibril est en tout cas dense. 30 pages parmi lesquels le PAN a réservé la part belle, aux exactions de la secte Boko haram, et les mesures prises par le Président de la République, Chef de l’Etat et Chef des armées, dans la lutte contre ce groupuscule. A titre d’exemple, le président de l’Assemblée nationale s’apitoie sur les soldats camerounais et les victimes de la troupe à Shékau.

Morceaux choisis « …Ces braves et intrépides militaires camerounais qui sont tombés au front dans la guerre que notre pays livre aux terroristes de la cynique secte Boko Haram, tout comme enfin ces paisibles citoyens fauchés par les actes criminels des kamikazes qui malheureusement, continuent à semer la désolation dans nos villages de la dorsale Ouest de la région de l’Extrême- Nord ».

Ou encore ; «C’est notamment le cas, pour le déplorer de l’exécution du fils du Chef traditionnel de 2ème degré de KOSSA dans le département du Mayo-Sava, égorgé comme une bête de somme il y a deux jours, de l’exécution de cinq personnes à BIA dans l’arrondissement de Kolofata hier et, il y a juste quelques heures,(ndrl jeudi 12 novembre) l’assassinat du président de la sous-section Rdpc de Kouyape dans le Mayo-Sava par ces terroristes de Boko Haram ».


Ainsi dans ces pages se succèdent des données factuelles relatives aux lourdes pertes que connait que le pays dans la guerre asymétrique que livre le Cameroun aux fous de Dieu. Un sujet préoccupant pour le Président de l’Assemblée nationale, qui au fil des sessions renouvelle sa «détermination à œuvrer dans la lutte contre Boko Haram». Le PAN n’hésite donc pas à piocher ici et là des éléments visant à montrer son engagement dans ce combat auquel il invite d’ailleurs toutes les composantes de la société camerounaise notamment. « Je saisis l’occasion qui m’est ainsi offerte pour davantage toucher la sensibilité de tous et de chacun, et lancer un appel à une solidarité plus agissante en direction de la communauté nationale et internationale »a affirmé Cavaye Yéguié Djibril du haut du perchoir ce 12 novembre.

Brouillage de pistes

Ce renfort d’arguments et de données préoccupant sur l’impact de la troupe à Shékau place le PAN dans une position d’acteur politique préoccupé par la situation sécuritaire au Cameroun. Toutefois, l’on se rappelle les multiples sorties de ce dernier aux cours des sessions ordinaires de juin 2014 et 2015. La tête dirigeante de la Chambre Basse du parlement affirmait alors : «Boko Haram est parmi nous». Des affirmations ayant fait les gorges chaudes de la presse et de l’opposition camerounaises et suscité une interrogation majeure, « pourquoi le PAN qui semble si informé ne livre-t-il pas les noms les complicités endogènes de la troupe à Shékau ? Lui qui en outre affirme lutter contre la secte Boko Haram ? »

Face à des réponses toujours attendues, le Président national du Social Democratic Front (Sdf) John Fru Ndi demandait en aout 2015 que le PAN soit interrogé suite à ces affirmations, qui sonnent pour le Chairman comme des « aveux de complicité et de culpabilité ». Une idée reprise en septembre dernier par le Président national du Mouvement pour la renaissance du Cameroun «(Mrc), Maurice Kamto. Ce dernier à son tour recommandait une interrogation publique pour le PAN. Cette déclaration ne peut pas être faite à la légère. Il a surement quelques éléments, des données factuelles. Il faut lui demander de s’expliquer là-dessus ».

Cavaye Yéguié Djibril affiche ainsi un paradoxe des plus sidérants. Affirmer son engagement dans la lutte contre Boko haram et ne pas livrer des informations sur les agents dormants de la secte terroriste au sein de la classe politique camerounaise. De quoi susciter de nombreuses interrogations à tout le moins.