Près de dix mois après la l’approbation par Paul Biya du plan de relance soumis par Boeing Consulting, la compagnie aérienne ne redécolle toujours pas. La crise est passée par là. Et les hommes commis n’étaient peut-être pas les bons. On apprend incidemment que le cabinet de consulting n’a jamais rien eu à voir avec le grand avionneur américain.
Le nouveau directeur général de la compagnie aérienne aura gardé le silence et joué pendant dix mois à ne pas rencontrer ses « employés ». Il est seul à savoir pourquoi. Dans des salons à Douala ou à Yaoundé, il se raconte de belles bonnes. Surtout depuis le débarquement de Mefire Oumarou, le ministre délégué aux Transports, nommé PCA de la compagnie après le départ d’Edouard Akame Mfoumou, ex-ministre de l’Economie et des Finances. Il se chuchote que le ministre des Transports, ministre de tutelle de fait de la compagnie, a savonné la planche et obtenu la tête de Mefire Oumarou, qui disait ouvertement que le plan soumis par Boeing Consulting n’en était pas un. Alors que le Chef de l’Etat l’avait approuvé et adopté sous les vivats de millions de Camerounais qui ne l’auront jamais lu.
Pas plus que Paul Biya lui-même, qui aurait potassé un rapport gros de plus de 22 pages en anglais et signé, en moins de deux heures, la belle bafouille. Les journaux paraissant à Yaoundé ou à Douala savent les raisons pour lesquelles Ernest Dikoum voudrait enfin parler à ses « employés-collaborateurs ». Il tiendra en mille mots comme en un seul de leur annoncer une vilaine nouvelle : les salaires vont être coupés. Sans blagues, parce que la compagnie ne peut pas les assurer et, d’autre part, le ministère des Finances est essoufflé. Les salaires des employés vont être revus à la baisse. Et personne n’est enchanté dans la maison.
On n’en finit plus avec les cauchemars à Camair-co. Conséquence, dans les chuchotements entendus, on ressort tout. Y compris que le nouveau directeur général aurait dit des mensonges sur son CV. Et qu’il serait même sous le coup d’un procès par devant le Tribunal Criminel Spécial. Le ministre délégué était aussi accusé d’avoir essayé de prendre la haute main sur le rapport de Boeing Consulting. Pour des raisons que l’on devine. Et que le ministre Mebe Ngo’o tenait de son côté à être à la fois ministre de tutelle et Président du Conseil d’administration.
L’euphorie aura duré le temps qu’il a fallu. Le rapport finalement déposé par Boeing Consulting a enfin livré son contenu d’astuces et de mesures techniques préconisées pour le décollage véritable de la compagnie nationale de transport aérien. Enfin, était-on en droit de soupirer, un véritable business plan pour une compagnie qui n’en avait jamais eu. Ledit plan fait le tour des questions fondamentales et des points névralgiques pour une compagnie aérienne de l’ambition de Camair-Co. Il proposait en plus des solutions-miracles. La flotte devrait passer à 18 aéronefs (contre cinq seulement aujourd’hui) à l’horizon 2020. Les destinations desservies par la compagnie allaient faire étendre le réseau à 27 destinations dont cinq internationales, treize sous régionales et neuf à l’intérieur du pays.
Les destinations internationales, avait-on appris, seront desservies par un appareil Boeing-777, le plus gros porteur du constructeur américain après le 747. En attendant l’arrivée des Boeing 787- Dreamliner, d’ici quelques années. La flotte aura été en outre complétée par deux Q-400 à acquérir chez la Canadien Bombardier et un autre MA-60 chinois qui s’ajoutera aux deux autres déjà dans la flotte. Sur le plan financier, Boeing Consulting proposait à l’Etat actionnaire unique de prendre sur lui le lourd endettement de la compagnie qui s’élevait à 35 milliards. Et de mettre sur la table un total de 60 milliards d’argent frais pour le financement du plan.
Quant à l’exploitation de la compagnie, le suivi de la maintenance allait être consciencieusement encadré. On allait soigneusement veillera atteindre les standards internationaux et assurer le suivi informatique des activités de maintenance pour un rendement optimal dans le domaine de l’aéronautique. Les questions de gestion au quotidien de la compagnie n’avaient pas été évacuées. Le plan prévoyait une gestion qui devra s’arrimer aux principes de compétitivité, d’agressivité commerciale, de rentabilité des lignes, de stabilité de l’exploitation, de sécurité des opérations, d’encadrement réglementaire de tous les pans d’activités de l’exploitation et de compétence des personnels.
Pour la matérialisation de ce plan, Boeing Consulting propose d’accompagner la Camair-co sur une période de 18 mois renouvelables. Voilà résumé le plan en ses grandes lignes. Un plan réaliste qui a eu l’assentiment du Chef de l’Etat qui l’a approuvé le 16 juillet dernier. Dix mois après, on constate les marasmes. La compagnie ne compte plus que quatre avions. Les deux Boeing 737 récemment acquis, et les deux avions MA-60 dont un est toujours cloué au sol. Quant au DJA, le 767, il est hors-piste. La compagnie ne compte plus que quatre avions. Les deux Boeing 737 récemment acquis, et les deux avions MA-60 dont un est toujours cloué au sol.
Quant au DJA, le 767, il est hors-piste. La compagnie n’ira plus en Europe. Pas avant longtemps en tout cas. Alors que des certifications avaient été signées en faveur de la compagnie une année auparavant sur le ciel européen, les avions de la flotte camerounaise ne desserviront plus l’Europe avant longtemps.
C’est l’argent qui manque le plus
Des sources proches du ministère des Finances confient en privé que les caisses de l’Etat seraient dramatiquement vides. On ne voit pas comment un Etat impécunieux se permettrait d’engloutir des dizaines de milliards dans une compagnie aérienne qui n’a jamais dégagé le moindre bénéfice d’exploitation. Ce n’est donc pas demain que la Cameroun verra ses Boeing-777 ou des Dreamliners. Les lecteurs camerounais qui ont pu mettre la main sur le fameux rapport savent ce que les autres ne savent pas. Le rapport reçu par Paul Biya et ses collaborateurs n’a jamais été soumis par une certaine Boeing Consulting. Il est plutôt signé « The Boeing Company ».
La section Consulting de la compagnie Boeing connue à Seattle dispense mille services et des consultants de pointus de haut vol. En management, en aéronautique, en informatique ou en sciences de spationautes de la NASA. Personne ne s’est encore aperçu qu’un telle compagnie , Boeing, n’a jamais pu se mêler à la farce d’une telle pantalonnade. Mais il n’empêche, les uns et les autres ont tous tenu à se l’approprier.
Selon les dernières nouvelles, Boeing Consulting n’était qu’une affaire très personnelle de Nana Sandjo. Par chance ou par malchance, ce plan de relance n’aura pas lieu. Paul Biya n’a plus d’argent avec le retour du Cameroun aux plans d’ajustement structurel du Fmi. Qui parlait encore de la malédiction des avions ? C’est à croire que le Président Ahidjo a décidé de maudire le Cameroun