Opinions of Friday, 20 May 2022

Auteur: Dr Sandjong Sani

Cameroun : voici le sort réservé aux enseignants qui boycottent le mouvement OTS

Les enseignants camerounais sont en colère Les enseignants camerounais sont en colère

Les différents mots d’ordre de grève lancés par le mouvement OTS ont été respectés dans l’ensemble. Il y a cependant certains enseignants qui évoquent un certain nombre d’arguments et refusent de rejoindre le mouvement. Dans cette tribune, Dr Sandjong Sani s’interroge sur le sort qu’il faut réserver à ces derniers

Vacuité de l’argumentaire des enseignants violant le mot d’ordre de grève d’OTS : quelle attitude adopter à leurs égards au sein de la corporation?

Depuis la levée de la suspension de la grève le 25 avril dernier, il est clair que de nombreux enseignants ont changé de fusil d’épaule et ne se soumettent plus aux mots d’ordre de grève en général, ou ne respectent pas particulièrement le boycott des examens et concours officiels prescrit par le mouvement OTS et ses associés. Il est important de démontrer la vacuité de certains arguments qu’ils évoquent pour soutenir leur position, et de suggérer une conduite à suivre face à de tels agissements dans la corporation.

Tout d’abord, ils disent se soucier de leurs élèves qu’ils ne veulent pas sacrifier dans leurs revendications corporatistes. Ont-ils oublié le proverbe de la charité bien ordonnée ? Ils ne sauraient évoquer la situation préoccupante de leurs élèves alors que la leur est tout aussi critique. Il revient à chaque composante sociale, la priorité de défendre en permanence leurs droits. Les enseignants se sont montrés suffisamment patients, avant d’avoir aujourd’hui le droit d’affirmer en toute légitimité et légalité, qu’ils ont trop supporté dans la cadre de cette grève.

Sur la même lancée, certains enseignants préconisent un report de la grève dans l’optique d’assurer un bon déroulement des examens de fin d’année, tout en prévoyant de la reprendre au début de la prochaine rentrée scolaire. L’indicateur d’une remobilisation difficile après deux semaines de suspension devrait déjà faire douter de la capacité de reprendre efficacement cette grève après une longue trêve. C’est également une option hypothétique, du fait qu’on ne peut pas conjecturer de l’absence d’obstacles, ou de nouvelles raisons qui seront avancées pour perturber cette reprise effective de la grève. Par ailleurs, ces arguments peuvent être qualifiés d’incongrus, si on considère cette quasi insouciance des mêmes enseignants à l’égard des élèves des classes sans examens certificatifs. En effet, dans un grand nombre d’établissements, ces élèves n’ont pas été enseignés, ni été évalués, depuis le début de la grève, une situation grave qui ne les préoccupe pas similairement.

Plusieurs enseignants prétendent soutenir le mouvement de grève, mais s’engagent tout de même à participer aux examens officiels, soi-disant pour satisfaire la hiérarchie directe ou supérieure, pour gagner en expérience, ou pour se soumettre à la majorité de peur d’être taxés de rebelles. Dans le fond, la grande majorité d’entre eux s’intéressent au minable pécule financier qu’ils en tirent. Ils sont ainsi chacun comparables à un joueur d’une équipe de sport collectif, qui contribue dans un match à la victoire de l’équipe adverse pour des intérêts purement personnels.

Tout compte fait, ces professionnels de l’éducation sont coupables d’un comportement proche de la traîtrise. Pour des raisons personnelles, ils se mettent totalement ou partiellement en marge de la lutte de leur corporation pour la justice, et pour de meilleures conditions de vie et de travail. Cette attitude est également le reflet entre autres, de leur égocentrisme, de leur manque de clairvoyance, de leur accoutumance à l’indigence, de leur passivité ou de leur couardise en relation certainement avec le contexte de gouvernance du pays.

En dépit de ces postures répréhensibles, il ne semble pas pour autant approprié de les stigmatiser dans le vécu quotidien. Chaque membre de la profession doit avoir à cœur de conserver dans son établissement scolaire d’attache, l’harmonie nécessaire au bon encadrement des apprenants. Il faut également continuer de les sensibiliser sur les grands enjeux de cette lutte corporatiste pour l’avenir de la profession et la qualité de l’éducation au Cameroun. En cas de non aboutissement des revendications, il serait opportun de leur signifier leur implication dans cette situation d’échec, surtout s’ils arrivaient à se plaindre ouvertement des insuffisances dans la gestion des ressources humaines.

Pour terminer en s’orientant sous un angle moral ou spirituel, il faut dire qu’à l’évidence, la réjouissance de certains bienfaits dans nos vies relève souvent de l’illusion. Tout acte émanant de notre responsabilité est soumis à une justice réputée d’origine divine, à la réalité d’un jugement de notre conscience, à une mémoire agissante des victimes ou des bénéficiaires, et au principe d’une absence de profit pour des biens et avantages mal acquis. Toute décision prise en étant passée au crible de ces considérations morales, pourrait bien nous préserver de la turpitude et des conséquences négatives dans la postérité.

Dr Sandjong Sani