La grève des enseignants du Cameroun a été une occasion pour Serge Aimé Bikoi de faire la lumière sur le train de vie du gouvernement camerounais.
La somme des revendications énumérées et posées par des enseignants regroupées sous la bannière du collectif « On a trop supporté(Ots) » s’évalue à 181 milliards de Fcfa.
En décidant, aujourd’hui, de décaisser l’enveloppe de 2,7 milliards de Fcfa pour régler, uniquement, le payement des arriérés des primes de correction aux examens officiels antérieurs, cela représente, en terme de ratio, 1,5% du montant global estimé à 181 milliards de Fcfa. Bien qu’un pas soit franchi relativement au règlement de ce pan de revendication, il s’agit de relever que beaucoup reste encore à faire dans le circuit de la résolution de la litanie des revendications des enseignants.
Après avoir lu, il y a quelques jours, une tribune au vitriol de l’honorable Jean Michel Nintcheu, député Sdf du Wouri-Est, en guise de soutien aux enseignants, il apparaît, manifestement, que pour résoudre le problème lié à l’incidence pécuniaire évaluée à 181 milliards de Fcfa, en plus d’accélérer les procédures administratives et de sanctionner tous les responsables de l’inertie gouvernementale, il suffit, sur le plan financier, de dissiper les gaspillages et de supprimer les dépenses oiseuses et improductives contenues dans la loi des finances de l’exercice 2022 qui comporte des lignes opaques et des niches budgétivores entretenues par l’oligarchie régnante, notamment les prédateurs de la fortune publique.
A titre illustratif, voici certaines lignes exubérantes énoncées par l’élu de la nation :
« 1- La ligne 65 intitulée « Interventions de l’État en fonctionnement » a pour objectif de couvrir les charges non réparties de l’État en fonctionnement. 400.406 milliards de Fcfa en 2022 contre 358,453 milliards de Fcfa en 2021. Soit une augmentation de 41.953 Fcfa.
Toutes les institutions de l’État bénéficient, pourtant, d’un budget de fonctionnement. La ligne 65 ne contient aucune information sur les critères de sélection des bénéficiaires, la nature des bénéficiaires, ainsi que les montants à allouer à chaque bénéficiaire.
Cette ligne est porteuse de tripatouillages, de dissimulations et de maquillages du fait que les actions à entreprendre n’ont jamais été élucidées à l’avance et les comptes d’emploi n’ont jamais été détaillés. C’est une ligne fourre-tout de détournements de deniers publics à grande échelle. », écrit J.-M. Nintcheu.
Autre ligne de dépenses budgetivores non des moindres, figurent:
2. Les dépenses de fonctionnement somptuaires
« Le budget de 2022, ajoute l’élu Sdf, comporte également des dépenses
stratosphériques et brumeuses à même de renverser plus d’un camerounais à qui le régime de Yaoundé demande de faire preuve de résilience. À titre d’illustration :
a- Les dépenses de personnel se chiffrent à 1134,498.512 milliards de Fcfa, dont 40,755 milliards de Fcfa sur la ligne « Autres personnels ». De quel autres personnels s’agit-il ?
b- Dépenses des biens et services (858,589 milliards de Fcfa) dont:
– 66,382 milliards de Fcfa pour l’eau, l’électricité, le gaz et autres.
– 80,346 milliards de Fcfa pour les matières, matériels et fournitures
– 58,3 milliards de Fcfa pour les frais de transport et de mission.
– 16,54 milliards de Fcfa pour le loyer
– 223,426 milliards de Fcfa pour le mobilier et matériel de logement et de bureau.
Il faut cisailler de façon claire, limpide et utile les allocations budgétaires contenues dans ces lignes et affecter le gain de productivité tiré de cette opération à la résolution des problèmes cruciaux soulevés par le mouvement OTS. Nul n’a le droit de sacrifier l’éducation d’un peuple pour des intérêts bassement prébendiers ».
Au demeurant, en élaguant ces poches de dépenses faramineuses, dont les montants viennent d’être listés ou, du moins, en les réduisant de manière systématique, le problème des enseignants mérite, sans conteste, d’être résolu tant 181 milliards de Fcfa ne représentent que le minimum des sommes colossales destinées à être dépensées jusqu’en fin d’année. Mais comme au pays de Paul Biya, l’éducation n’est pas la priorité des priorités, les dispensateurs de savoir, de savoirs-faire et de savoir-être sont sacrifiés au quotidien.
Ces revendications remontent à plusieurs années avant même que la crise sécuritaire ne commence à sévir dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest en octobre 2016. Ceux qui évoquent la guerre au Noso comme pesanteur à la résolution des problèmes des formateurs de l’humanité sont, carrément, hors-sujet et sont passés à côté de la plaque.
Quand vous voyez un pays investir des milliards de Fcfa sur le ludique, à l’instar du football (référence faite à la Can Total Énergie 2021), quand vous voyez un pays offrir des grosses cylindrées à des autorités administratives alors qu’au même moment, des enseignants sont en grève depuis le 14 février 2022, cela démontre, indéniablement, que le gouvernement camerounais a tué l’éducation et, singulièrement, les seigneurs de la craie. Il faut être sot ou même naïf pour ne pas le reconnaître. Triste pays!