Pendant deux jours, jusqu’au 05 septembre, le centre de l’Afrique sera en Asie. Aujourd’hui s’ouvre officiellement le troisième sommet de coopération Chine-Afrique, après quelques jours de tête-à-tête et de négociations bilatérales. Et ce qu’on remarque d’entrée, c’est la présence de la quasi-totalité des Chefs d’Etats et de Gouvernements africains à ce grand raout de Pékin.
Cette affluence se justifie et s’explique par l’enjeu économique que représente l’Empire du Milieu qui est, depuis 2008, le premier partenaire commercial du Berceau de l’Humanité avec un flux évalué en 2017 à 170 milliards de dollar, tandis que ses investissements prévus pour 2018 sur le Continent s’élèvent à 76 milliards de dollar.
Mais au lieu que les responsables Africains, comme à leurs habitudes, accourent en meute s’abreuver à cette nouvelle ruche, au point où certains s’en prennent à rêver d’une nouvelle politique de la bascule où la Chine servirait de contrepoids à l’Occident, il serait plus utile de s’inspirer du modèle Chinois pour faire face aux défis et aux problèmes que rencontre le Continent Africain.
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En effet, la Chine a connu dans un passé assez récent des difficultés semblables à celles des pays africains.
La première est bien entendue économique. L’image actuelle d’une Chine surdéveloppée, ultra-industrialisée et en perpétuelle croissance, fait oublier, même aux plus anciens, que juste à la fin des années 1970 et au début des années 1980, la Chine, à la suite de la politique des hauts fourneau et de la "révolution culturelle", c’était les famines qui ont causé plus de cent millions de morts, un Pib en deçà de celui du Maroc, un pauvreté rampante et galopante, des catastrophes naturelles en série, etc. Pour résorber cela, il a fallu faire en toute urgence des réformes urgentes, en rompant avec la politique de collectivisation pour encourager l’entreprise privée. Il aura surtout fallu mettre des populations au travail, en assouplissant au maximum les conditions de travail et surtout de rémunération. Et enfin, la Chine aura mis un accent particulier sur le transfert des technologies.
Le deuxième défi de l’Empire du milieu était géopolitique. A l’instar de l’Afrique, la Chine pendant des siècles a été au centre de grands appétits impérialistes. Tour à tour dominée par les puissances occidentales comme le Royaume-Uni, ou encore placé sous le joug des voisins comme le Japon, même son adhésion au bloc communiste débouchera sur une crise du fait de la volonté de domination de Moscou sur les responsables chinois. Pour s’en sortir, la Chine aura su bâtir une armée puissante et patriotique, se façonner une idéologie combinant des standards internationaux et des considérations nationales et elle aura surtout pu se faire une place au sein du conseil de sécurité des Nations Unies.
Le troisième mal chinois était politique. En effet, c’est une Chine désunie que sort de la seconde guerre mondiale et surtout de la « longue marche », et dont Taïwan reste à ce jour la parfaite illustration. Pis encore, la batailles de clans au sein de la nomenklatura, sur fond de désaccords d’orientations au sein du parti communiste entre conservateurs et réformateurs, et surtout les batailles de successions au lendemain de la mort du Guide Mao, entre la bande de quatre et le clan de Deng, rendra le pays quasi-ingouvernable tout en donnant aux citoyens une impression d’Etat stationnaire, de société bloquée, et dont les manifestations de la place Tienanmen apparaitront comme le cri de ras-le-bol. L’Empire du milieu aura alors pu bâtir un modèle politique assez original qui mêle allègrement quasi-monolithisme partisan avec un pluralisme interne au parti communiste. L’enjeu étant d’obtenir un maximum de cohésion nationale tout en s’assurant de la légitimité optimale des gouvernants. Ce qui a permis à la Chine, jadis réputée pour la grande corruption de ses leaders de faire des bons prodigieux en matière de gouvernance.
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La quatrième difficulté majeure de la Chine était socio-culturelle. En effet, comme les africains, les chinois étaient très extravertis sur le plan culturel, en proie à l’alcoolisme, l’oisiveté et la prestation. En somme, une dépravation des mœurs généralisée avec une bonne dose d’aliénation. La Chine a mis sur pied un système éducatif qui se donne pour principal objectif la maitrise de son environnement immédiat, l’intériorisation des valeurs ancestrales, et la réponse aux attentes de la société chinoise. C’est ce qui permet une prise en compte des apports culturels extérieurs sans se renier culturellement.
En somme, en l’entame de ce sommet de Pékin, c’est une Chine qui nous parle si bien !