Opinions of Thursday, 26 November 2015

Auteur: carmer.be

Ces détentions dites provisoires à durée illimitée

Le cas de M. Achille ZOGO ANDELA, P.D.G de la Société Camerounaise de Leasing Maritime (SCLM-SA) détenu sans jugement depuis 29 mars 2011 à la prison centrale de Yaoundé Kodengui.M. Achille ZOGO ANDELA croupit dans ce mouroir carcéral depuis près de 5 (quatre) ans sans jugement et sans mandat valable, sur la base d'une accusation de DÉTOURNEMENT DE DENIERS PUBLICS ET RÉTENTION FRAUDULEUSE DE BIENS PUBLICS; ceci à la suite du non-paiement de 03 (trois) échéances des loyers d’un crédit-bail accordé à une société de son groupe d’entreprises commerciales et industrielles, la SCLM-SA (Société Anonyme Camerounaise de Leasing Maritime), pour laquelle l’État du Cameroun avait apporté sa GARANTIE SOUVERAINE auprès d’une institution financière Espagnole (ICO - Instituto Comercial Oficial).

La Société SCLM-SA a conçu le type de 20 (vingt) bateaux-crevettiers à construire par les chantiers navals espagnols, a supervisé la construction de tous ces bateaux et les a mis en mer dès le mois de Septembre 1998-sans anicroches.

Dès le début de l’année 1999 jusqu’à fin 2002, la SCLM-SA ne pourra pas exploiter avec efficience lesdits bateaux suite aux nombreuses tracasseries administratives (arraisonnement sans cause, refus des licences de pêches et autres autorisations, etc.) perpétrées par les propres commis de l’Etat, le crédit-bailleur. Cette situation va entraîner d’énormes pertes d’exploitation ayant pour corollaire des tensions de trésorerie, dont des impayés du loyer de l’accord de crédit.

Le 10 octobre 2008, la Caisse Autonome d’Amortissement (CAA) dépose une plainte auprès du Directeur de la Police Judiciaire à Yaoundé, contre M. ACHILLE ZOGO ANDELA pour DETOURNEMENT DE DENIERS PUBLICS ET RETENTION SANS DROIT DE LA CHOSE D’AUTRUI; et une enquête est aussitôt ouverte contre lui.

À sa suite le 29 mars 2011, à 9h00, Monsieur Achille ZOGO ANDELA est interpellé chez lui à Douala où il réside et travaille par les éléments de la police judiciaire qui le conduise manu-militari à Yaoundé, ceci à la demande de Monsieur le Procureur de la République du Mfoundi à Yaoundé qui le met le 30 Mars 2011 à la disposition d’un juge d’Instruction dudit Tribunal. Le même jour par Ordonnance, Monsieur TOULEPI David, juge d’instruction des Céans, suite au réquisitoire introductif de Monsieur le Procureur de la République, l’inculpe de détournement de deniers publics et lui décerne un mandat de détention provisoire à la prison Centrale de Yaoundé, loin de Douala son lieu de résidence, où siège également son entreprise la SCLM-SA qui n'a aucune succursale à Yaoundé.
Le 14 septembre 2011, Monsieur Achille ZOGO ANDELA est convoqué pour être auditionné par Monsieur TOULEPI David « In limine litis », les avocats de M. ZOGO ANDELA soulèvent dans leurs conclusions : exceptions de compétence (ratione loci et ratione material), et une fin de non-recevoir tirée de la prescription et demandent la mise en liberté immédiate de leur client, Monsieur ZOGO ANDELA.

Le 10 octobre 2011, le juge d’instruction déclare ces exceptions non fondées sans toutefois se prononcer sur la demande de mise en liberté qui fondait ces exceptions.

Le 13 octobre 2011, un appel est interjeté contre la dite ordonnance au point que par l’effet dévolutif de l’appel, le juge d’instruction est dessaisi du dossier.

Le 24 juillet 2012 soit plus de neuf (09) mois après la date de l’appel de M. ZOGO ANDELA, la chambre de contrôle de l’instruction de la cour d’appel du Centre déclare l’appel du requérant irrecevable, alors que la loi n'en prévoit que 30 (trente) jours pour cela. Cf Article 275 (al 1,2) du Code de Procédure Pénale camerounais:

«1- La chambre de contrôle de l’Instruction statue dans les trente (30) jours de la réception de la requête d’appel. 2- En matière de détention provisoire, il doit être statué dans les dix (10) jours de la réception d’appel ».

Précisons que le mandat de détention provisoire d’une durée de 06 (six) mois avait été conformément à l’article 221 du Code de Procédure Pénale prorogé par deux (02) fois pour une durée totale et légale, de (18) dix huit mois. Qu’ainsi, par l’écoulement de cette durée légale de détention provisoire, cette mesure aurait dû prendre fin le 30 Septembre 2012. 

Le 05 octobre 2012, Monsieur ZOGO ANDELA va déposer une première requête en HABEAS CORPUS au secrétariat de Monsieur le Président du tribunal de Grande Instance du Mfoundi à Yaoundé.

Le 20 septembre 2012, prenant appui sur les dispositions de l’article 479 du Code de Procédure Pénale, M. ZOGO ANDELA forme un pourvoi contre ledit arrêt.

Répondant à une convocation de M. le juge d’instruction le 21 septembre 2012, le requérant assisté de ses conseils transmet au juge d’instruction pour information, les copies du procès-verbal de déclaration de pourvoi et du certificat de pourvoi. C’est alors qu’il apprendra qu’une ordonnance de renvoi aurait été prise à son encontre depuis le 12 septembre 2012, soit 5 (cinq) jours avant la notification de l’arrêt aux parties, et 10 (dix) jours avant la date d’expiration du délai de pourvoi.

Force est de constater que le juge d’instruction qui avait déjà rendu une première ordonnance le 10 octobre 2011 aurait rendu une seconde le 12 septembre 2012 avant la notification de l’arrêt du 24 Juillet 2012. C’est sur la base de cette ordonnance de règlement illégale, car entachée de nombreuses et grossières irrégularités et, en vertu de l’article 262 alinéa (2) du Code de Procédure Pénale, erronément appliqué que le requérant est à ce jour détenu arbitrairement à la Prison Centrale de Yaoundé (PCY).

Ayant constaté que sa détention provisoire a expiré depuis le 30 septembre 2012, M. ZOGO ANDELA avait à juste titre introduit une demande de mise en liberté qui fut appelée à l’audience du 18 octobre 2012, la cause fut plaidée et mise en délibérée pour ordonnance à être rendue le 25 octobre 2012. 

L’ordonnance de règlement illégale du 12 septembre 2012 sus évoquée n’a été formellement notifiée au requérant que le 20 novembre 2012;

Dès réception de la notification de l’ordonnance de règlement litigieuse, M. ZOGO ANDELA a immédiatement saisi Monsieur le Premier Président de la Cour Suprême par une requête motivée enregistrée aux fins d’annulation pure et simple de l’ordonnance de règlement illégale rendue le 12 septembre 2012 par Monsieur le juge d’instruction du Tribunal de Grande Instance du Mfoundi, pour: entrave grave au cours normal de la justice, conflit de compétence, connivence inédite entre la Cour Suprême et un juge d’instruction, contrariété de décisions, violation des droits fondamentaux du requérant notamment, violation du principe à la présomption d’innocence. 

Courant Avril 2015, M. ZOGO ANDELA a de nouveau introduit une requête en HABEAS CORPUS qui fut appelée à l’audience du 12 Mai 2015, la cause a été plaidée et la mise en délibérée est toujours en cours. 

De tout ce qui précède, M. ZOGO ANDELA a entamé depuis le 31 Mars 2015 sa 5ème (cinquième) année de détention provisoire en qualité d’inculpé, sans avoir jamais été entendu par un juge d’instruction, sans un commencement de jugement comme prévenu, sans mandat de détention valable, ceci malgré l’allongement et le dépassement excessifs et illégaux de tous les délais de procédure prévus par les textes en vigueur, notamment ceux relatifs: à l’information judiciaire, à la détention provisoire, au jugement, aux voies de recours.

En réalité la situation juridique de M. ZOGO ANDELA confine désormais - comme tant d'autres encore dans le cadre de l'Opération dite Épervier au Cameroun - à une véritable impasse judiciaire dans laquelle sont coincés ses principaux accusateurs au mépris du droit. Ils en sont visiblement réduits à espérer que le silence combiné aux conditions inhumaines d'incarcération viennent à bout de la détermination d'un prévenu qui clame son innocence depuis le début, et veut enfin être jugé sur une affaire au parfum de scandale d'État où il aura fait office d'accusé idéal.(http://www.nyangaa.com/index.php/news-67/3422-operation-epervier-un-homme-daffaires-a-kondengui).

Vivement que le Droit soit dit, et rien que le Droit.