Opinions of Sunday, 26 July 2015

Auteur: Pauline Poinsier-Manyinga

Choisir entre Boko Haram et les accidents de la route

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Les accidents de la circulation au Cameroun font de plus en plus parler d’eux, tant il y en a en veux-tu, en voilà ! C’est à se demander quoi desdits accidents, de la pauvreté, du paludisme, du Sida et autres Avc., nous tuent le plus.

L’état de la route en est souvent première cause, en plus de l’irresponsabilité ou de l’insouciance de la plupart des usagers, ce qui dénote un manque réel de civisme. Même en Occident, ce manque de civisme est réel.

Mais la limitation de vitesse, les radars, le retrait des points sur le permis de conduire et autres précautions d’usage sont là pour réduire la menace, sans parler de fortes amendes en cas de forfait. Les chauffards son même fichés à vie, et certains vont en prison, après s’être acquittés de sommes pharaoniques à verser aux familles de victimes.

Au Cameroun par contre, c’est loin d’être un jour le cas ! D’abord, certains dénoncent le laxisme des policiers ou la corruption complice. Par ailleurs, on ne sait pas à quoi servent les pseudo-radars qui sont censés border nos routes nationales, notamment sur les axes dits lourds. Pire : on ne sait même pas si ces derniers fonctionnent encore ! Pourtant, la prévention routière coûte un max de milliards de F.Cfa chaque année au contribuable camerounais.

Pour ce qui est du permis de conduire, le Cameroun vient de passer de plus de 800 autoécoles déclarées non-conformes, à, à peine, 300 auto-écoles officiellement reconnues aptes à exercer désormais dans l’ensemble du territoire national !

Cette décision date d’il y a quelques semaines tout au plus, mais elle est très vivement contestée par certains syndicats d’auto-écoles, qui y voient une certaine discrimination et crient déjà au favoritisme et au scandale ! Quand on sait comment et à quel prix se monnaie un permis de conduire au Cameroun, le bien-fondé du doute peut, en effet, paraître crédible…

En cette seule année 2015, les accidents de la route causés par des chauffards, le mauvais état des routes, ou tout simplement par le mauvais état des automobiles autorisées de manière complaisante dans la circulation ont déjà fait des milliers de morts au Cameroun! Plus de morts que la secte islamiste Boko Haram, selon l’avis de plusieurs de nos compatriotes. Cependant, on dirait que malgré cette alerte statistique de présomption littérale, le problème précis dont il est question ici ne semble pas trop préoccuper le gouvernement.

C’est, du moins, ce qu’un certain laxisme pourrait laisser croire, malgré les soubresauts constatés depuis un certain temps du côté du ministère des Transports pour limiter le nombre d’auto-écoles douteuses, aux fins de durcir l’obtention du permis de conduire qui, comme la carte nationale d’identité, s’obtient comme par une passoire dans le périmètre national. Malgré tout, pas de forte mobilisation.

Est-ce parce la sécurité routière ne permet pas de se pavaner à la télévision comme dans la lutte contre Boko Haram où chacun vient se faire voir pour comme on dit au quartier, mieux « se sentir » ? Françoise Foning en janvier 2015 sur l’axe Yaoundé-Bafoussam, ou dernièrement, l’épouse du souspréfet de Pouma le 10 juillet 2015 dernier sur la route de Nkongsamba… Et bien d’autres, plus anonymes.

Des accidents comme ceux-là, il y en a tous les jours au Cameroun à tous les coins de la rue. A ce rythme-là, difficile de prédire qui sera encore en vie demain, ou dans 02 semaines, ou dans 03 mois. De l’autre part, Boko Haram est plus que jamais nocif, comme le démontre cet attentat survenu hier en plein coeur de Maroua. Avenir incertain donc.

Et dire que malgré tout, certains osent nous faire miroiter l’émergence à l’orée de 2035 ! Peut-être parce qu’ils pensent pouvoir éradiquer Boko Haram. Ou parce qu’ils espèrent secrètement que d’ici là, les accidents en auraient déjà fini avec nous…