Opinions of Friday, 6 November 2015

Auteur: Frégist Bertrand Tchouta

Comment CIMENCAM a réussi à faire bouger les prix

Sans déployer une importante stratégie, en lançant une simple campagne promotionnelle des prix. Depuis quelques jours, le prix du CPJ 35 (utilisé en ce moment pour des ouvrages d’art tels que le nouveau pont sur le Wouri) est passé de 4 600 Fcfa à 4 350 à Douala, soit une baisse d’environ 250 Fcfa.

Actuellement, selon les précisions faites par Pierre Damnon, le Directeur général de Cimencam, à Yaoundé, le sac de ciment doit coûter 4 700 en lieu et place de 4 960 Fcfa ; à Bafoussam, il doit se laisser à 4 750 au lieu de 5 450 Fcfa. On n’aura donc pas vraiment attendu le délai de 10 jours accordé par le Mincommerce, Luc Magloire Mbarga Atangana, pour voir les premiers signes d’une revue à la baisse du prix du Ciment.

Pour comprendre comment on en est arrivé là, il faudrait remonter au 20 octobre dernier. Au cours d’une réunion tenue à Yaoundé avec les acteurs de la filière construction, Le Mincommerce demande des précisions sur les raisons du maintien des prix «élevés» du Ciment.

Le silence qui s’en suit ne fait aucun doute : les cimentiers ne souhaitent pas en parler, ou ne veulent pas en parler devant la presse. Le ministre, visiblement au courant de l’embarras que suscite sa question auprès de ses partenaires leur demande de lui faire parvenir des propositions, et donne 10 jours à ses services spécialisés pour lui faire des propositions allant dans le sens d’une révision à la baisse du prix du ciment.

25 sacs gratuits pour 30 tonnes achetées

De retour au quartier général, Cimencam prépare sa réaction. L’entreprise capitalisée à 43% par les fonds publics (à travers la Sni) forte d’une expérience d’une cinquantaine d’années sur le marché camerounais sait que le prix élevé du ciment est aussi imputable aux distributeurs-revendeurs, qui y répercutent souvent leurs charges. En s’attaquant à ce seul segment de la chaîne de distribution, le prix pourrait être revu à la baisse.

Cimencam met en place un plan de communication. Elle est «…très focalisée sur nos clients directs», nous apprend-on dans la maison. En fait, il ne s’agit ni plus ni moins que d’une campagne promotionnelle. A travers cette campagne en cours, Cimencam propose 25 sacs de ciment gratuits pour 30 tonnes achetées.

Une tonne étant égale à 20 sacs, chaque grossiste ayant acheté 600 sacs de ciment repart avec 25 sacs de ciments gratuits. En outre, à l’image de la stratégie adoptée par certaines industries brassicoles, Cimencam indique le prix conseillé sur le point de vente. Il s’agit d’«une évolution intéressante dans un contexte de libre concurrence», aurait déclaré Pierre Damnon au Mincommerce.

La stratégie est simple, mais efficace. Elle intéresse rapidement les grossistes qui achètent souvent entre 50 et 100 000 tonnes de ciment par an, voire plus. A travers les importantes ristournes, les détaillants ne répercutent pas les charges sur les prix, le prix indiqué par l’industriel reste inchangé une fois arrivé dans les quincailleries. La filiale du groupe LafargeHolcim (45% des parts) peut se le permettre.

Malgré la multiplicité d’industrie de cimenteries installées sur le territoire camerounais (Cimencam, Dangote, Cimaf, Cemec), Cimencam est la seule usine qui tire toutes sa matière première du sol camerounais. Les autres doivent importer, notamment le Klinker, une matière première essentielle dans la fabrication du ciment.