7 ans se sont écoulés après les dernières élections présidentielles, et les Camerounais retourneront aux urnes en octobre prochain pour élire leur président, nouveau ou ancien. Les traditionnels partis d’opposition préparent leurs futurs candidats, et des nouveaux venus suscitent interrogation et perplexité. Du chroniqueur Cabral Libii à l’humoriste Dieudonné Mballa Mballa de nouvelles figures émergent pour la course à Etoudi. Mais au-delà de tout cela que faut-il réellement attendre de ces élections ?
Les élections présidentielles au pays des lions indomptables soulèvent toujours beaucoup de questions. Entre campagnes éclairs et tenue du scrutin à la va-vite, les Camerounais se sentent souvent objets plutôt que sujets au cours de cet événement à présent septennal. Il faut dire que l’histoire électorale du Cameroun est bien particulière. Au lendemain des indépendances, le pays connait un parti unique présentant tous les cinq ans son seul candidat incontestable (sous peine d’emprisonnement pur et simple). Il faudra attendre le début des années 90 pour voir émerger les premiers partis d’opposition.
Ces partis se sont fédérés autour d’une coordination de l’opposition au début des années 90 pour contraindre le président Paul Biya à organiser une conférence nationale sur l’organisation de la vie politique comme ce fut le cas au Benin. Cette unité de l’opposition n’a pas duré longtemps et ne s’est malheureusement jamais renouvelée, car la fameuse Tripartite organisée en lieu et place de la concertation nationale a eu raison de cette unité inédite de l’opposition. Depuis lors elle est hétérogène, noyée dans la masse de sa propre multitude (plus de 253 partis en 2011). Il n’est donc pas malvenu de se poser la question de savoir quelle opposition face au tout puissant parti au pouvoir ?
Le parti au pouvoir dispose de moyens considérables comme en témoignent les campagnes brèves mais efficaces organisées pour l’occasion. Dans un pays où le parti se confond à l’État, les moyens du parti renvoient naturellement aux moyens de l’État. Et n’y pourront rien les subsides distribués (de manière arbitraire) aux partis d’opposition par cet État en vue des élections.
Par ailleurs, le système électoral dans sa particularité interpelle le sens commun. 22 ans après sa création, les membres de la Cour constitutionnelle ont enfin été nommés ce 07 février 2018 par décret présidentiel. La forte représentativité de membres du parti au pouvoir dans ce Conseil ne fait pas plus écho que celle des membres d’Elecam (Élections Cameroun) en 2008, membres pourtant supposés être nommés pour leur partialité et leur neutralité d’après les textes. Lorsqu’on sait que le Conseil constitutionnel a la charge de rendre public les tendances enregistrées à l’issue du scrutin, on se pose des questions sur l’objectivité de ces résultats. À ceci vient s’ajouter le fait qu’après dépouillement des urnes dans les différents bureaux de votes, seul le procès-verbal d’Elecam (l’organe indépendant en charge des élections au Cameroun) fait foi de manière exclusive.
La neutralité s’avère compromise dans ces conditions, et les différentes irrégularités enregistrées et dénoncées par les observateurs étrangers lors des précédentes élections laissent voir une transparence relative.
Il semble donc de manière très réaliste impossible de gagner des élections face à la machine de guerre que représente le parti au pouvoir. L’impossibilité est renforcée lorsqu’on est 36 candidats impuissants contre 1 tout puissant. Ce candidat tout puissant passe des lois, les applique en temps voulu et organise la vie politique entière de la nation. Bien que la nécessité d’une coalition soit de plus en plus évidente, sa réalisation se révèle de moins en moins possible. L’opération 11 millions d’électeurs du candidat Cabral Libii aura tout de même eu le mérite de nous faire exercer notre devoir civique !