Opinions of Tuesday, 25 September 2018

Auteur: Njiki Fandono

Election 2018: l'opposition prépare la victoire de Paul Biya

Paul Biya  assiste au bal des alliances de faible impact électoral auquel se livrent ses adversaires Paul Biya assiste au bal des alliances de faible impact électoral auquel se livrent ses adversaires

Le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), parti au pouvoir, doit-il s'inquiéter de voir son champion ne pas rempiler à la Magistrature suprême au soir du 7 octobre prochain ? Absolument pas. Du moins, en l'état actuel des choses. Sauf miracle, l'opposition, prise individuellement, est certaine d'essuyer un échec cuisant à ce grand rendez-vous, mais y va quandmême en rangs dispersés. Les négociations en vue d'une candidature consensuelle - à défaut d'une candidature unique - entre les 8 challengers de Paul Biya, ont buté sur l'égoïsme et l'individualisme primaire des uns et des autres. Aucune tentative de médiation allant dans le sens d’un quelconque consensus entre les huit adversaires de l’homme fort de Yaoundé n’a prospéré.

Sollicités au mois d’août dernier pour mener les négociations en vue d’une candidature consensuelle de l’opposition, Jean Jacques Ekindi et Pierre Kwemo ont gentiment laissé le vent de cette sollicitation passer. La preuve est que le premier, coordonateur national du Mouvement progressiste (MP), a déclaré devant les médias le 20 septembre dernier, n’avoir jamais eu Pierre Kwemo au téléphone, ni le rencontrer. Qui a évité l’autre ? Difficile à savoir. L’on sait par contre que le «chasseur du lion» a décidé d’abandonner la chasse : Jean Jacques Ekindi soutient Paul Biya, «après toutes cho ses vues, mesurées, pensées et soupesées». Ancien haut cadre du RDPC, le chasseur du lion de Mvomeka’a revient tout simplement à la maison. Un soutien supplémentaire pour Paul Biya, qui compte déjà parmi ses alliés, le G20, le G35 et des associations de mototaxis.

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Cavaliers solitaires

Côté opposition entretemps, un ralliement de grande envergure peine à se dessiner. Chacun de son côté est convaincu d'être l'homme providentiel et la meilleure alternative sur laquelle devraient impérativement se greffer les autres candidatures. Seuls quelques «naïfs» a priori bien intentionnés y croient encore, sans toutefois trouver jusqu’ici la formule magique devant mettre autour d'une stratégie de conquête globalisée et plus efficace les concurrents de Paul Biya à la Magistrature suprême. Or en réalité, ni Joshua Osih, Maurice Kamto, Akere Muna, ni Cabral Libii et le reste, aucun desdits candidats ne saurait individuellement venir à bout de Paul Biya dans les urnes de cette présidentielle.

Faut-il le souligner, le locataire d’Etoudi dispose d'un appareil politique (le RDPC) ultra dominant et territorialement bien implanté dans la quasi-totalité des coins du pays. Le RDPC est très majoritaire, aussi bien à l’Assemblée nationale, au Sénat, que dans les conseils municipaux du triangle national. Il faut y ajouter les moyens logis tiques et matériels de l’Etat mis gracieusement à la disposition des lieutenants du parti au flambeau ardent lors des campagnes électorales, induisant parfois une confusion déconcertante entre le RDPC et l’Etat.

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Au vu de ce qui précède, il va sans dire que le rapport de force politique et matériel est largement en défaveur d'une opposition éparse et structurellement approximative. Les opposants en sont pleinement conscients, mais tentent désespérément de venter quelques soutiens et alliances de faible impact électoral, qui ne représentent pas grand chose sur l'échiquier politique national.

A quoi sert-il par exemple à Akere Muna de se réjouir du soutien d'une faction dissidente du Manidem, une formation minée par des querelles intestines et inapte à une véritable mobilisation populaire ? Ou encore, de quel poids électoral le parti impopulaire de Paul Eric Kingue peut-il se targuer, pour que le MRC de Kamto –certes rejoint par le brillant économiste Christian Penda Ekoka et six autres formations politiques territorialement sous-implantées- se réjouisse ? A dix jours du scrutin, les doutes se dissipent. Si la candidature unique relève désormais d'un mythe, la candidature consensuelle, quant à elle, est un gros serpent de mer, qui nage loin, mais alors, très loin des rives.

L’impossible consensus

Tout compte fait, on est à des années lumiè res de 1992, où l’«Union pour le changement» - une importante plateforme de partis politiques et de la société civile - avait porté et soutenu la candidature de Ni John Fru Ndi du Social Democratic Front (SDF). Ce soutien politiquement consistant et représentatif avait suscité l'onction, l'engouement et l'adhésion populaire. Toute chose ayant alors permis au candidat du SDF de perdre officiellement contre Paul Biya, au-delà des clivages et des considérations subjectives et théâtrales du genre : «c'est la rivière qui se jette dans le fleuve....c'est au taxi de s'accrocher au Camion etc.». Une conjugaison d’efforts et des moyens aurait produit une issue moins certaine que celle qui se profile à l'horizon. Hélas !

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Le règne de l'aventurisme politique, adossé sur des petits calculs personnels déconnectés des réalités en total déphasage avec les aspirations d'une frange importante de la population, a pris le dessus. Chacun veut être le Super Man dans une rhétorique devenue récurrente : «nous restons ouverts à tous ceux qui veulent se joindre à nous». Qui va donc se joindre à qui ? C'est dire qu'Elimbi Lobe et Hilaire Nzipan - s’ils ne sont pas encore épuisés et découragés - ont encore du chemin à parcourir pour trouver ce fameux candidat consensuel parmi les huit opposants, malgré la pertinence des démonstrations techniques et chiffrées de ces deux leaders d’opinion.