En dépit d’une offre en énergie légèrement meilleure, les populations font toujours face à des interruptions intempestives. Explications.
Ce Jeudi matin, Jean Guiffo peste encore contre Eneo. Ce coiffeur installé à la gare routière du quartier Mimboman n’est pas alimenté en énergie électrique. « C’est décidément une fatalité ici à Mimboman, hurle-t-il, on a jamais le courant et je perds des clients ». Le désarroi de Jean Guiffo est partagé par plusieurs commerçants du coin.
Plus lucide, l’un d’eux tient tout de même à relativiser. « Nous sommes régulièrement délestés mais reconnaissons quand même que c’était pire l’année dernière », tempère Justin Tsafack qui tient une boutique de vente de téléphones portables. Le propos de Justin n’est pas une simple vue de l’esprit. Il corrobore des données disponibles chez Eneo, la compagnie en charge de la distribution de l?énergie électrique au Cameroun. Cette entreprise affirme même qu’elle ne procède en ce moment à aucun délestage sur le réseau interconnecté Sud, (RIS) qui regroupe 3 grandes régions : le Centre (Région Centre et Sud), le Littoral et l'Ouest (Région Ouest, Sud-Ouest et Nord-Ouest).
« En ce moment dans le réseau interconnecté Sud, RIS, Eneo ne procède pas au rationnement de l’énergie. Parce qu’il n’y a pas de problème de production d’énergie. Les quantités productibles sont supérieures à la demande. Le rapport offre/demande est même excédentaire. Une réserve de disponibilité de plus de 60 MW est même enregistrée », indique le service de presse d’Eneo. En effet, malgré une hausse de la demande de l’ordre de 7 à 8% (un besoin supplémentaire de capacité de 75 à 100 MW par an) l’équilibre offre/demande est réalisée depuis le début de l’année grâce à quelques facteurs combinés : La mise en eau partielle du barrage de Lom Pangar a permis aux centrales de Songloulou et Edéa de produire 2 fois plus que l’année dernière à la même période.
Les travaux réalisés par Eneo ont permis un gain de 13 MW supplémentaires à la Centrale de Limbé, et 12 MW à la centrale d’Oyomabang. Il y a aussi ce que l’on nomme chez Eneo « l‘effacement d’Alucam ». En sous régime depuis le départ de son partenaire Rio Tinto, l’entreprise a accepté de ne pas consommer 60MW sur les 190 qu’elle attend d’Eneo contractuellement.
Ce qui a dit-on chez Eneo, a « contribué davantage à rendre souple le système et à garantir des réserves de productible ». Si donc la société que dirige Joël Nana Kontchou a pu accumuler des réserves sur le réseau interconnecté Sud pourquoi observe-t-on toujours dans ce même segment ces coupures d’électricité qui plombent l’économie et causent des désagréments chez les citoyens ?
Incidents, pannes et vandalisme
A ce propos, Eneo tient d’abord à préciser que ces fameux « délestages » ont considérablement baissé. « Au cours des 18 derniers mois, Eneo a réalisé des investissements de l’ordre de 54 milliards de francs CFA pour améliorer la qualité du service électrique faisant passer la durée moyenne des coupures de 105 à 94 heures entre 2014 et 2015.
Le Temps moyen des interruptions vécues par le client au terme du premier trimestre 2016 était de 77 heures », fait valoir l’entreprise. S’il n y a donc plus autant de délestages, d’autres facteurs viennent perturber la distribution continue de l?énergie électrique. Plutôt que des délestages, il s’agit d’interruptions ponctuelles de fourniture d’énergie qui sont surtout le fait d’incidents ou de travaux programmés sur les réseaux de transport et de distribution.
Les sources d’incidents sont notamment les intempéries, le vandalisme, la surcharge des équipements. Qu’il s’agisse de réseaux de transport ou de distribution, il faut signaler que les ouvrages sont dépassés du fait de l’évolution de la demande qui induit un besoin de transit très important. A titre d’exemple, 35% de transformateurs de puissance dans les postes sont surchargés ou en état de criticité parmi lesquels : Bekoko, Oyomabang, Ngousso, Mbalmayo, Maroua, Bafoussam, Njombé.