Opinions of Thursday, 16 July 2015

Auteur: Michel Tafou

Enquête: des milliards virtuellement évaporés chez Belinga Eboutou

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La Météo a mené ses investigations au cœur de la tentative de mise à mort politique et physique du ministre, directeur du cabinet civil (Dcc) de la présidence de la République.

Le «scoop» est instillé depuis quelques jours dans les journaux à sensation et autres Fm de la capitale, avant de se répandre dans les réseaux sociaux. Le ministre Dcc, Martin Belinga Eboutou, est – l’affirmation est de mise – au cœur d’une affaire de «gangstérisme» et de «filouterie d’Etat». On parle d’un milliard de francs ainsi que des lingots d’or, d’une valeur avoisinant les 200 millions d’autres francs et qui appartiennent à son épouse, emportés chez lui. Du lourd. Du clinquant. Du sensas.

Mais, comme dans toute fable, l’affaire semble davantage relever du fantasme que d’un coup de pied dans la fourmilière. Le récit, en lui-même, ressemble déjà à ces règlements de comptes dont se nourrissent aujourd’hui des bonimenteurs. Et les premiers regards de se tourner vers ceux à qui profiterait le crime : des adversaires, pour ne pas parler d’ennemis tapis dans l’ombre et qui usent de tous les subterfuges, intrigues et coups bas pour abattre ceux qui leur feraient de l’ombre.

Revenons à M. Belinga Eboutou. Ceux qui «révèlent» l’extraordinaire fable d’une «filouterie d’Etat» le concernant lui prêtent une fortune monumentale. Des milliards de Cfa, qu’il aurait planqué dans ses résidences de Yaoundé et dans la région de Zoétélé (Sud). Aucun crime n’étant parfait, on le dit également propriétaire de «deux banques privées dont la plus importante serait logée dans son village natal». Une banque, cela signifie un nom, une raison sociale, un agrément de la Commission bancaire de l’Afrique centrale (Cobac).

Le plus simple serait d’indiquer clairement l’identité des établissements, qui quoi que «privés» ne sauraient fonctionner en marge de la règlementation et dont l’une disposerait par ailleurs d’«une agence de relai (…) basée à l’intérieur [du] domicile» du Dcc, sis au quartier Ahala II, au lieu dit Barrière.

Depuis le début de la semaine, des reporters de La Météo, rendus sur le terrain, n’ont pas pu localiser le fameux établissement qu’on dit «permanemment gardé par quatre gendarmes lourdement armés». Les services compétents du secrétariat d’Etat à la Défense en charge de la gendarmerie, qui auraient donc détaché lesdits pandores, se sont montrés tantôt amusés, tantôt courroucés par cette histoire qui sort de toute logique administrative ou sécuritaire.

Rendus à la brigade de gendarmerie d’Odza (ndlr, Yaoundé) où méditerait «le seul infortuné de la bande», aucune trace d’un suspect retenu dans le cadre de cette «affaire». De même au village natal du ministre Dcc à Nkilzok où nos journalistes n’ont pas davantage réussi à retrouver la fameuse banque dont Martin Belinga Eboutou serait le promoteur.

Il n’empêche que les «révélations» des manipulateurs de l’ombre insistent, citant par exemple un certain «Petit Wadjack’s», que des proches du Dcc jurent ne connaître ni d’Adam ni d’Eve. C’est ce «privilégié», «un fidèle de toujours» qui «tenait compagnie au directeur de la petite banque privée», qui avec «trois despérados» aurait fait main basse sur l’insolente fortune qui tantôt était planquée dans des «coffres-forts», tantôt se trouvait dans «deux chambres blindées de cinq mètres sur quatre dont l’une au village et l’autre dans |la] célèbre résidence de Yaoundé».

Si d’après ces racontars, les opérations de transferts de fonds se déroulaient chaque fin de semaine des mains de maître par l’ordinaire des lieux, comment un si important pactole a pu progressivement être picoré, sans attirer un temps soit peu l’attention du patron des lieux ? Mystère.

Qu’on l’aime ou pas, la série sur Martin Belinga Eboutou finit par interloquer ceux qui suivent les petites affaires du sérail. Et finalement à interpeller sur l’avenir d’un système gangrené par la combine et les batailles de bas étage. Une pratique qui tend à broyer toute personnalité de premier plan qui s’écarte de la bien-pensance et autres réseaux occultes.

Fables

Vers fin 2013, une grosse rumeur, toujours relayée par des réseaux malveillants, le donnait pour mort. On a alors appris que certains avaient organisé force réjouissances pour la circonstance. Plus tard, on l’a dit plus que malade – comme tout humain –, mais carrément grabataire, ayant perdu l’usage de sa motricité et même de ses moyens psychiques. Une autre fois encore, c’est un cadavre, qui n’a jamais été présenté au public ni même identifié, qui a été découvert en sa résidence. Ici et là, les fins manipulateurs voient leurs petits plans se dégonfler comme des ballons de baudruche.

D’une semaine à l’autre, le Dcc est limogé par voie de médias, ou dans une moindre mesure recasé disciplinaire à la tête d’un département ministériel de «seconde zone». Et, pour mieux charger la mule, Martin Belinga Eboutou est présenté comme le faiseur de rois, celui-là qui a constitué l’équipe gouvernementale de décembre 2009.

Celui qui fait nommer ou dégommer à de hautes fonctions en lieu et place du président Biya en personne, qui ne serait plus alors que son fondé de pouvoirs. Dans un cas comme dans les autres, la ficelle est tellement grosse que beaucoup, et peut-être le premier concerné aussi, ont pris le parti d’en rire tant la chose manque de consistance et pue la tentative de lynchage.