La nouvelle voie qui ouvre la capitale des affaires dans sa partie orientale a déjà largement dessiné ses contours et office déjà une partie de ses avantages.
Nelson Mandela aurait peut-être été fier de cette métamorphose, de ces blocs de béton hauts comme une maison à deux étages qui ouvrent un nouvel horizon. Comme l’histoire du héros sud-africain, l’échangeur va jeter un pont entre des trafics en conflit et réconciliera, du moins l’espère le maître d’ouvrage qu’est le département des travaux publics, les automobilistes avec l’entrée orientale de Douala, cauchemardesque à une époque récente.
Qui ne se souvient, comme Patrick Nke, ancien habitant des abords de cette zone d’habitation très populaire, des interminables minutes et même heures que passaient les usagers de cette route avant le lancement des travaux il y a une vingtaine de mois ?
En donnant la possibilité de partir du boulevard nouveau pour les voies de Ndokoti, l’une des principales intersections de la ville, que de détours et d’encombrements ne va-t-il pas permettre d’éviter ?
En attendant que ce nouvel échangeur achève de se boucler sur lui-même, dans chacune des quatre sections prévues le long des 19,2 kilomètres de la « pénétrante Est » comme le nomme le jargon du petit monde qui gravite autour du chantier, l’ouvrage a avancé.
Et Douala la frénétique, même en cette mi-août où le crachin quasi permanent fait baisser la température et le rythme des affaires, peut en témoigner par les assauts répétés aux règles de la sécurité que ses fameux habitants, régulièrement à la lisière de la fronde, font le long du trajet.
Tout juste dévalé le versant de l’échangeur voisin de l’aéroport, un « bend-skin » a quitté gaillardement la voie et retourné ses deux roues vers la droite. Une traversée prohibée. Un de ses congénères venait en face, à une allure mal contrôlée. Le choc évitable s’est quand même produit dans un grand fracas de ferraille.
La pénétrante Est compte ainsi ses premières victimes. La faute à sa disponibilité... A partir du carrefour des Fleurs de Bonapriso, le bitume uniformément réformé permet aux automobilistes de tester les capacités de leurs machines. Ce devra être ainsi sur cet édifice plat, jusqu’à la limite entre le Wouri et la Sanaga-Maritime, au pont sur la Dibamba, en passant par Ndogpassi. Sur le dernier morceau, il est également prévu d’améliorer l’existant comme au départ.
Parkings sauvages
Au contraire, plus qu’une remise en forme, la deuxième section aura laissé Bonapriso à l’arrière pour courir dix kilomètres jusqu’au lieu-dit Borne 10. On y a reconstruit carrément une autre chaussée en l’élargissant en même temps, compte tenu de la grande circulation dans cette zone. C’est le membre le plus long. C’est aussi le lieu des plus gros travaux.
La circulation humaine et automobile, les commerces et habitations alentour ne nous facilitent pas la tâche, regrette un des employés de la compagnie chargée des travaux. Faire la police de la route, avec ces signalisations spécifiques interdisant les parkings sauvages sous peine d’enlèvement, n’empêche pas la naissance de bouchons aux heures-pics du départ et du retour au travail, au marché…
Les chocs arrivent alors presque naturellement. Un conducteur de camion qui dessert le chantier a vu son marchepied arraché par le chauffard d’une … berline. « Je vais bientôt à la retraite ; c’est la première fois de ma carrière que je vois ça. Il était tellement sûr de se faufiler que je n’ai rien vu. A Yaoundé, jamais je n’ai dû devoir me serrer autant pour éviter la pression des voitures », se lamente le chauffeur, revenu au siège de Razel pour le « premier constat de sa vie ».
Encore heureux que les élèves soient en vacances en ce moment, offrant pour quelques jours encore un peu de répit aux bâtisseurs qui achèvent ici un trottoir instantanément occupé par une menuiserie à la sauvette, là un terre-plein.
Quand ils reviendront, ceux qui ont quitté Village, Mboko, Ndogpassi, Non-Glacé pour aller en villégiature le temps de la grande pause scolaire découvriront les progrès d’une route qui peine encore nombre d’usagers.
Le relief lunaire de certains segments, gondolés de long en large, fait tressauter les voitures qui passent, même les mieux suspendues. Qui s’en soucie vraiment tant le changement qui arrive dans quelques mois est déjà perceptible. « Sans qu’on l’ait achevé, on circule déjà mieux », confesse Patrick Nke.