Opinions of Friday, 27 November 2015

Auteur: carmer.be

Escroquerie minière: Qui a écrit ce discours mensonger de Biya ?

Lorsque le président de la République s’avance vers le pupitre en cette fin d’année 2009 pour prononcer son discours traditionnel, il ne se doute pas qu’il va se faire complice involontaire d’une véritable arnaque au niveau international

2011 : les élections présidentielles se précisent. Elles s’annoncent difficiles pour le chef de l’Etat sortant Paul Biya, qui a manipulé une fois de plus la constitution afin de briguer un nouveau mandat. Des promesses de lancement de grands chantiers fussent de toute part, entraînant dans leur sillage tout ce que la terre compte comme voyous, ayant pour complices, de nombreux compatriotes.

Un discours « codé » comme au sein de la mafia italienne

Paul Biya va alors lancer, au cours de cette allocution, un véritable message codé à tous les participants d’une arnaque démarrée depuis le milieu des années 90, que nous dénonçons depuis quelque temps. 

Cet extrait, apparemment anodin, est lourd de conséquence : « En ce qui concerne le secteur minier, nous allons entamer en 2010 les travaux de construction de la mine de cobalt, nickel, manganèse de Nkamouna, les activités d’exploitation du diamant de Mobilong et la réhabilitation du site de l’ex-Cellucam pour le démarrage des activités du technopole Edéa-tech. Nous allons accélérer le processus devant aboutir à l’exploitation de la bauxite de Minim-Martap-Ngaoundal et du fer de Mballam. Quant à l’or de Bétaré-Oya, son ex-ploitation industrielle a dé-marré en 2009 » (dixit PaulBiya).

Les Camerounais qui entendent cette partie du discours ne se rendent pas compte qu’elle ne leur est pas destinée. Dans nos dernières éditions, nous avons essayé, autant que cela puisse être possible, de décrire l’incroyable escroquerie autour du projet de construction de la mine de cobalt, nickel, manganèse de Nkamouna (projet Geovic). Nous avons décrit comment de voyous internationaux, aidés par des compatriotes, ont fait perdre des sommes folles à notre pays.

De manière générale, tous les projets miniers dont se « vante » le chef de l’Etat dans l’extrait du discours précité, sont du même ordre. Nous reviendrons longuement et en détail sur les activités d’exploitation du diamant de Mobilong sur l’exploitation de la bauxite de Minim-Martap-Ngaoundal et du fer de  Mballam dans nos prochaines éditions.

Mais ce qu’il faut savoir aujourd’hui, comme nous l’avons déjà exprimé pour ceux qui suivent ce véritable feuilleton, c’est que tous ces projets ne visaient qu’à se livrer à de véritables arnaques boursières dont « l’épicentre » se situait à la bourse de valeurs à Toronto.

Lorsque Paul Biya prononce l’extrait précité, les escrocs jubilent, les Camerounais aussi. Mais pas exactement pour les mêmes raisons. Les escrocs viennent, avec le soutien de leurs complices, de faire dire à Paul Biya exactement ce qu’il faut pour susciter un vif intérêt de la part des investisseurs internationaux. 

Le discours du président de la République faisant foi, qui vient compléter de nombreuses fausses informations savamment distillées, font que l’action « Geovic » prenne de la valeur et permette de « ramasser rapidement » d’énormes bénéfices.

Cette action boursière atteint vite des sommets pour retomber cette semaine à environ 5 Fcfa : quelle sacrée différence au vu du nombre de milliers d’actions en cause !

Des conséquences terribles pour notre pays

Le tableau résumant 5 années d’évolution de l’action Geovic, publié ci-contre, se passe de tout commentaire pour les initiés. On voit bien qu’au lendemain de ce discours du chef de l’Etat, qui est un premier signal voulu par les escrocs, l’action Geovic monte fortement comme l’indique la courbe.

Pendant l’année 2010, les investisseurs qui ne voient rien venir, contrairement à la promesse présidentielle, commencent à s’inquiéter : l’action subit un léger recul. Les autorités camerounaises se montrent néanmoins rassurantes comme en témoigne l’interview accordée par le ministre des Mines de l’époque Badel Ndanga Ndinga, à notre consœur Josiane Tchakounté du quotidien « Cameroon Tribune », le 31 août 2010 (voir nos dernières éditions). L’action remonte au point d’atteindre un pic en fin d’année 2010.

Les investisseurs, qui sont des gens méfiants par nature, se rendent compte en cette fin d’année 2010 que les promesses du président de la République ne seront pas tenues. Pire, que ce dernier n’y fait plus aucune allusion dans son discours à la nation. Ils n’aiment pas ça ; l’action baisse très fortement. 

Lorsque le 19 avril 2011, le ministre Badel Ndanga Ndinga, la Sni et les « escrocs » américains se réunissent à l’hôtel Hilton pour enfin annoncer en grande pompe, la mise en forme de « l’étude de faisabilité » du projet « cobalt-nickel-manganèse », les Camerounais qui sont dans la salle, les initiés mis à part, ne sont que les dindons de la farce. Les initiateurs de cette escroquerie veulent, à cette occasion, tout simplement rassurer le marché qui s’impatiente, alors qu’ils savent depuis longtemps que le projet ne se fera pas, en tout cas pas avec eux aux commandes.

Le tableau que nous publions ici pour illustrer nos propos est tellement « bavard » que nous avons presque « honte » de le commenter : de toutes les façons, l’arnaque commence à se montrer un peu trop
grosse. L’action va plomber avec la rapidité d’une navette spatiale américaine incontrôlable s’avançant dangereusement vers l’atmosphère. Le fonds est atteint avec une cotation d’environ 05 Fcfa ; c’est-à-
dire que cette action ne vaut plus rien. 

Indépendamment de la perte d’argent signalée dans nos dernières éditions, notre pays subit une telle perte de crédibilité qu’il aura du mal à s’en relever. La parole présidentielle ne vaut décidément plus rien, tant on voit qu’elle peut être non seulement très loin de la réalité, mais aussi utilisée à de fins criminelles.

Un constat effrayant

Même le plus intrépide des supporters de Paul Biya et de son « Renouveau » doit se rendre à l’évidence : quelque chose de très grave ne va pas au sommet de l’Etat. Qui a permis l’insertion de ce paragraphe sur le lancement certain des travaux de construction de la mine de Nkamouna en 2010, alors que l’étude de faisabilité ne sera achevée qu’en… 2011 ? Comment était-il possible d’être certain de lancer ces travaux sans que ces études aient été réalisées ?

Qui a laissé écrire une telle chose alors que tous les rap- ports d’activités consultables de la Geovic indiquaient aux Usa que cette entreprise n’avait aucun savoir-faire dans le domaine minier ; qu’elle avait renvoyé indéfiniment le projet camerounais ? Tout ceci alors même que la Geovic était en train, au cours de cette même période, de diminuer drastiquement ses activités au Cameroun ?

Pourtant, dès le 25 octobre 2005, la présidence de la République, où trônait le sémillant Atangana Mebara au poste de secrétaire général, avait été informée par deux actionnaires (Anicet Guessou et Ndiforchu Juliana Achu) historiques de la Geocam (filiale de Geovic) des malversations commises par les actionnaires américains, notamment en termes de falsifications de pièces comptables laissant apparaître de fausses dépenses de l’ordre de 10 milliards de Fcfa ; personne n’avait alors déclenché l’alerte autour du Chef de l’Etat.

Que font tous ces agrégés en économie qui se pavanent à la présidence de la République ? En toute hypothèse, le constat est inquiétant. Un lobby peut ainsi arriver jusqu’au chef de l’Etat et surtout le manipuler à sa guise, au point qu’il apparaisse plus tard aux yeux de tous, comme un vulgaire pantin.

Un autre constat terrible est à faire et est tellement effrayant que nous avons du mal à l’envisager : c’est celle d’un chef d’Etat au cœur du complot, lisant un discours en toute connaissance de cause, juste pour manipuler les cours de la bourse canadienne. Même le pire des opposants politiques aura du mal à franchir un tel pas.

Quoi qu’il en soit, tant que Paul Biya ne créera pas une enquête indépendante autour de cette scabreuse affaire, on tournera en rond et certaines mauvaises langues ne manqueront de le suspecter lourdement. 
Affaire à suivre.