C’est un truisme de dire que chaque peuple avait sa propre trajectoire, sa culture, ses pesanteurs, ses traditions de lutte. De même, une chose demeure certaine : tous les peuples du monde aspirent au développement, à la liberté, à la dignité, à la justice, au progrès social et à la paix.
La misère, l’injustice sociale, l’absence de liberté et la négation de l’Etat de droit, finissent toujours par faire sauter les soupapes de sécurité multiples et toutes les barrières dressées sur les chemins du combat populaire pour l’émancipation et le bien-être. Depuis de longues années, le peuple camerounais subit dans sa chair, les affres d'un homme pouvoiriste et tribaliste.
La vie de plus en plus chère, avec comme corollaires la pauvreté galopante dans les villes et dans les campagnes, la multiplication des stratégies de survie au quotidien, la crise persistante des secteurs publics de l’éducation et de la santé, la recrudescence des pathologies moyenâgeuses sur fond d’une extrême misère, etc. Chaque fin d’année, Biya proclame urbi et orbi qu’il mettra fin à la pauvreté au Cameroun, il a probablement raison dès lors que, pour lui, le Cameroun comme l’Etat, c’est lui et sa famille ;
Les privations endémiques d’électricité et d’eau, au grand dam des ménages et des entreprises, traduisent de manière éloquente le mépris de ce pouvoir à l’égard du peuple camerounais. Les Sahéliens (Maliens, nigériens etc…), tombent des nues à l’idée qu’une ville comme Yaoundé, aux pieds de laquelle coule le fleuve Mfoundi, crève de soif.
Le barrage d’Edéa, qui prend chaque jour les allures d’un éléphant blanc, n’était pas un projet pour soulager les camerounais des incessantes coupures d’électricité. Comme à l’accoutumée, les fauves du « Chemin d’Avenir » avaient besoin d’un cadavre pour assouvir leur boulimie dans la mise à mal des deniers publics ;
Le chômage massif des jeunes et des moins jeunes, condamnés à une retraite irrémédiable sans avoir jamais occupé un emploi à la hauteur de leur qualification, de leurs diplômes ou de leur métier.
En clochardisant délibérément les jeunes, l’enrôlement d'un certain nombre d’entre eux dans le club des voleurs de la fortune publique. Un funeste symbole de l’échec d’un régime capable de n’offrir à l’Armée et à la jeunesse, deux piliers de la Nation, que cette sombre alternative : la déchéance ou la résignation ;
Le syndrome hollandais induit par la gestion calamiteuse des recettes pétrolières accentue la dysharmonie sociale. Nonobstant la sensation d’aise induite par la frénésie pétrolière, notre pays s’expose à ce péril qui a toujours été mal expliqué ou mal perçu par nos dirigeants.
Ce concept, rébarbatif par sa forme, l’est moins dans son contenu , tant il traduit les problèmes macroéconomiques générés par la capacité d’absorption d’une économie suite à l’entrée massive de devises. Ce phénomène a été observé pour la première fois aux Pays-Bas, dans les années 60.
Le sous-développement camerounais est en train de s’aggraver par le fait que les autres secteurs, aussi stratégiques pour un développement intégral, sont laissés en marge des priorités publiques ;
une constitution taillée sur mesure qui confère des pouvoirs exorbitants à une seule personne : Paul Biya. Il est le fer de lance d’un système qui inocule de façon permanente une certaine dose de cynisme dans nos institutions pour qu’elles soient à la merci de ses caprices.
Tout est donc mis en œuvre pour encourager l’opinion à s’en remettre à un Prince plutôt qu’à accorder sa confiance à des institutions qui par définition sont abstraites. Cette situation entraîne une personnalisation du pouvoir, faisant ainsi de l’ombre aux mécanismes représentatifs et sapant toujours plus leur nécessaire légitimité. Or, l’Académicien André VANCHEZ nous rappelle : « Si rien ne se fait sans les hommes, rien ne dure sans les institutions » ;
Comme je le soulignais l'année dernière sur ces mêmes colonnes de Camer.be, le piétinement de l’éthique et l’érection des antivaleurs en modèles de vie et de comportements, ont aplati à jamais les vertus du travail et le goût de la sueur.
Les citoyens ne sont plus départagés par le mérite et par la compétence mais plutôt par la médiocrité des appartenances égoïstes et tribales. Les scandales de toutes sortes, quotidiennement relatés au peuple ahuri, ont fini d’enterrer le peu de retenue et de bienséance dans nos rapports interindividuels et dans nos rapports avec l’Etat.
Ce foyer de miasmes et d’abjections qu’est devenu notre pays, est tout naturellement inapte à répondre correctement aux demandes populaires : les femmes, les jeunes, les marchands ambulants, les artisans, les travailleurs des secteurs public et privé, les masses paysannes, les élèves, les étudiants, les chômeurs, tous les déshérités et laissés pour compte, planifient sous l’emprise de leurs aspirations et de leur volonté, les chemins de la révolte.
Dépasser la parcellisation des luttes, laquelle ne profite qu’aux hiérarchies « pouvoiristes », contribuer à mieux organiser les masses et leur lutte en s’y investissant pleinement pour les doter d’une vision d’ensemble, d’une perspective politique cohérente et crédible, telles sont les tâches des partis politiques et de tous les patriotes décidés réellement à en finir avec le régime et le système Biya.
Chaque jour nous apporte son lot de preuves d’une funeste volonté du système Biya, pour se pérenniser au pouvoir, par l’illégalité et la terreur, au nom simplement de leurs privilèges indus. Il faudra alors leur opposer tous les moyens de résistance à la disposition du peuple, car comme le proclamait la Constitution de la Première République en France : « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est pour le peuple et pour toute portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs. »
Face aux impasses de la démocratie des prédateurs, face au piétinement par un autocrate, des droits politiques, économiques, sociaux et culturels des masses populaires, la rue publique s’arroge en toute légitimité le droit imprescriptible d’imposer la République