Robert Messi Messi, ex-directeur général de la Société camerounaise de banque (Scb).
C’est en septembre 1989 qu’il prend le chemin de l'exil. Depuis lors, il vit au Canada. Les raisons de son départ forcé du Cameroun, Robert Messi Messi les livre au public en mai 1992 dans une interview exclusive dans le journal Jeune Afrique Economie de Blaise Pascal Tala, dans sa livraison n°155.
L'ancien directeur de la Société camerounaise de banque (Scb) raconte, comme dans un polar de mauvais goût, les tribulations qu'il a vécues à la tête de la première banque du Cameroun, de 1983 à 1988. Les déclarations de Messi Messi mettent directement en cause les responsabilités du chef de l'Etat et de son épouse Jeanne Irène Biya, de regrettée mémoire, dans plusieurs opérations de détournements de fonds publics à des fins personnelles.
Mis sous pression par le pouvoir, Messi Messi avait choisi de déballer. En effet, juste après sa sortie du triangle national, une rumeur persistante fait état de ce que Robert Messi Messi aurait financé des opérations pour le compte de Mme Biya qui l'aurait contraint à quitter le pays. Comme si cela ne suffisait pas, une autre rumeur l'accuse de vouloir déstabiliser le régime de l'extérieur par la publication de documents compromettants sur le couple présidentiel.
La goutte d'eau qui fait déborder le vase c'est lorsque Robert Messi Messi se voit refuser le renouvellement de son passeport par l'ambassadeur du Cameroun à Ottawa. L'ancien banquier sent l'étau se resserrer autour de lui. Il essaie en vain de solliciter l'intervention du président de la République. Paul Biya a décidé de faire de lui un bouc émissaire.
Messi Messi ne voulant pas être un agneau au sacrifice se met à table. Dans Jeune Afrique Economie. Il apporte des pièces pour sa défense. Paul Biya en reçoit pour son chéquier. La rupture est définitivement consommée.
Dieudonné Ambassa Zang, ancien ministre des Travaux publics
La justice camerounaise l’a condamné à vie le 18 juin 2015 pour malversations financières. Ce, à l’issue d’un procès bâclé: les faits pour lesquels il a été jugé, et qui relève d’irrégularités de gestion appelant davantage à des sanctions disciplinaires, sont encore en instruction au Contrôle supérieur de l’Etat; aucune trace d’enrichissement personnel n’apparait dans l’acte d’accusation contre l’ancien ministre des Travaux publics.
Il n’échappe à personne de bonne foi que Dieudonné Ambassa Zang, réfugié politique en France depuis 2010, est victime de persécution. Ancien haut commis de l’Etat , cet inspecteur du Trésor de formation a brillé par des mesures courageuses du temps où il fut ministre des Travaux publics: suspension de certains de ses proches collaborateurs pour corruption et autres insubordination, suspension de certaines entreprises bénéficiaires de marchés pour mauvaise exécution de ceux-ci, affectation disciplinaire d’une soixantaine d’ingénieurs pour manipulations de dossiers d’appel d’offres, etc.
Cet ensemble d’actions n’étaient pas de nature à plaire dans un Cameroun où la corruption est la règle et la probité l’exception. Député du parti au pouvoir (Rdpc) dans la Mefou Afamba, son département d’origine, ses prises de position lui ont valu plusieurs demandes d’explication. Des menaces de morts, Ambassa Zang en a également reçu comme ce mystérieux coup de fil qui en 2006 lui faisant savoir que des individus ont décidé de le mettre à mort au cours d’une réunion.
Christophe Junior Zogo, ancien commissaire principal de police
«J’ai réussi l’exploit de désacraliser Paul Biya et ses courtisans », se félicitait l’ancien commissaire de police dans une interview accordée au journal camerounais Le Jour fin décembre 2013. Christophe Junior Zogo, militant du Conseil camerounais de la diaspora (CCD) un mouvement anti-Biya, venait de chahuter le chef de l’Etat à l’hôtel Le Meurice en dénonçant sa longévité au pouvoir. Un véritable coup d’éclat qui fait de lui un homme à abattre.
Titulaire d’un Master en Droit, cet ancien commissaire de police fait partie de trois hauts gradés révoqués du corps de la police en 2006 pour « corruption ». Mais le concerné dit être victime de l’actuel ministre de la Défense, patron de la police de l’époque: « nous avons mis à nu son plan de conquête du pouvoir » confiait-il dans une interview accordée à hurinews. Fuyant les persécutions et les menaces de mort, son exil l’a d’abord conduit en Guinée Equatoriale avant de se retrouver en France où l’Office français pour la protection des réfugiés et apatrides lui a accordé un exil..
Jean Claude Mbede Fouda, journaliste, fondateur de la chaîne de radio «Liberté»
Il est l’un des rares africains à émerger en Italie. En service à la cellule de communication de l’ambassade d’Italie en Ethiopie, Jean Claude Mbede Fouda, 38 ans, se considère comme un miracle du Seigneur tant son parcours est parsemé d’embûches. C’est depuis 2008 que cet ancien journaliste de Radio Reine, Magic Fm et Stv 2, correspondant au Cameroun de la Voix de l’Amérique, bénéficie du statut de réfugié politique en Italie.
En 2007, il lance Radio Liberté à Yaoundé mais le projet fera long feu. Et pour cause: « de hautes personnalités du Cameroun voulaient me forcer à entrer dans des cercles ésotériques, à faire des sacrifices humains pour que ma radio puisse fonctionner, j’ai dû faire la prison à Mfou (30 km de Yaoundé, ndlr) ou j’ai été torturé parce que des individus voulaient me ravir mon projet mais tous les papiers de la radio étaient à mon nom » racontait récemment Jean Claude Mbede à Dunamis Fm, une radio de Yaoundé.
Le journaliste dit avoir échappé à une mise à mort par empoisonnement à l’hôpital de la Caisse d’Essos où il fut hospitalisé. Membre de l’Ordre des journalistes professionnels italien, ce natif de Mbalmayo, au Centre du Cameroun, a fondé en octobre 2013 en Italie, All Tv, une chaine de télévision en ligne qui promeut les valeurs de l’immigration.
J. Rémy Ngono, journaliste, ancien chef de chaîne de la radio urbaine RTS
Il est le chouchou de la presse française. La quarantaine entamée, celui qui se considère comme une « langue serpentine » alterne consultations et chroniques sportives dans les médias hexagonaux.
Mais J.Rémy Ngono revient de loin. Parti du Cameroun les jambes au cou en 2005, fuyant les menaces de mort, l’ancien chef de chaine de la Radiotélévision Siantou (RTS) à Yaoundé s’est d’abord retrouvé en Italie puis en France où l’Office français pour les réfugiés et apatrides (Ofpra) lui a décerné un statut de réfugié politique.
Après avoir été pensionnaire de La Maison des journalistes, une Ong française qui recueille les hommes de médias victimes de persécutions, il réussit à se tailler une solide réputation dans la presse française. Ses malheurs proviennent de « Coup franc », une émission qu’il animait à la RTS au début des années 2000 et dans laquelle il dénonçait les injustices et la mal gouvernance.
De quoi provoquer l’ire du pouvoir réactionnaire de Yaoundé qui a décidé de son incarcération à la prison centrale de Kondengui, dans des conditions désastreuses. Au point qu’il en est sorti mal en point avant de prendre la poudre d’escampette.
Bertrand Teyou, écrivain et activiste politique
Zéphirin Bertrand Teyou séjourne actuellement à la maison d’arrêt de Besançon sous la menace de dix ans emprisonnement. Il a été interpellé, gardé à vue avant d’être écroué pour avoir mis le feu à la mairie de Besançon le vendredi 26 juin 2015. Estimant ne pas recevoir l’aide suffisante pour monter sa propre maison d’édition, il multipliait depuis quelques mois les incartades à Besançon.
On ne sait pourquoi il harcelait la mairie alors qu’il bénéficiait d’un suivi et une d’assistance particuliers de la préfecture du Doubs. Dans une lettre adressée au ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, et reprise sur un blog du site Médiapart en avril 2014, il affirmait sur un ton péremptoire : « Plutôt que de vivre en esclave chez vous, je préférerais vivre en épave chez moi. »
Agé de 46 ans, cet écrivain et activiste politique anti-Biya vit en France depuis 2011 où il jouit du statut de réfugié politique. En novembre 2010, il est arrêté et jeté en prison à Douala après un procès sommaire pour avoir publié un livre qui étrillait le train de vie somptuaire de l’épouse du président Paul Biya, au pouvoir depuis plus de vingt ans : « La Belle de la République bananière: Chantal Biya de la rue à la Présidence ».
L’ouvrage fut retiré des librairies et confisqué par la police. Condamné à deux ans de prison à défaut de pouvoir payer une amende de 3.000 €, il avait finalement été libéré fin avril 2011, après qu’un collectif de défense ait réuni la somme et grâce au soutien d’Amnesty International. Dans le même temps, sa maison avait brûlé dans des conditions qui n’ont jamais été élucidées. Dans l’incendie, sa fille de sept ans avait perdu la vie. Son exil le conduit d’abord au Mexique avant de se retrouver en France où il attendait peut-être beaucoup trop de la France.
Ndzana Seme, directeur de publication du journal «Le Nouvel Indépendant»
Ndzana Seme anime depuis les États-Unis où il est désormais basé, un journal en ligne. Le directeur de publication du journal The African Independant n'a pas perdu sa verve contre le régime de Yaoundé. Le combat continue sous d'autres cieux. Après deux arrestations de trois mois chacune de 1994 et 1995, suivis des procès intentés contre lui par le président Paul Biya pour ''Outrage au président de la République, Incitation à la révolte, et Défaut de dépôt administratif'' de l'édition du journal Le Nouvel Indépendant.
Une deuxième plainte personnelle de feu Jean Fochivé est glissée au procès de 1995 au motif de diffamation. Fochivé retire sa plainte dès la première audience. Il se rend vite compte que les sources d'informations du journaliste sur ses détournements et magouilles sont policières. L'accusation centrale du président Paul Biya est que Ndzana Seme l'avait traité d'''animal pensant'' dans un éditorial du journal, Le Nouvel Indépendant, publié à la suite de son message à la nation en Juin 1995. Ndzana Seme sera acquitté par le premier juge, Luc Nyassa.
Le ministre de la justice, Douala Moutome, interjettera appel non sans avoir menacé les magistrats et organisé un panel de trois juges fidèles à Paul Biya. Le directeur de publication du journal Le Nouvel indépendant sera condamné à un an de prison ferme et à 100 millions de francs Cfa d'amende. Pendant trois mois, Ndzana Seme est obligé de se cacher à Yaoundé. Les éléments armés, en civil, rodent autour de son domicile. Après la publication de l'éditorial incriminé, il a reçu de multiples menaces de mort par téléphone. Il échappe à un attentat à côté de la rédaction. Il a été drogué dans un petit bar.
Il n'aura la vie sauve que grâce à ses rédacteurs Mbanga Kack et Bachirou. Après les déconvenues avec Zebazé, qui a bloqué l'impression de la dernière édition du Nouvel Indépendant, en décembre 1995, Ndzana Seme prend la résolution de quitter le pays, sans argent, sans rien, en compagnie de sa femme enceinte. D'abord ils descendent au Hcr de Lagos, au Nigeria, où ils passent trois mois dans le dénuement total.
Ils réussissent à obtenir une aide du Nonce Apostolique de Lagos qui leur donne de l'argent pour les aider à voyager pour le Sénégal. Après toute une nuit et une journée de voyage de Lagos au Togo et au Bénin, ils décident de dormir à Ouagadougou afin de prendre les cars de Bamako le lendemain. Dans l'auberge où est descendu le couple se trouve une serveuse camerounaise, Marie Ngono. Cette compatriote met Ndzana Seme en liaison avec un journaliste camerounais à Ouagadougou.
Celui-ci conduit l'infortuné chez feu Norbert Zongo, alors directeur de L'Indépendant et Président de l'association des journalistes burkinabé. Tom Sank, l'enfant du couple nait, sous financement des journalistes burkinabé qui avaient presque tous cotisé. " C'est également de Ouagadougou que Amnesty International, saisie par Senfo Tonkam et Winnie Fadimatou qui m'avaient découvert, réactive le dossier de réinstallation aux États-Unis que j'avais rempli à Lagos, alors que le Hcr Ouagadougou me demandait tout simplement de retourner à Lagos ", raconte-t-il. Le 18 septembre 1998, le couple peut voyager pour les États- Unis, un mois avant l'assassinat de Norbert Zongo.
En juin 2002, Ndzana Seme enregistre la société de presse de droit américain dénommée The African Independent Inc, dont la mission est la couverture du monde d'origine africaine des deux continents.