Je suis allé voir Gladiator 2 , à cause bien sûr de Denzel Washington, même si je ne comprenais pas tout ce buzz autour de son rôle de méchant. Quelle gloire y a-t-il à jouer un méchant? Surtout quand on a incarné, comme Sidney Poitier avant lui, une figure noire inspirante, un modèle qui a fait rêver les noirs... notamment les femmes ? Pourquoi, à ce moment de sa carrière, choisir de briser cette image qu’il a construite avec tant de constance ? Est-ce un hasard que cela survienne à une époque où Trump ressuscite le slogan "Make America Great Again", qu’on pourrait aussi entendre comme "Make America White Again" ?
Peut-être cela s’inscrit-il dans une stratégie de clôture de carrière, lui qui a annoncé son dernier rôle dans The Black Panthers, incarnera-t-il également un "méchant" noir? Ce choix serait intrigant, car ce film aussi explore une dynamique ambivalente autour de la méchanceté. du noir Dans Black Panther, Killmonger est "méchant" parce qu’il veut sauver les Noirs opprimés du monde entier, tandis que T’Challa, jugé "bon", l’est précisément pour l'inverse, il a choisi de protéger uniquement son propre peuple, isolant le Wakanda pour préserver sa prospérité.
Mais revenons à Gladiator 2. Ce film m’a fait penser à deux choses. La première, c’est Le Juif Süss (Jud Süß), un film de propagande nazie tourné en 1940 sous la supervision de Joseph Goebbels. Ce film, inspiré du roman de Lion Feuchtwanger, a eu un tel succès qu’il a été imposé aux membres de la SS. Si l’on met de côté sa dimension terriblement antisémite pour ne s’intéresser qu’au personnage central, on peut y trouver des similarités avec Macrinus, le rôle incarné par Denzel Washington. Macrinus est un personnage sombre, sans morale, et politiquement manipulateur. Il accède au pouvoir par la ruse, conseillant les deux empereurs heritiers de Rome avec une froideur calculée pour atteindre ses objectifs. Il s’allie au mal – se met quasimment "au lit avec le diable", comme le dit Denzel – prêt à tout exploiter, manipuler ou détruire pour contrôler l’Empire romain.
Il faut toutefois souligner une différence fondamentale. Si Macrinus trouve ses motivations dans son passé difficile, notamment son statut d’esclave noir, et dans une ambition personnelle dénuée d’état d’âme, le personnage du Juif Süss est quant à lui issu d’un film conçu comme un outil de propagande antisémite, visant à déshumaniser et diaboliser les Juifs. Cette distinction est essentielle pour comprendre le traitement et l’intention derrière ces personnages.
La deuxième chose à laquelle Gladiator 2 m’a fait penser, c’est la guerre de succession qui se profile dans mon pays, le Cameroun, alors que le pays vit les derniers moments d’un très long règne. Je n’ai pas pu m’empêcher de voir en Macrinus une version romancée de notre tout puissant Secrétaire Général de la Présidence actuelle. La reine dans le film ? Une évocation troublante de notre Première Dame. Maximus pourrait être le Président en fin de règne, Hanno son fils aîné, et les deux empereurs Geta et Caracalla figureraient les autres enfants du Président.
Reste à savoir si, comme dans Gladiator 2, cette lutte pour le pouvoir finira dans le chaos ou si elle prendra un tournant différent. L’avenir nous le dira.