On n’a pas cessé d’épiloguer sur le mouvement d’humeur des anciens soldats camerounais de la Mission internationale de soutien à la Centrafrique (Misca).
Après avoir battu le pavé mercredi dernier pour réclamer le paiement des arriérés de primes dues à leur participation à la Misca, les casques bleus camerounais revenus de Centrafrique ont reçu jeudi dernier une partie des six milliards dont le déblocage a été ordonné par le président de la République. La tension n’est donc pas totalement retombée dans les rangs, ce au lendemain du retour à Yaoundé de Paul Biya, qui a passé plus de trois semaines de « court séjour privé » en Europe.
A mesure que l’affaire se dégonfle, la question de savoir s’il faut sanctionner ou non les militaires qui ont marché sur Yaoundé mercredi dernier enfle. Cette option a été clairement évoquée au cours des réunions qui ont suivi la grève.
Des chefs militaires (officiers supérieurs et généraux), appuyés en cela par des personnalités de la présidence de la République et du ministère de la Défense, ont soutenu que l’acte posé par les 200 grévistes (sur 1300 casques bleus) ne saurait resté impuni, car cela pourrait faire tâche d’huile au sein de l’armée camerounaise.
Dans ce camp, les plus déterminés ont même proposé une traduction diligente des instigateurs de la fronde, environ 80 déjà identifiés, devant le tribunal militaire. Ceux-ci tomberaient alors sous le coup du Code de justice militaire qui réprime les crimes et délits contre le devoir et la discipline militaire, en temps de paix et en temps de guerre.
Pour le second camp, sanctionner des militaires qui ont fait des revendications « légitimes » serait une démarche maladroite et une dispersion d’énergie au moment où les forces de sécurité et de défense sont mobilisées pour gagner la guerre contre la secte terroriste Boko Haram.
Pour les partisans de cette option, il est plutôt urgent de commettre une mission composée d’officiers supérieurs qui jouissent d’une légitimité certaine en vue de rappeler aux soldats en colère la discipline militaire. Ce bloc est d’avis qu’une traduction des meneurs du mouvement d’humeur devant le tribunal militaire ne laissera pas les autres casques bleus camerounais indifférents.
Bien plus, cette démarche est susceptible d’accroître la crise de confiance entre une certaine hiérarchie militaire et la troupe. Aux dernières nouvelles, l’idée d’envoyer un « sérieux avertissement » à tous les soldats qui seraient tentés, eux aussi, de se révolter serait en passe d’être adoptée.
En fait d’avertissement, l’on parle de « sanctions statutaires ». D’après le décret du 25 juillet 2001 portant statut particulier du corps des officiers d’active des forces de défense (article 20), les sanctions statutaires applicables aux officiers sont : la radiation des tableaux d’avancement d’échelon, de grade et de concours pour les ordres nationaux, le retrait d’emploi par la mise en non activité, la radiation des cadres.
Mais l’option de sanctionner des officiers supérieurs ou des membres de la hiérarchie du ministère de la Défense n’est pas du tout écartée en haut lieu. Ce d’autant plus qu’une négociation sans volonté de caporalisation et un renseignement prévisionnel efficace auraient permis d’éviter de voir des militaires sortir des casernes pour protester dans la rue.