Opinions of Wednesday, 2 December 2015

Auteur: carmer.be

Guerre contre Boko Haram : Stratégies de conservation du pouvoir

La croisade contre la secte terroriste basée au Nigeria est utilisée comme adjuvant à l’annexion du pays par des puissances étrangères. Les réels enjeux étant économiques, politiques et stratégiques. Paul Biya semble négocier une sortie honorable auprès du quintette Chine, Etats-Unis, France, Grande Bretagne, Russie.

La« Françafrique », politique occulte instituée par le général Charles De gaulle, avait mis sous coupe réglée les colonies françaises d’Afrique noire. La France pouvait ainsi avoir la mainmise, sur leurs matières premières, en particulier le pétrole. L’histoire semble se réécrire. Outre la France, d’autres puissances s’intéressent aux ressources des pays africains avec la bénédiction de leurs gouvernants. Une nouvelle colonisation de l’Afrique est en marche et étend ses tentacules sur le Cameroun. A Omar Bongo, installé en 1967 par Jacques Foccart à la tête du Gabon, avec le soutien actif d’Elf et des services secrets français (le Sdece, actuellement Dgse), on attribue : « La France sans l’Afrique, c’est un véhicule sans carburant. L’Afrique sans la France, un véhicule sans chauffeur ». Aujourd’hui encore, ces propos élargis aux autres puissances qui se ruent à l’assaut des ressources naturelles du pays, sont rigoureusement d’actualité.

L’arrivée des 300 militaires américains sur le sol national sensés assurer les missions de surveillance, de renseignement et d’assistance aux troupes camerounaises est sujette à caution. C’est un peu « too much «, ainsi qu’on pourrait le dire au pays d’où ils sont sortis comme par enchantement. Ce déploiement militaire est le verre grossissant d’une réalité implacable, beaucoup plus profonde : les enjeux économiques, avec en toile de fond la revendication de sa part du gâteau Cameroun par le pays de l’Oncle Sam, aux côtés d’autres puissances telles que la France, la Grande Bretagne, la Russie, et la Chine. Le moins que l’on puisse dire c’est que le chef de l’Etat est actuellement au mieux avec ces puissances occidentales. La guerre contre Boko Haram a donné lieu à d’émouvantes retrouvailles sur le sol camerounais des pays prétendument solidaires, lorsque leurs intérêts se confondent, de la cause sécuritaire nationale.

Cette première intention est louable et justifie peut-être l’affaiblissement actuel de l’assaillant du Cameroun. Mais une autre réalité est beaucoup plus envisageable, tant il est établi que les occidentaux n’ont pas d’amis, mais plutôt des intérêts. Aussi, il ne fait plus l’ombre d’aucun doute sur les véritables intentions de ces pays accourus au secours du Cameroun, aidés en cela par Paul Biya lui-même. En déclarant publiquement à Paris le 17 mai 2014 qu’il y était « pour déclarer la guerre au Boko Haram ». Le chef de l’Etat camerounais ne présumait pas de ses forces, loin s’en faut. Fin stratège, il savait pouvoir compter, le cas échéant, sur des forces exogènes. La tactique, pour risquer qu’elle l’était, ne manquait pour autant pas d’habileté et de sagacité. Il savait que ceux qui lui viendraient en aide ne repartiraient pas les mains vides. Il y aurait des récompenses pour tout le monde. Contentés, ces pays « amis », reconnaissants, lui donneraient l’onction pour renouveler son mandat à la tête du pays. Ou mieux, lui assurer une retraite douillette et paisible. En un mot, Paul Biya prépare discrètement et habilement sa retraite au sommet de l’Etat, ou veut s’y assurer une longévité. Ce sphinx veut voler vers l’éternité, au pouvoir. La caution américaine valant son pesant d’or.

Paul Biya candidat à sa propre succession ?

On envisage mal Paul Biya organisant une Coupe d’Afrique des Nations de football masculine sans toutefois en remettre le trophée au gagnant. D’où la nécessité urgente d’une réélection en 2018. Ouvertement ou subrepticement, il fait l’objet de véhémentes attaques souscrites par des chancelleries occidentales. Mis en selle par son « illustre prédécesseur », à 33 ans et des poussières à la tête de l’Etat, sa longévité au pouvoir dérange. Ce qui n’est pas du goût de certaines puissances occidentales qui y voient une attitude antidémocratique. Mais le président a averti : ne dure pas au pouvoir qui veut. Certains pensent même qu’il pourrait passer par la case prison du Tribunal pénal international de la Haye aux Pays-Bascamer.be pour diverses raisons se rapportant aux distorsions des droits de l’Homme. Il laisse le quintet Etats-Unis, France, Chine, Russie, Grande- Bretagne assurer le destin du Cameroun, et décider de son futur. La France, la Russie, la Grande Bretagne, la Chine, les Etats-Unis d’Amérique ont pu prendre pied au Cameroun par le truchement des ressources naturelles dont regorge « l’Afrique en miniature » et via la guerre contre la secte islamiste terroriste.

Le nord du Cameroun est le théâtre des opérations militaires en guerre contre Boko Haram, mais c’est surtout là, de l’avis de certains, où se noue l’intrigue de l’après Biya. Cet épilogue se joue donc dans cette partie septentrionale du pays depuis son invasion par la soldatesque d’Abubakar Shekau. Le Grand Nord qui attise de nombreuses convoitises est aujourd’hui sécurisé à 80% par l’armée camerounaise, solide dans sa formation, rigoureuse dans son organisation, up to date dans son équipement, et carrée dans sa discipline, son intégrité, sa foi et son engagement, gages d’un patriotisme indéfectible, qui doivent être salués à bon droit. La reprise récente de la localité de Kerawa dans le Mayo-Sava aux mains de Boko Haram, véritable démonstration de son abnégation, en est une formidable illustration. Qu’est-ce qui justifie donc aujourd’hui un déploiement d’une telle envergure de marines américains?  

Richesses minières

Il est indéniable que les côtes africaines, et principalement celles du Cameroun regorgent d’abondantes ressources de pétrole en offshore. On peut aisément comprendre la raison de ce formidable ballet autour du palais de l’Unité à Etoudi, ou cette sollicitude soudaine et suspecte pour le Cameroun démontrée par les puissances occidentales depuis les attaques de Boko Haram, mais surtout après la quasi reddition du groupe islamiste terroriste. Assurément, Paul Biya protège son strapontin. Ces pays-là ne soutiennent pas les chefs d’Etat rétifs à leurs sollicitations, qui tournent autour de la cession des ressources naturelles dont leurs pays regorgent. A leur cœur défendant, ils sont « virés » ou priés de « dégager » sous le fallacieux prétexte de n’avoir pas respecté les engagements tenus vis-à-vis de leurs peuples, au nom d’une prétendue démocratie. Les nations occidentales qui gravitent autour du Cameroun ont en outre en commun le privilège d’être membres du Conseil permanent de sécurité des Nations unies, et donc, ont force de décision sur d’autres nations, notamment les plus faibles au sein desquelles elles peuvent déclencher le chaos ou rétablir l’ordre, c’est selon, toutes les fois qu’elles le désirent.

A l’instar de la France, tous ces Etats se disent très attachés à la défense et à la promotion des valeurs démocratiques partout dans le monde. Le prétexte de la déstabilisation d’un pays ou d’une région est très souvent lié à ce précepte fallacieux. Tout conflit politique, tout complot ou toute opération militaire aux alentours, ou non loin, du Golfe de Guinée a des relents ou des couleurs de l’or noir. La guerre contre Boko Haram semble ne pas échapper à cette triste réalité et vise bien d’autres ressources naturelles. Elle ne garantit pas une stabilisation du pays, tant il est connu qu’il est plus facile de commencer une guerre, mais difficile d’en présager la fin.

Comme ses autres voisins de l’Afrique centrale (Gabon, Guinée Equatoriale, Centrafrique, Tchad), le Cameroun est en raison de ses ressources naturelles restées quasiment intactes et de meilleure qualité, classé parmi les pays africains à risques. Ces Etats peuvent s’embraser à tout moment selon le bon vouloir de quelque puissance en quête de matières premières. Le Cameroun compte parmi les dix Etats pétroliers de l’Afrique derrière le Nigeria, l’Angola, le Gabon, le Congo, la Guinée Equatoriale. L’intérêt de toutes ces nations occidentales pour le Cameroun est relatif à la consistance de son sous-sol à l’Extrême-nord. L’uranium avec lequel le Cameroun peut lui aussi développer un programme nucléaire, semble pour ainsi dire, principalement intéresser les Etats-Uniscamer.be. Ceux-ci n’auraient pu rester indifférents à la présence d’autres oiseaux de proie prêts à se repaître de l’énorme carcasse du gibier succulent à souhait qu’est le Cameroun. La Chine et la France y contrôlent déjà les infrastructures hydroélectriques et portuaires. La Grande Bretagne, la Russie, s’intéressent elles aussi aux ressources minières et énergétiques. L’oléoduc Tchad-Cameroun transporte sur 1 050 km le pétrole extrait des gisements situés au sud du Tchad, jusqu’au port de Kribi. Le projet, soutenu par la Banque mondiale, est porté par un consortium composé par deux entreprises nord-américaines, Exxon- Mobil et Chevron, et la société malaisienne Petronas. Cela pourrait-il aussi expliquer la présence des marines américains sur le sol camerounais pour assurer la protection de leurs intérêts ?

Le Cameroun est un pays riche en ressources naturelles il dispose, en plus de considérables réserves de pétrole, d’importants gisements de rutile, cuivre, calcaire, manganèse, diamant bauxite, cobalt, fer, or, nickel et uranium. Ces ressources n’ont pas encore été beaucoup exploitées à grande échelle du fait du manque d’infrastructures. Le Cameroun dispose d’importantes ressources naturelles : l’eau (2ème potentiel hydroélectrique en Afrique), le bois le pétrole, (le pétrole brut qui est devenu le premier produit exporté en valeur), le gaz naturel. Ces ressources énergétiques peuvent-elles être un jour la cause de la fragilité ou du délitement de la stabilité politique du Cameroun ?« L’abondance des ressources naturelles est devenue une malédiction, car loin d’être une source de stabilité, de richesse et de prospérité, elle génère plutôt les conflits, la pauvreté et la misère. Ce qui n’est pas le cas dans les pays qui ont su mettre à la base une bonne stratégie de leur exploitation. Au Cameroun nous voulons en faire une bénédiction, une source de richesse et de développement pour les populations »Fuh Callistus Gentry, secrétaire d’Etat du ministère des Mines et du Développement technologique le reconnaît, mais veut tenter de conjurer le sort. La chose se présente comme assez complexe.