Election présidentielle. Des chefs traditionnels, des administrateurs civils issus de l'Enam, une association des acteurs des transports pour la paix et le développement, des syndicats... prient Dieu d'allonger le séjour de Paul Biya au pouvoir.
Le plus farfelu des appels à la candidature de Paul Biya est sans doute celui des 36 administrateurs civils issus de la promotion 1997- 1999 de la section administration générale de l'Ecole nationale d'administration et de magistrature (Enam). Le document publié dans Cameroon Tribune est signé le 15 janvier 2015. Ils « exhortent (Ndlr Paul Biya) à ne pas hésiter un seul instant à répondre à l'appel grandissant du peuple camerounais auxquels ils s'associent avec ferveur, de briguer un nouveau mandat présidentiel.»
Ces diplômés de l'Enam ont bien précisé la motivation de leur ardeur : « (... ) vous avez bien voulu par décret Numéro 2015/437 du 02 octobre 2015, porter monsieur Dieudonné Samba aux éminentes fonctions de conseiller spécial à la présidence de la République.
Très touchés et très honorés par cette haute marque de confiance, les membres de la promotion 1997-1999 de la section administration générale de l'Ecole nationale d'administration et de magistrature à laquelle a appartenu Monsieur Dieudonné Samba, vous expriment leurs très vifs et déférents remerciements», et demandent au "Dieu Tout-Puissant" d'allonger le séjour de Paul Biya au pouvoir et de le bénir.
On a également lu un appel à la candidature de Paul Biya d'une obscure Association des acteurs des transports pour la paix et le développement (Atrapad) que préside Pierre Nyemeck Ntamack.
L'association qui regroupe en fait des leaders syndicaux proches du pouvoir, au cours d'un point de presse, le 19 février au parc à camions du quartier Mvan se félicite du train de mesures prises afin de lutter contre la vie chère au Cameroun et cite «la baisse du prix des carburants à la pompe, l'augmentation des allocations familiales, la revalorisation des btaux de cotisations sociales, la réduction du coût de certaines taxes et impôts, l'institution de l'assurance volontaire, la réactivation du Fonds de garantie automobile, la création du Comité national de suivi des accidentés de la route, la mise à disposition d'un montant spécial de 100 milliards Fcfa pour la réhabilitation de certains axes routiers, l'aménagement de la Ring-road et la signature de l'arrêté portant création des brigades le transport routier clandestin ».
Adulation
Instigateur de l'appel, El Hadj Oumarou Dandjouma, coordonnateur du Bureau de fret terrestre du Cameroun a vite entonné le refrain de l'adulation : « En cette période où le Cameroun mène une guerre contre Boko Haram, le président Paul Biya est le seul capable de permettre à notre pays de venir à bout de cet ennemi de la nation.»
Il s'en crée désormais tous les jours. Une insolite association des « présidents nationaux des ouvriers du secteur des transports » a aussi concocté son appel pour suggérer à Paul Biya « de bien vouloir accepter d'être de nouveau candidat à la prochaine élection présidentielle quelle que soit la date de sa tenue », précisent-ils.
Le plus étonnant dans ce tourbillon d'appels curieux est celui des chefs traditionnels qui n'hésitent pas à dévaler de leurs trônes majestueux pour hurler, eux aussi, le refrain courtisan.
La conférence des chefs traditionnels du Sud-Ouest emmenée par Victor Mukete demande ainsi à Paul Biya d'accepter d'être candidat à la prochaine élection présidentielle.
Samedi dernier, Georges Désiré Pokam, le chef Bayangam et présidentde l'association des chefs traditionnels de l'Ouest, ne s'est pas contenter d'une simple présence au meeting de Bafoussam, il a énuméré les chantiers du Renouveau, y impliquant les facilités octroyées par le chef de l'Etat pour la création de l'Université des Montagnes.
Mais surtout, il a associé sa voix à celle des autres élites de l'Ouest pour demander à Paul Biya d'être le candidat de la région à la prochaine présidentielle.
Les autorités administratives, symbole d'un service public qui s'accommode mal de réflexes partisans dans une République, ne sont pas en reste.
Dans un véritable mélange de genre, préfets et gouverneurs sont ainsi transformés en facteurs du Rdpc chargés de transmettre au chef de l'Etat des appels étranges à une candidature qui rien n'interdit.