Opinions of Sunday, 30 April 2017

Auteur: Alain NDANGA

Je reviens de Bamenda : le calvaire de la route

Photo d'archives Photo d'archives

C’est le parcours du combattant. Pour ceux qui s’y aventurent, c’est un véritable chemin de croix, mieux, un long et périlleux périple. Même la faveur des jeux universitaires n’a pu rien faire à cette situation aussi désastreuse que honteuse.

Julius, le chauffeur de ligne, vient de réaliser son premier exploit de la journée. Parti ce matin pour Bafoussam, il a pu rallier Bamenda. C’est son premier aller et retour. Il en fait 2 ou 3 par jour. Visiblement épuisé, il satisfait les passagers qui avaient les tickets de remboursement sans mot dire. Pourtant au début du voyage, il lançait des blagues qui faisaient marrer ses clients.


C’est juste 73 kilomètres, la distance qui sépare les capitales régionales du Nord-ouest et de l’Ouest. Partis de Bafoussam à 9 heures 15 minutes, nous sommes arrivés au cœur de la ville du Chef lieu de la Région du Nord-ouest à 12 heures 43 minutes. Un peu plus du temps que mettrait un car de transport en commun parti de Ndikiniméki et arrivé à Yaoundé.

Julius, la star de la route !

A partir de Santa, l’on peut difficilement imaginer qu’il y a un si importante ville devant. Sous fond de revendication des usagers, le poste de péage de Santa est aux arrêts depuis des mois. D’aucuns diront qu’après Santa, c’est le désert. A tort ! Car après Santa, il y a Bamenda, qui est non seulement une grande ville, mais une métropole en devenir. D’un pas en arrière, entre Santa et Babadjou, l’on n’a que ses yeux pour pleurer. Des nids de poules, mieux, des pattes d’éléphants grandissent sur cette nationale de la honte, sous le regard impuissant de ceux qui l’empruntent.

Des touristes blancs rencontrés, faisant le trajet retour, très chargés par leurs bagages, sont obligés de pousser de la main leurs bicyclettes du fait de l’impraticabilité de la route. A certains endroits, aussitôt Julius a mis le pied sur l’accélérateur, aussitôt il l’a enlevé, comme s’il oubliait le fossé qui s’ouvrait devant lui. En freinant brusquement et en manœuvrant pour esquiver le trou béant, la panique s’emparait des passagers qui sont restés éveillés jusqu’à l’arrêt complet du car de 19 places. Dès ce moment, nous avons tous compris pourquoi Julius, un des chauffeurs les plus anciens de la ligne, ne joue pas avec sa ceinture de sécurité. Nous avons aussi compris pourquoi il s’est arrêté à Babadjou, et a fait augmenter de l’aire dans toutes les 4 roues, sans oublier les 2 autres roues de sécurité, au cas où. Des gens qui l’apprécient énormément, témoignent même qu’il est le « best driver ».

Le bout du tunnel

« Depuis des décennies, l’on nous informe toujours qu?une convention a été signée entre le Gouvernement camerounais et les étrangers, partenaires au développement. Yaoundé seul sait pourquoi la matérialisation tarde à prendre corps », dixit Julius au volant de son véhicule, empreint de pessimisme. Tout comme lui, c’est l’attitude la mieux partagée par des usagers qui souffrent du même calvaire de la route. Toutefois, Julius est encore informé qu?une convention a été paraphée la semaine dernière (plus de 112 milliards : Ndlr) entre l’Etat du Cameroun et les américains, un pan des ressources visant à réaliser l’important projet de construction de cet axe routier. « Le Minepat aurait vu juste, car l’énorme trafic sur l’axe Bamenda-Bafoussam-Yaoundé est intensément pratiqué », a assené un fonctionnaire qui y allait reprendre du service. Le Chef lieu de la Région, étant le carrefour où des produits agricoles venus des autres grands bassins de production convergent avant de rallier Douala ou Yaoundé en passant par Bafoussam. Cette convention de tous les espoirs sera-t-elle encore un leurre ? C’est l’entrée ou la sortie du bout du tunnel ? Les populations restent accrochées aux lèvres de Louis Paul Motaze, le minepat.