Opinions of Tuesday, 8 November 2016

Auteur: Serge Alain Godong

L'angoisse des motos-taxis au Cameroun

Benskineurs, conducteurs de moto taxi Benskineurs, conducteurs de moto taxi

Dans la seule ville de Douala en effet, une estimation incertaine porte à 50 000 le nombre de personnes qui, tous les jours, font des mains et des pieds pour s’en sortir, et dont l’humeur n’est pas toujours joyeuse, lorsque leur vient le temps des narrations de leurs durs galères existentielles. Du fait de ce mécontentent sourd qui gronde aux portes du pouvoir et dont les voix se font souvent entendre par séquences éruptives, prend forme l’indécision d’un pouvoir qui ne sait pas exactement quoi faire de ces gens.

En 2001 en effet, le gouvernement avait tardivement légiféré sur la question, par un décret du Premier ministre, qui ne fut – au demeurant – jamais appliqué. Par la suite, il est revenu à chaque édile d’en faire un peu à sa tête, à l’exemple du délégué du gouvernement de Yaoundé, qui a décidé d’adopter à leur endroit, une attitude notoirement dure, voire hostile, leur interdisant ni plus ni moins l’accès à une grande partie de ce centre-ville auto-représenté comme coquet.

Pendant ce temps, d’autres instances du même Etat essaient régulièrement – cas de la délégation départementale des Transports du Mfoundi – tant bien que mal, d’ouvrir concertation et dialogue, afin de les encadrer du mieux possible et éviter des débordements. Solution ou cancer social ? Chacun trouve donc dans le moto-taximan, la juste photographie qu’il se fait de la société camerounaise actuelle. Société où chacun se faufile entre les lignes et les goutes, sans respect de rien ni de personne, essayant du mieux que possible, de trouver des points d’ancrage à un avenir sans cesse perdu dans le vide.

Les motos-taximens sont dans la quintile supérieure des couches les plus pauvres de nos centres urbains, dont l’Institut national des statistiques affirmaient il y a peu qu’ils représentent à peu près 38 pour cent de la population totale. Il y a dans cette gageure une bataille normative et légale autant qu’économique : toutes les misères du monde aux devant desquelles le gouvernement a choisi de procéder par évitement et éloignement des difficultés, tant que parvient à être préservé – pour un coût dont personne ne veut assumer la charge – le fragile et illusoire cache-sexe de la « paix sociale ».