Interdiction des emballages plastiques, la vente des whiskies en sachet, et l’occupation anarchique de la voie publique sont autant de décisions sans suite prises par le gouvernement camerounais, qui n’ont jamais su faire changer d’attitude aux uns et aux autres.
« Est-ce que les arrêtés ministériels et préfectoraux nous font encore peur ? C’est tous les jours qu’ils prennent de nouvelles décisions et on parvient toujours à gérer.» Ce sont des paroles de Marcel O., commerçant au marché Mokolo à Yaoundé.
Comme Marcel, c’est avec raillerie que beaucoup de Camerounais commentent les multiples décisions qualifiées d’intempestives et irréfléchies du gouvernement visant des interdictions.
Des décisions qui parfois accentuent le regain d’incivisme des Camerounais. Intéressons-nous à quelques-unes de ces mesures qui sont bourdées et parfois bafouées par ceux qui se croient «être plus fort que l’Etat», Etat que Thomas Hobbes le philosophe dans son livre le Léviathan qualifie de tout puissant et de régulateur.
Emballages plastiques
C’est depuis le 24 avril 2014 qu’est entré en vigueur au Cameroun, l’arrêté du 24 octobre 2012 du ministère de l’Environnement, de la protection de la nature et du développement durable, interdisant l’utilisation des emballages plastiques non-biodégradables de moins de 60 microns.
Un communiqué d’application de cet arrêté avait été rendu public, le 13 février 2013.
A partir de cette date, 18 mois avaient été accordés aux commerçants pour écouler leurs stocks et se conformer à la nouvelle règlementation.
Rendu à ce jour, l'emballage plastique n'a jamais disparu du marché, bien au contraire, il a doublé de prix, «J’ai changé de techniques, je ne m’installe plus comme avant de peur que la mairie ne saisissent ma marchandise je préfère être ambulant et la plupart de mes clients ont mon numéro de téléphone.» affirme un commerçant de plastique.
Du côté des consommateurs, le gouvernement serait allé vite en besogne en enlevant de la circulation ces emballages plastiques. Aucune mesure de rechange de cet outil n'a été prévue.
Dans cette situation, il devenait difficile pour les clients d'acheter un bien et, pour les commerçants de vendre ; le gouvernement n'a pas pris toutes les mesures nécessaires pour empêcher la fabrication et l'entrée du plastique de moins de 60 microns sur le sol camerounais.
Or, ces plastiques non bio dégradables qu’on retrouve sur notre territoire proviennent des pays voisins tels que le Nigeria ou le Gabon, du fait de la porosité de nos frontières. On peut donc penser que le Cameroun a, encore fait preuve de laxisme et de manque de suivi.
Voie publique: le règne du capharnaüm
Le spectacle auquel on assiste quand on parcourt nos rues est à tomber à la renverse. Il s’agit de l’occupation anarchique de la voie publique. Si l’on prend le cas des marchés qu’on pourrait qualifier de clandestin, puisqu’il ne naît pas de la volonté des autorités publiques.
Il naît d’un individu qui a placé son comptoir quelque part et que beaucoup d’autres finissent par imiter à la fin.
Cas de figure le marché Mokolo à Yaoundé où il devient de plus en plus impossible de circuler pour les piétons comme pour les automobilistes. Il n’existe plus de trottoirs, puisque les commerçants ont fini par réduire même la largeur de la chaussée avec leurs étals.
A Yaoundé comme à Douala, principalement, il est difficile d'apprécier les véritables limites d'une route dans ses différentes composantes que sont les deux trottoirs et la chaussée.
La raison est que l'envahissement des voies publiques dans ces deux capitales est de nature à confondre la route à un Pandémonium. Etalages de commerçants à la sauvette, motos-taxi, brouettes, portes-tout, mendiants et autres automobiles mal garés, ont fini par prendre le dessus sur les voies de transport.
Et comme tel, il devient difficile de circuler aux motifs de bouchons occasionnés par cette lugubre situation. Ce qui constitue en soi un facteur de perte de temps et d'énervement pour les usagers, un frein pour l'activité économique et l'embellissement des cités.
Que ce soit au niveau communal, des communautés urbaines, comme dans différents ministères en charge de la question, de nombreuses décisions sont prises, sans pour autant que la situation réelle change sur le terrain
Whisky en sachet
Ils inondent les étals, chaque disciples de Bacchus trouve certainement son goût. De kitoko à King Arthur, en passant par lion d’or ou encore figther. L’arrêté conjoint du 12 septembre 2014, signé par les ministres de la Santé, du Commerce, et de l'Industrie rendait «obligatoire» l'application de la norme sur la production des liqueurs et autres spiritueux au Cameroun.
Cette norme n'autorise que le conditionnement en bouteilles pour les liqueurs et spiritueux, seuls emballages pouvant être estampillés. C’est donc peut être la fin des whiskies en sachet ou en bidon.
Les producteurs locaux avaient 24 mois pour écouler les stocks, précise l'arrêté gouvernemental. D’ici septembre 2016, l’on saura si cette décision ne sera pas une de plus qui sera bafouée par les Camerounais.
Impunité
Il n'est pas rare de retrouver certaines autorités complices de cette anarchie. Le fait est que, même sur les trottoirs et les chaussées, ces occupants illégaux payent des taxes, ce qui explique l'indulgence complice des autorités vis-à-vis d'eux et, par ricochet, leurs installations en permanence sur la voie publique.
Autre problème, très souvent lorsqu’un « récalcitrant » est pris en fragrant délit, il use comme stratagème, soudoyer les agents de la communauté urbaine, qui lui remettent aussitôt la marchandise saisie.
«Quand Awara[Ndlr langage codé pour nommer les agents de la communauté urbaine] il faut débourser entre 5000 ou 10 000 FCFA pour qu’ils te remettent ta marchandise», nous confie un sauveteur sous anonymat.
Par ailleurs, une chose est de prendre des mesures d'interdiction, et une autre est, d'offrir un cadre réglementaire et accessible à ses compatriotes qui, malgré leur incivisme, ne demandent qu'à gagner honnêtement leur paie. Après tout l’Etat reste quand même le tout puissant instrument qui régule et règlemente la vie en société.