La question est pourtant bien simple: où est le président de la République ? Incapable d’apporter une réponse claire, rassurante et sans équivoque à cette interrogation citoyenne sur l’absence de Paul Biya depuis plus d’un mois, le gouvernement a décidé de brandir ses armes favorites : la violence, les menaces et les intimidations.
Après les sorties plus que confuses de Grégoire Owona, ministre du Travail, de Jacques Fame Ndongo, ministre de l’Enseignement supérieur, de René Sadi, ministre de la Communication et de Samuel Mvondo Ayolo, directeur du Cabinet civil de la Présidence de la République, le très rugueux Atanga Nji, ministre de l’Administration territoriale a décidé lui-aussi de mettre une pièce dans la machine.
Dans un communiqué rendu public jeudi, le ministre Atanga Nji, fidèle à son langage fleuri, proclame que tout débat dans les médias sur « l’état du président de la République » est « formellement interdit ». Et il enjoint les gouverneurs des 10 régions du Cameroun à faire dès à présent la veille pour traquer ceux des « médias privés » qui outrepasseront cette mesure pourtant rétrograde et arbitraire.
Quand bien même les médias ciblés s’abstiendront de tout débat sur la l’état du président de la République par crainte des représailles, quel problème pense-t-il avoir résolu ? Est-ce pour autant que les Camerounais arrêteront de se demander où est leur président ? Ce d’autant que le lien de confiance qui est supposé exister entre les citoyens et leurs dirigeants est depuis longtemps rompu. La parole officielle ne pèse plus. Le doute s’est installé dans les esprits. A la manière de Saint Thomas, beaucoup attendent impatiemment le retour prochain au pays de leur président de la République pour crier : alléluia !
On peut comprendre que l’on veuille préserver la vie privée du chef de l’État.
Mais lorsqu’on aspire au secret sur son état de santé, on se garde bien d’occuper une haute fonction, qui plus est, présidentielle. Son illustre destin a voulu qu’il préside aux destinées de la République du Cameroun et ce depuis bientôt un demi-siècle. A ce titre, que ses zélateurs le veuillent ou non, sa santé est un enjeu national et ne pas s’en soucier relève de l’irresponsabilité.
A 91 ans, même s’il est bien portant, Paul Biya n’est plus tout à fait jeune.
Aujourd’hui comme demain, ses citoyens continueront à s’interroger sur ses capacités physique et intellectuelle à continuer à remplir ses hautes fonctions.
Il faut voir derrière les communiqués rageurs des Atanga Nji, Sadi, Owona et autres Fame Ndongo et Mvondo Ayolo, une peur bleue du jour d’après ou l’expression de leurs propres angoisses. Qu’on ne s’y trompe pas. Ils se posent tous la même question le matin en se rasant : « et si cela arrivait ? » Leur problème : ils n’ont pas de plan B. Ils ne l’ont jamais envisagé. Ils tremblent.