Opinions of Thursday, 18 July 2024

Auteur: Shanda Tonme

La solution de Shanda Tonme pour réconcilier les Camerounais

La tentation demeure forte voire suicidaire La tentation demeure forte voire suicidaire

Ce n’est jamais le principe de la paix qui est en débat partout dans les sociétés tiraillées entre les oppositions, coincées par les radicalismes ainsi que les sectarismes, et malade des multiples dérives. Ce qui fait défaut, c’est la compréhension même de la signification de la paix comme bien collectif et comme bonheur dépendant de la mutualisation des intelligences positives. De fait, la paix ne conforte pas que les opprimés, elle préserve aussi les gouvernants et leurs proches, des vengeances, des règlements des comptes certains et des humiliations de demain, au-delà des inéluctables repentirs et remords.

La tentation demeure forte voire suicidaire, pour certains de nos compatriotes assumant des fonctions au plus haut, et titulaires des responsabilités décisives pour nos vies, pour des organisations et pour des entreprises, de se perdre en développant des attitudes, des discours et des méthodes qui se situent aux extrêmes de la raison.

Le Cameroun, notre Cameroun, celui que nous aimons tant, n’aspire à rien d’autre qu’à la paix aujourd’hui. Quelle que soient nos doctrines et idéologies, il nous est moralement interdit, sous peine de haute trahison, de faire autre chose, de penser autrement. Nous avons en conséquence, le devoir de ne rien faire qui fasse penser, sentir ou croire par qui que ce soit et où que ce soit, de quelle que manière que ce soit, qu’une personne, un parti, une organisation, un clan, un village, une corporation ou même simplement une fraternité sociétale, que nous menons explicitement ou implicitement, une politique d’exclusion, de marginalisation ou de ciblage haineux.

Nous ne renierons pas notre histoire des moments et des discours sales et abjects. Nous gardons dans nos archives pour mémoire, l’époque où un Recteur de la seule université du pays à cette époque, le Pr. Jean Messi, demandait ouvertement à quelques quatre cent jeunes bacheliers, d’aller s’inscrire dans leur village. Tout un ministre n’hésitait pas également, en 2008, à recommander que les natifs de la capitale prennent la machette contre certains de leurs compatriotes traités d’étrangers et de fauteurs de troubles.



Aujourd’hui c’est terminé, nous n’en voulons plus et il n’y aura plus jamais cela. Paul Biya n’a pas menti ni blasphémé la paix, l’intégration et l’unité nationales, en décrétant solennellement « que personne n’a plus besoin d’aller au maquis pour exprimer ses opinions ». Le patriarche parlait juste, vrai et concrètement. C’est cela et cela seulement qu’il faut retenir, et avancer sans avoir besoin d’une torche pour éclairer les chemins qui mènent au dialogue, à l’unité, à la réconciliation et à la paix.



Nous devons encore le dire, le répéter et le soutenir, que « tant que la paix sera au centre de nos ambitions et espoirs, aucune démarche ne devrait indexer un compatriote, un parti politique ou un regroupement quelconque, pour l’exclure du processus, que ce soit pour un autre grand dialogue national, ou que ce soit pour une consultation électorale quelconque, sauf à apporter la preuve irréfutable, que le ou les mis en cause, constituent une menace directe, certaine et totale contre la République.



A ce propos, les pouvoirs publics, tout en demeurant maîtres et donc responsables de notre sécurité, de la préservation des institutions et de la sauvegarde de nos emblèmes, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, ne gèrent pas les problèmes internes des partis politiques, n’interfèrent pas dans leurs stratégies organiques ni dans leurs approches et leurs compréhensions des opportunités électorales. Dès lors que le sentiment d’une immixtion dans la vie des partis, des associations et autres regroupements légaux, devient latent, nous perdons en crédibilité dans notre quête de réconciliation et de paix sur une base inclusive.

Il en va de même, pour la justice, laquelle doit demeurer dans une indépendance absolue quand, interpellée pour des querelles internes, elle doit statuer. Il appartient aux Magistrats de lire le temps, de comprendre l’histoire et d’assumer leurs responsabilités, toutes leurs responsabilités en refusant la distraction politicienne de même que des influences et injonctions nocives. Nul ne saurait statuer autrement que de rejeter des prétentions d’individus à des remboursements d’investissements quelconques dans leur ancien parti. On adhère librement à un parti politique en ayant pris connaissance, sauf incapacité mentale avérée, des documents de base (statuts et règlement intérieur), et on travaille, non par pour quelqu’un, mais pour ce parti certes, mais aussi pour soi-même, pour le confort des idées déployées en doctrines et en idéologies auxquelles on croit.

On investit donc physiquement, moralement, intellectuellement, éthiquement et matériellement, parce qu’on est intéressé. Et comme gain immédiat, la présentation, la considération et la reconnaissance sociales, familiales et politiques. Quel est le coût des bénéfices en termes d’images pour soi ? Et si jamais le parti se livrait à une quantification quelconque déclinée juridiquement en demande reconventionnelle dans une procédure devant le même tribunal ? Il ne faut pas encourager ni soutenir ce genre d’étourderie contraire au bon sens primaire.

Le Contexte de notre pays en appelle à plus d’intelligences et de sagesses, pour mieux matérialiser et concrétiser ce qui fait notre force et l’ADN de notre anthropologie sociétale et identitaire. Point ne sera besoin de se répandre ici ou à l’étranger, en menaces diverses et en pantouflardes radicalisant pour prévaloir. Nos compatriotes ont globalement atteint un niveau de culture, de compréhension et de discernement suffisant pour les mettre à l’abri des gesticulateurs de tous les bords, qu’ils soient du gouvernement, de la société civile ou dirigeants politiques catalogués « d’opposition ».

Le Cameroun a un urgent besoin de paix et d’unité, mais rien ne se fera en attisant à nouveau les flammes de la haine, de l’injure faites aux institutions en place, ou par l’exclusion ciblée de quelques leaders d’opinion et chefs politiques. Il en va de même de la manipulation télécommandée des mécanismes internes d’ordonnancement organique des partis politiques, ainsi que de leurs stratégies en temps de consultations électorale.

A ce propos il faudrait définitivement convenir que le mot d’ordre doit revenir dans le creuset de l’unité, en affichant partout la sagesse dans les prises de position. Cette exigence condamne lourdement, les forfanteries et autres kermesses du dimanche sur les plateaux de télévision, où la vanité des parchemins, desquels on attend toujours de voir les brevets d’invention probants ou les publications scientifiques de consécration universelle, prennent le pas sur l’énonciation de la vérité d’une part et sur la déontologie élémentaire de l’information d’autre part.

Nous conviendrons tous, en tout état de cause, qu’il y a un art et une manière de communication applicables à tout le monde sans distinction de statut, surtout lorsqu’on aspire à bâtir la paix dans un pays. Les proclamations attentatoires à la solidarité nationale et à la dignité des personnalités, ainsi que d’éventuelles décisions administratives excessives, agissent comme des poisons d’une brutalité cruelle./.



Yaoundé, le 18 Juillet 2024