En de mots simples, admirons l’ingéniosité de nos petits enfants commerçants dans nos rues : « ils sont rusés.
Celui qui vend les œufs marche avec son ami. Celui qui vend les œufs est très sympa en piments. Quand tu achètes l’œuf, le petit te fait la tartine de piments. Dès que ça te chauffe, son ami surgit et dit seulement eau glacé là, eau glacé là, il y’a l’eau là ».
Ce sont les vacances. Les élèves, les plus jeunes enfants ont vidangé les sacs de l’école, les sacs « de l’école de l’école » pour les utiliser comme sacs de l’école de l’attaque, de l’école de la vie, et ils se sont jetés dans le vaste océan du commerce, ce que les autres appellent la débrouillardise de pendant les vacances.
Les seules choses qu’on a gardées dans les cartables : les stylos et les calculatrices. C’est avec ça qu’on va à l’attaque. Mak-calcul, Mak plan : no error in business. Même si la calculatrice ne
m’a permis de bien composer à l’école, avec ça quand même je ne peux pas faire une erreur de calcul au marché. Même si les épreuves difficiles du lycée m’ont fait ronger le stylo bleu, le recyclage est possible pour le business, ça donne au moins l’argent.
Le sac vidé joue le rôle de magasin et de caisse en même temps : Two in one. Juste question de stratégie, de maestria et d’ingéniosité. Parce que premièrement, en cas de liquidation de stock de biter-kola, d’ananas et autre, le ravitaillement est immédiat. Le magasin est là sur place. Juste au dos. Un tour derrière et la boutique est rechargée. Deuxièmement : le sac c’est aussi la caisse. Prescription et ordonnance d’un entrepreneur: ne pas perdre un client à cause de la monnaie.
QU’EST QU’ON VA VENDRE ?
A question stupide, réponse idiote. On va tout vendre. Pendant les vacances, tout est bon à vendre. Et les élèves stratèges ont compris que les changements fondamentaux s’opèrent dans les changements de paradigme. Ce n’est pas parce que papa est musulman que pendant les vacances je ne puisse pas faire le soya du porc.
Au contraire, je le fais bien, piment à coté, le genre qui amuse les lèvres, divertit la langue et la fait remuer comme si l’amour venait de poser ses bagages au siège des émotions de celui qui le lèche ; c’est vrai que tout le monde est musulman à la maison ; mais ne me demandez pas ce lui qui goutte le porc quand c’est cuit. C’est qui un entrepreneur ?
C’est celui qui affronte le risque. Même si j’avais 20 de moyenne en éducation civique et morale là où on nous apprend à éviter la toxicomanie, ça ne m’empêche de vendre ma cigarette. C’est moi qui fume ? L’acheteur sait qu’il est interdit de fumer. Je ne vends donc pas, j’essaye de voir sil est sage. S’il fume, je confirme qu’il y’a des délinquants. Je ne peux rien faire d’autres. Il pourra juste savoir de quoi je suis capable, sil part sans me donner mon argent.
On vend tout, biter-kola et bonbon kola, le tout dans un même plateau. Arachide bouilli, arachide salé : le client à tout à sa portée. Les Oranges, on vend en criant « orange orange » même si en réalité, après avoir goutté, on se rend compte qu’on aurait mieux fait de dire : « citrons , citrons».
Stratégies de commercialisation : « Un capitalisme communiste ».
Technique pour saisir le client : Harcèlement.
Stratégies de conviction : envahissement et séduction.
Manifestations : l’éventuel client est quelque part.
Nous les vendeurs on fait comment ? :
On surgit ! On apparait ! Venant d’où ? je ne sais pas. On se calme, on ne dit rien, ceux qui vendent le bon bouillon ouvrent un peu leurs marmites pour laisser rependre dans l’atmosphère la senteur alléchante du trésor en gite dans la cocotte. « Oh petit tu vends quoi ? », le premier gibier est tombé, bien joué. On compte jusqu’à 5 et on lance : un, deux, trois, quatre, et cinq et hop : carotte fraiches, croquettes, biscuits, arachide, pilé chaud, gigots de bœuf, bouillon de rats, orange, ananas, pastèque… tout fini par « là », arachide-là. Il faut flatter le client, même si c’est un vieux père, on dit : Arachide-là tonton. Et parfois un peu de conseils : « gardez les enfants là ». Peu importe à qui on le dit : même à une religieuse, une sœur ou un prête : Tonton, Gardez les enfants.
Le menu est déjà classé. Entrée : croquettes, arachides. Resistance : pilé, pilé chaud, elle vaut la peine la précision. Dessert : pastèque, orange.
Et si vous ne voulez pas ce menu, tenez-vous tranquilles, à coté il ya les œufs. Attention : le vendeur d’œufs est très sympa en piments. Pourquoi ? son compagnon vend de l’eau glacée. Bien évidement, il est dit que Le leader et l’entrepreneur authentique connaissent les besoins de leurs clients, ils intègrent les désirs du client dans leur politique commerciale et agrandit leurs partenaires pour rehausser la satisfaction de la clientèle. Si le piment chauffe trop, ne vous inquiétez pas, l’attaquant est déjà là : « eau glacée tonton ». Si une goutte se verse sur vous : Lotus tonton… Quand vous en avez marre : l’autre crie : « Efferalgan tonton ». Si ça vous énerve au point où vous voulez partir, c’est un jeune benskineur qui gare devant vous : « grand frère on part ?»
Quel est le profil de celui qui vend ?
- C’est un enfant, un bébé, que dis-je un bambino, qui parfois sèche son matelas avant d’aller à l’attaque. Non faut pas dire des choses pareilles, il n’a pas fait pipi au lit, il a dormi sur un même lit avec ses frères, et la nuit il a plu sur lui-seul.
-Ce sont des jeunes filles, les proies innocentes des croqueurs d’enfants, les gibiers des braconniers érotiques de petits sexes. Oui les petites filles, filles dont l’innocence n’a aucune volonté vengeresse. Que dis-je ? De petites filles frêles, des enfants d’il y’a deux jours. Des filles qu’on portait dans le ventre, et qui maintenant portent de gros plateaux sur la tête, pour vendre leurs marchandises et se faire livrer par inadvertance aux envoutés de l’opprobre.
On vend où ? Et les risques ?
En dessous des camions (la taille nous le permet), dans la bouche des gens, ça sort comme ça sort, l’argent est partout. Dans les gares, sur la chaussée, au trottoir, si je ne vends rien, je suis fini à la maison. Mais je m’expose à la mort, sur la route, devant les yeux des chauffeurs du dimanche, qui conduisent les motos d’aujourd’hui sur les routes d’hier, en cognant les avenirs de demain. Je m’expose à la mort, aux surprises des chocs de la route, devant une foule de sans-cœur qui ne se contemple que prendre des photos pour montrer aux gens que leurs téléphones prennent aussi les photos. Photos avec lesquelles on mendie les mentions « j’aime » dans les réseaux sociaux. Oui je m’expose à la mort, devant des médecins pètesecs qui malgré tes plaies, t’invitent d’abord à t’acheter un carnet. Esclave chez les miens et viandes à croquer chez les sans-cœur. Qui me protège ? Dieu seul. Et même si la route a surfilé à ses extrêmes le voile rouge de la mort, on n’a pas peur. Et même si en vendant ma marchandise je risque me vendre moi-même aux scélérats et aux gangsters qui rodent, ça ne fait rien.
Et pour finir, On vend pour gagner quoi ? De l’argent. Pour en faire quoi ? Je n’en sais rien. Demandez aux banquiers des enfants qui passent leurs vacances dans nos rues.