Opinions of Wednesday, 28 February 2018

Auteur: Dr Simon Pierre Mfomo

Le chef Mukete et son mensonge droit dans les yeux des camerounais

Le chef Mukete Le chef Mukete

À la suite de la sortie du paramount du Sud-Ouest dans les colonnes de Jeune Afrique du 19 février, le politologue réagit.

ur ce qu’il appelle lui-même Sla crise anglophone, on attendait le doyen d’âge de la Chambre haute du Parlement camerounais sur le terrain de la tempérance, qui est celui des sages, comme lui.

Voici que, dans une sortie tonitruante publiée par l’hebdomadaire parisien Jeune Afrique, l’autorité traditionnelle la plus emblématique du Sud-Ouest, prenant négativement date avec l’histoire, sort de son cœur le mauvais trésor pas du
tout fécondant des «Ambazozos» au travers du chapelet d’accusations époustouflantes, parce que patriotiquement éhontées, distribuées aux médias, par la bande à Sisiku Ayuk Tabe comme du prêt-à-porter.

Lesquelles sont, potentiellement, aussi assassines pour la sincérité politique, pour l’unité nationale, le vouloir vivre ensemble, le débat public et le dialogue, qu’une bombe larguée sur un territoire qui n’aurait pas de protection antiaérienne.
Espérant, sans doute, produire dans notre conscience collective ce que le grand psychologue et chercheur américain, Robert Zajonc,qualifie d’«effet de simple exposition».

Malheureusement,et le doyen le sait mieux que quiconque, le Cameroun est protégé par son peuple, son leader visionnaire, éclairé et au dessus de la mêlée, qui en a fait serment, ses indomptables forces de défense et de sécurité, le droit, national et international... Par ailleurs, notre unité est pour cela, irréversible, d’autant plus qu’elle est coulée dans le béton de notre amour incorruptible pour le Cameroun, notre cher et beau pays. De toute évidence donc, comme pour les autres, la manœuvre de déstabilisation du vieux sénateur, qui n’a pas tout dit, par exemple sur les privatisations patrimonialistes qui lui ont permis, et à bien d’autres, de bénéficier de nombreuses actions dans le capital de la société de téléphonie mobile (Mtn), et de financer ainsi, la chaîne de télévision Stv, dont il est le promoteur, comme celles de ses prédécesseurs, n’a pas eu, dans l’opinion publique, de
ressenti positif. En revanche, elle a été rejetée, elle a suscité le dégoût. Elle a été condamnée, parfois avec virulence. Mais, en tout état de cause, les Camerounais s’interrogent. Comment un homme, qui loue la sagesse du président Ahidjo, peut-il feindre d’ignorer aujourd’hui que l’Etat unitaire, dont il désire, sans scrupules, l’enterrement et ceci aux antipodes de la politique unitaire défendue par le Rdpc, le parti dont il est membre élu du comité central, est l’héritage du premier président du Cameroun ? Au point d’affirmer que le fédéralisme à 10 États fédérés est la panacée à nos problèmes ? Pourquoi n’a-t-il pas attendu, d’abord, la restructuration de notre État pour alors accepter les nombreuses fonctions qu’il occupe dans l’appareil d’État (entre autres, PCA de Camtel, membre du Conseil supérieur de la magistrature, membre du Conseil économique et social…)

? De quoi faire crever d’envie des Camerounais, anglophones ou francophones. Comment ayant déjà bu, jusqu’à la lie, le calice de l’Etat unitaire et des largesses de Paul Biya, sans daigner se préoccuper de l’intégration des Anglophones, notamment en renonçant à leur profit, à certains de ses nombreux postes cumulés, peut-il affirmer, rassasié aujourd’hui des délices du pouvoir, que celui de qui il a tant reçu est inaccessible. (Il se fait régulièrement soigner – privilège unique –, aux frais de l’État, aux États-Unis où sa progéniture se forme par ailleurs, grâce à l’occupation des postes sus-évoqués).

Le doyen sait que la division du Cameroun en 10 États fédérés pose un réel problème de financement. Mais comment entend-il le régler, à quelle échéance ? Le chef traditionnel, originaire du Sud-ouest, milite en faveur de l’élargissement des Ambazozos. Mais peut-il nous dire ce qu’il va faire de ceux qui auront pris les armes, contre l’État fédéré du Sud-Ouest ? Tous ces questionnements, et bien d’autres qu’il serait fastidieux d’évoquer ici, que suscitent les propos du sénateur centenaire nommé par le président Biya, suggèrent que l’on est dans l’archétype de ceux que certains spécialistes appellent, en politique, «le mensonge droit dans les yeux».