Opinions of Sunday, 2 October 2016

Auteur: Michel Lobé Etamé

Le doute est-il levé au Gabon ?

Michel Lobé Etamé, journaliste Michel Lobé Etamé, journaliste

Au Gabon, un constat déprimant a émergé après l’annonce de l’élection d’Ali Bongo à la présidence de la République. La Cour Constitutionnelle a validé son élection. Le recomptage des voix que nous avons appelé de tous nos vœux n’a pas alterné le premier résultat. Ali Bongo va poursuivre son parcours présidentiel. Nous devons respecter la souveraineté du Conseil constitutionnel de ce pays.

L’élection présidentielle au Gabon a été d’une violence inouïe, tant sur le plan psychologique que verbal. La presse étrangère s’en est mêlée dans une allégorie qui lui est coutumière en Afrique. Elle a apporté des « preuves » que Le fiston Ali n’est pas gabonais. Pire, elle s’est attelée à nous démontrer que le comptage des voix avait été faussé dans le Haut-Ogooué, fief d’Ali Bongo.

Un journaliste d’investigation, spécialisé dans les « Biens mal acquis » des présidents africains nous a gratifiés de preuves éminemment lacunaires : Ali Bongo n’est pas le fils naturel de son père. Les sources d’informations infaillibles de Pierre Péan ont été mises à mal la semaine dernière. Un démenti a remis en cause les thèses étayées par ce « spécialiste de l’Afrique ». Ali Bongo est bien le rejeton de son père, confirme un vieil instituteur avec des preuves à l’appui. Mais qu’importe ! Le mensonge avait déjà fait son chemin. Il a semé le doute et causé des dégâts.

Pierre Péan s’est illustré en publiant les biens mal acquis des présidents africains en France. Mais quel crédit pouvons-nous aujourd’hui accorder à cet « investigateur » éclectique qui n’a jamais dénoncé les hôtels particuliers et les châteaux des pétroliers du Golf dans l’hexagone et à travers le monde ? Il est vrai que dénoncer les présidents africains offre à cet obscur personnage une tribune inespérée.

Mettre fin aux ingérences étrangères en Afrique

La Cour Constitutionnelle du Gabon vient de confirmer les résultats de l’élection présidentielle au Gabon. Cette décision est souveraine et doit être respectée. Ali Bongo a été démocratiquement élu.

L’Afrique n’a plus besoin de relations paternalistes et condescendantes avec ses mentors d’hier. Les politiciens de tous bords ont saisi l’occasion des élections au Gabon pour dénoncer les bourrages des urnes. Il s’en est suivi une cacophonie ubuesque alimentée par les « amis de l’Afrique ».

Que dire des déclarations légères et sans fondement de Manuel Valls, invité d’une émission « people » ? Il a laissé entendre que le président gabonais Ali Bongo n’avait pas été légitimement élu. Cette intrusion n’est pas acceptable pour un premier ministre de la France. Manuel Valls devrait se rappeler que l’Afrique n’est la propriété de personne. Il aurait dû prendre du recul et attendre le deuxième dépouillement des voix effectué par la Communauté Internationale, l’Union Africaine et le Conseil Constitutionnel du Gabon.

Nous avons aussi appelé de tous nos vœux le recomptage des voix. Nous devons nous plier, en bons démocrates, aux conclusions de la Cour Constitutionnelle du Gabon.

Il faut donc s’interroger sur les déclarations du gouvernement français par la voix de son Ministre des affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault : « La France constate que l’examen des recours n’a pas permis de lever tous les doutes », a-t-il dit dans une déclaration écrite. Monsieur Hérault doute-t-il de la neutralité du Conseil Constitutionnel du Gabon ? Les déclarations des hommes politiques, gardiens traditionnels de la françafrique tout comme les médias versent honteusement dans la surenchère et la nuance sémantique pour disqualifier leur poulain d’hier.

Voilà une déclaration liminaire qui trahit une ingérence dans les affaires d’un pays souverain. La gauche aurait-elle perdu le sens de l’honneur ? Cette déclaration s’ajoute à celle de François Hollande : "Je ne sais pas si cette élection a été truquée, en tout cas elle n’était pas dans les critères de ce que l’on peut appeler des élections démocratiques". Faut-il donc conclure que les élections en Afrique ne sont démocratiques que lorsque le candidat choisi par Paris est plébiscité et élu à 99.99% ?

L’élection d’Ali Bongo ne peut réjouir tous ceux qui aspirent à la souveraineté du Gabon et de l’Afrique. Mais il faut aussi dénoncer avec vigueur tous ceux qui complotent jour et nuit pour maintenir l’Afrique dans l’obscurantisme, la pauvreté et le mensonge permanent.

La liste des présidents africains qui devraient s’effacer de la scène politique est longue. Elle comprend : Mugabé, Biya, Kabila, Eyadéma, Nkurunziza, Déby, Sassou Nguesso, Isaias Afwerki, etc.
L’Afrique attend aux commandes une nouvelle génération de femmes et d’hommes libres qui ne soient plus les produits sous influence des anciens barons de la françafrique.

Le combat est rude mais il est engagé. Aucun changement n’est possible si les ordres continuent de venir de l’extérieur. Les africains doivent se prendre en charge et ne compter que sur eux-mêmes. La position de victimaire nous est fatale. Elle démontre une grande faiblesse de mentalité. C’est pourquoi l’école doit être prioritaire pour libérer les cerveaux des nouvelles générations qui n’ont pas été moulés par « nos ancêtres les gaulois ». Aujourd’hui, nous pouvons affirmer que le temps où les présidents africains allaient chercher leur feuille de route à l’Élysée est révolu.

Pour cela, il faut réhabiliter notre propre histoire, nos valeurs et combattre le nihilisme qui caractérise notre culture. Les cerveaux falsifiés d’une prétendue élite issue de la colonisation ne sont plus adaptés à l’époque actuelle où le droit de chaque citoyen du monde peut inverser le cours de l’histoire. L’émancipation intellectuelle ouvre des voies nouvelles qui nous permettront de réfléchir et de décider par nous-même et pour notre Afrique.