Macron a été accueilli à l'aéroport de Yaoundé par les autorités camerounaises, mais aussi par une foule de danseurs et de danseuses qui se sont transpirés pour le président. De quoi choquer Framboise Doumbé Ding qui se déchaîne dans une tribune.
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"Ce que nous avons vu a Yaoundé à l'occasion de la visite du Président Français choquerait même les Français de bonne foi. Car jamais on à vu des humains manquer autant le sens de la dignité.
Il fallait bien-sûr accueillir le Président Français avec les marques de civilité qui sied en de pareilles circonstances. Mais fallait-il aller jusqu'à ce niveau de faste juste pour accueillir un homme qui vient pourtant renouveler le contrat d'asservissement de notre pays ?
C'est pour quand, le jour où des Français amassés par centaines dans le froid d'un aéroport Parisien danseront jusqu'à minuit pour célébrer l'arrivée d'un Président Camerounais ? C'est pour quand ?
J'ai eu honte comme jamais avant, de voir mes compatriotes massés par centaines, dansant à la folie dans le froid de 22h à l'aéroport de Nsimalen où ils attendaient un homme qui vient pourtant soumettre leur pays à la dépendance politique et économique de la France . On eu cru que nous étions en 1950 . Époque de l'émerveillement devant l'arrivée du grand blanc qui façonne les destins politiques et économiques des peuples colonisés.
Ô que non ! Nous sommes bien en 2022 . Soit plus de 60 ans après la fin de la colonisation. Pourtant nous avons gardé chevillé au corps la mentalité du colonisé. La mentalité de l'esclave qui aime son maître.
60 ans après les indépendances, le temps est passé et est supposé avoir mûri notre peuple en gravant dans sa mémoire de façon perceptible le souvenir douloureux de sa relation avec la France. Cette France qui a un passé colonialiste et esclavagiste. Cette France qui a contribué à décimer et à déshumaniser les nôtres. Cette France qui est à l'origine de la mort de plus de 500 mille Camerounais à l'époque du maquis. Cette France arrogante qui n'a jamais cru nécessaire de s'excuser de ses crimes au Cameroun.
C'est cette France qui est accueillie au Cameroun aujourd'hui dans une ambiance de fête avec des danseurs endiablés qui ont passés toute leur soirée dans le froid glacial de 22h pour attendre dans une ferveur démesurée les bourreaux de leurs ancêtres. C'est à dire que des gens qui ont tué vos parents , violé vos sœurs, pillé votre maison annoncent leur venue sur le lieu du crime où Ils n'entendent même pas s'excuser de leurs crimes, et vous vous mettez à danser sans jamais envisager d'exprimer votre colère ou de leur demander le moindre compte . Pourtant le violeur n'a jamais exprimé le moindre remord après tous ses crimes sur vos parents.
Mais quelle misère morale !
Quelle indignité !
Quelle honte !
Comment ne pas croire que Senghor avait raison : <
Quand j'ai vu ces danseurs et tout le faste que vous imaginez , j'ai pensé à Um Nyobe, Roland Moumie, Ernest Ouandie , Ossende Affana et tous ces compatriotes qui sont morts pour que nous soyons des femmes et des hommes libres et dignes de respect. J'ai imaginé leurs âmes planant sur le ciel du Cameroun et regardant tout le faste de l'accueil réservé à leurs bourreaux par ceux là même pour qui ils se sont battus jusqu'au sacrifice suprême . De quoi se retourner dans leur tombe et mourir une deuxième fois tués cette fois-ci par la désinvolture et l'inconscience collective de ceux pour qui ils sont morts.
J'ai imaginé l'instant de leur dernier soupir et ce sentiment de trahison qui a pu les gagner. Cette indignité dont on a fait montre à Yaoundé à l'occasion de la visite du Président Français. Cette incapacité morale de nous mettre à la hauteur de tous ces Upecistes qui sont morts pour nous.
Non pas qu'il ne fallait pas accueillir la France sur notre territoire. Mais parce que nous avons franchi le mur de l'indécence en manquant d'égards pour la mémoire de nos héros de la lutte anti colonialiste tués par la France. Nous avons déshonoré leur mémoire en dansant sur le lieu du crime avec leurs bourreaux. Nous nous sommes tout aussi humiliés devant cette France en montrant à quel point nous n'avons aucun sens de l'honneur et de la dignité. Et surtout combien nous sommes des lâches. Aucune pancarte réclamant des comptes à la France pour ses crimes au Cameroun. Juste des danseurs transpirant l'ignorance à grosses gouttes. Les danseurs du régime RDPC.
Nous n'avons pas eu le courage de demander des comptes aux bourreaux de nos compatriotes. Pire, nous avons dansé jusqu'à minuit pour les accueillir. Pourquoi devraient-ils avoir des regrets pour leurs crimes , et pourquoi devraient-ils nous respecter ?
Une société qui n'a pas de mémoire.
Ceux qui sont arrivés au Cameroun à l'occasion de la visite du Président Français ont certainement vu le monument Leclerc, le boulevard Leclerc ou le Lycée Lycée Leclerc entre autres. C'est à dire qu'ils ont dû remarquer que dans ce pays prétendument indépendant, tout est à la gloire de l'oppresseur et colonisateur Français et rien pour ceux qui sont morts pour nous délivrer de l'oppression coloniale . C'est la symbolique de l'esclave qui aime son maître et qui jette en prison tous ceux qui osent lutter pour la liberté.
Le Cameroun que nous avons vu lors de la visite du Président Macron est un Cameroun sans mémoire , ignorant de son histoire et totalement indigne des sacrifices de ses fils les plus illustres : Um Nyobe, Ouandie, Ossende ou Moumie. Ce Cameroun là n'est pas prêt pour la liberté. Il ne peut qu'être asservi. Tant nous avons montré dans cette désinvolture, la profondeur abyssal de notre inconscience . De notre immaturité, de notre légèreté. Tout cela parce qu'un homme à besoin de la bénédiction de la France pour s'accrocher au pouvoir quitte à détruire tout ce qui reste encore de dignité dignité au peuple Camerounais.
Ceci est un message à notre conscience collective.
Ce n'est pas pour ce Cameroun servile, indigne et à genoux devant la France que nos illustres devanciers se sont battus jusqu'à la mort. Nous devons reprendre notre destin en main. Le leadership actuellement à la tête de l'Etat n'est pas à la hauteur de la grandeur du Cameroun. Il faut un nouveau leadership et cela doit passer par une ferme résistance à toute tentative de transmission dynastique du pouvoir. Le Cameroun notre pays ne mérite pas de vivre à genoux. C'est à nous de le mettre debout. Nous pouvons le faire. Nous devons le faire car personne d'autre ne le fera à notre place."