Ce type d’exercice devrait être courant. Autant qu’un recensement de la population et de l’habitat. Ici, l’Etat a besoin de connaître sa population, sa répartition géographique, par sexe et par tranches d’âge.
Là, il s’agit d’identifier les produits agricoles, pastoraux, par région, département, arrondissement, village. Etablir quels sont les types d’exploitations qui les portent, les surfaces cultivées, par qui, comment, la production qui en résulte, les potentialités en friches...
Ici et là, ces informations sont essentielles à toute politique agricole, à tout projet dans le secteur. Les données statistiques sont, on le sait, incontournables dès lors qu’on voudrait planifier des interventions cohérentes.
Pour le cas d’espèce, le président de la République a signé, en date du 29 juin 2015, un décret instituant le Recensement général de l’agriculture et de l’élevage (Rgae). Sur les cinq objets justifiant cette initiative, l’on pourrait s’attarder sur le premier et le dernier.
Celui-ci est de « contribuer à la mise en place du Système permanent et intégré de statistiques agropastorales (Spisa) ; dispositif qui fournira chaque année des données actualisées sur les prévisions, la production et les superficies agricoles, le cheptel et l’aquaculture, les revenus des ménages, leur situation alimentaire et nutritionnelle, les prix, etc. »
Le premier objet relevé dans le texte du 29 juin est « de produire des informations statistiques structurelles fiables, pertinentes et suffisamment désagrégées ( régions, département, arrondissement, village, etc) sur toutes les exploitations agropastorales et leur environnement. »
Ce développement permet de constater que ce recensement ira jusqu’au détail, afin de fournir les données les plus vastes et les plus fiables qui soient. De même qu’il ne s’agira pas d’une opération ponctuelle.
Mais bien plus d’une action pérenne actualisant les données chaque année. Lorsqu’on s’intéresse à l’organe de gestion du Rgae et à ses démembrements, l’on se rend compte qu’ils impliquent, à la base, des acteurs de terrain. A l’échelle locale, est mise sur orbite une commission technique d’arrondissement.
Cette commission est composée d’hommes et de femmes qui travaillent au quotidien avec les populations. A l’instar du délégué de l’agriculture et du délégué de l’élevage. C’est un gage d’efficacité pour peu que les intéressés prennent à cœur leur mission, sans en dévoyer l’objet pour des intérêts égoïstes.
Ainsi conçu et mené, le Rgae devrait fournir une carte agropastorale exacte du Cameroun. Ces informations seront d’une grande utilité aussi bien pour le gouvernement que pour les populations. Ces dernières, à l’appréhension des données, découvriront sans doute de nouvelles opportunités et l’émulation nécessaire pour reculer des barrières à leur activité.
L’on pourra, en effet, se rendre compte que certains clichés ressassés depuis l’époque coloniale sont battus en brèche. A l’instar de partie méridionale du pays où l’élevage de bovins était réputé impossible à « cause du manque de pâturages et de la moche tsé-tsé ».
Cette assertion a été essorée au contact des nombreuses initiatives qui ont essaimé ça et là. La partie septentrionale du pays, elle aussi, où l’activité agricole était prétendue marginale, nourrit d’oignons, cultivés dans la steppe sahélienne, l’ensemble du pays et alimente des réseaux d’exportation vers des pays voisins. On pourrait multiplier ces exemples.
Au gouvernement aussi, le Rgae permettra de voir clair pour mieux cibler les interventions. Sous des statistiques nationales se cachent parfois, à l’échelle locale, des biais dus à des nombreux facteurs dont la désorganisation des marchés. Il en est ainsi par exemple du phénomène du coxage qui efface la traçabilité réelle de certains produits comme le cacao.