Opinions of Tuesday, 12 September 2017

Auteur: Michel Biem Tong

Opération Epervier: des universitaires étalent leurs lacunes sur Canal2

La lettre des patriarches du Mfoundi était le principal sujet de discussion La lettre des patriarches du Mfoundi était le principal sujet de discussion

Ce lundi vers 22 h, j'ai regardé la rediffusion de l'émission de débat Canal presse diffusée sur la chaîne de TV privée camerounaise Canal2 international. Au menu des échanges, la lettre des patriarches Ewondo du Mfoundi adressée à Paul Biya demandant la libération des élites Béti incarcérées dans le cadre de la lutte contre la corruption baptisée Opération Épervier au Cameroun, à la suite de l'arrêt des poursuite contre des militants anglophones décidé par le chef de l'Etat.

J'ai été surpris que des universitaires, des hommes de science invités sur le plateau ne puissent pas voir plus loin que le discours convenu au sujet de l'opération épervier : "on ne peut pas libérer des personnes qui ont détourné des milliards", a-t-on entendu presqu'en chœur de la bouche de ces "docta".Comme s'il suffit d'être poursuivi ou accusé d'avoir commis un crime pour être criminel. Un universitaire qui perd sa fibre d'aiguillon de la société et se fait ainsi le porte-voix de la propagande officielle orchestrée par un pouvoir dictatorial est un "docteur ou un professeur en nullité".

Ainsi donc, l'ancien secrétaire général à la présidence, Jean Marie Atangana Mebara, peut continuer à ployer dans sa cellule de la prison de Yaoundé sous le poids de multiples condamnations pour un argent débloqué par quelqu'un d'autre sans que cela n'émeuve nos fameux docteurs et professeurs en bavardologie ?

L'ancien ministre de la Santé, Urbain Olanguena Awono peut être condamné à 15 ans de prison pour des faits de détournement annulé par la Cour suprême et à 20 ans de prison pour un détournement opéré par un faussaire en cavale qui a reconnu avoir imité la signature d'Olanguena, sans que cela ne préoccupe ces hommes de science tout comme les laisse indifférents le sort de Polycarpe Abah Abah, ancien directeur des impôts, dont la multitude de parodies de procès ne révèle aucune preuve de détournement de fonds publics.

Pour eux, tout ce que la justice aux ordres du dictateur PAUL Biya dit ne peut qu'être vrai. Un autre "docta", paneliste de cette émission de débat, s'est même permis de dire que "si Paul Biya a décidé de faire arrêter les voleurs...". Comme si cela va de soi que dans un État de droit dont la constitution consacre la séparation des pouvoirs, le chef de l'exécutif s'immisce dans une procédure judiciaire.

Un tel conformisme ne cadre pas avec l'esprit universitaire et ayons le courage de dire que ceux qui ont abordé cette question dans l'émission Canal Presse ont failli à leur devoir de vérité envers le Peuple camerounais.

La lettre des patriarches du Mfoundi a pourtant le mérite, malgré les relents de repli identitaire, de soulever même inconsciemment un problème que je dénonce depuis toujours : l'instrumentalisation de la justice par une famille qui veut confisquer le pouvoir par tous les moyens y compris en confinant à une éternelle vie carcérale de parfaits innocents. Que nos intellectuels des plateaux de radio ou de télévision l'ignorent ou feignent de l'ignorer est regrettable.