Opinions of Tuesday, 12 July 2022

Auteur: www.camerounweb.com

Parlement : Cavayé Yeguié et les députés paient cher leur attitude face au MINFI

Les députés ont haussé le ton à l'Assemblée nationale Les députés ont haussé le ton à l'Assemblée nationale


• Les députés se sont récemment rebellés

• Ils ont observé un blocus au Parlement

• Louis-Marie Kakdeu en parle

Depuis quelques jours, le ministre des Finances Louis-Paul Motaze et les parlementaires ont fait parler d’eux avec un Débat d’orientation budgétaire (DOB). Le président de l’Assemblée nationale Cavayé Yeguié n’a rien pu faire face à des députés qui étaient cette fois-ci furieux du traitement que leur réserve régulièrement le gouvernement de façon totalement irrespectueuse. L’économiste Louis-Marie Kakdeu a publié un texte sur sa page Facebook. Dans celui-ci, il corrige Cavayé Yegué qui n’est pas de son point de vue, un vrai politicien.

Cameroun : Pourquoi est-ce que le Débat d’Orientation Budgétaire (DOB) était si important à l’Assemblée nationale ?

En matière de politique budgétaire, le DOB est l’occasion donnée aux élus (et par ricochet au peuple) pour exprimer leur avis sur les GRANDES LIGNES du budget national. Pour faire simple, c’est en ce moment-là qu’il faut se battre par TOUS LES MOYENS pour faire inscrire les préoccupations du peuple (« de son village ou de sa région ») dans le budget.

Or, les gens, y compris au RDPC, l’ignorent, ce qui constitue une erreur politique majeure dans la vie de la Nation. Un pays NORMAL ne se gère pas en implorant à chaque fois la magnanimité de « Son Excellence Paul Biya » ou de « ses hautes instructions » qui constituent en matière de Finances ce qu’il convient d’appeler « indiscipline budgétaire ». Un Président de la République ne peut VALABLEMENT pas donner des instructions qui vont A CHAQUE FOIS à l’encontre des lignes budgétaires arrêtées (bizarrement par lui-même qui dispose de la « Majorité confortable »).

C’est ce désordre budgétaire qui nous maintient au FMI dont la mission principale n’est rien d’autre que d’assurer la DISCIPLINE BUDGETAIRE. C’est comme si vous organisiez vous-mêmes le désordre chez vous pour ensuite vous payer les services d’un Consultant chargé de ramener l’ordre. C’est le paradoxe camerounais. Tout ça, parce que l’on ne comprend pas la Finance publique d’une part et le rôle d’un Parlement d’autre part.

Même l’Exécutif a tout intérêt à favoriser le DOB pour être sûr qu’au courant de l’année, une revendication sociale légitime ne viendra pas imposer l’indiscipline budgétaire au gouvernement comme c’est toujours le cas au Cameroun. Difficilement en matière d’économie et de finances, RIEN D’IMPREVISIBLE N’ARRIVE. Même le choc externe que nous vivons aujourd’hui était largement prévisible avec la nature extravertie de notre économie.

Je voudrais dire en clair que c’est parce que l’orientation budgétaire est mal faite qu’on entend souvent les plaintes de « tribalisme », « d’exclusion » ou de marginalisation au Cameroun. Dans la NORMALITE des choses, le DOB permet de réaliser 4 choses : (1) L’évaluation des recettes et des dépenses de l’État. Sinon, comment pouvez-vous être pertinent dans vos revendications, au sein du pouvoir en place comme de l’opposition ou de la société civile, si vous ne connaissez pas les POSSIBILITES de l’État ? (2) L’évaluation de l’équilibre budgétaire : C’est la question de savoir si le budget sera viable. Est-ce que l’État fera la POLITIQUE DE SES MOYENS ? (3) L’évaluation du niveau d’endettement : Est-ce que la dette de l’État sera soutenable ? Est-ce normal de doubler l’endettement du pays en moins de 5 ans comme c’est le cas actuellement ? (4) La planification et la programmation des investissements du pays : Au regard de ce qui précède, que peut-on alors envisager de faire ou de ne pas faire ?

Vous comprenez que les gens ont l’habitude de discuter sans comprendre. Surtout que l’occasion de ce DOB était de discuter du budget programme sur 3 ans (2023-2025). Cela veut dire que si l’on s’en tient à la logique de la DISCIPLINE BUDGETAIRE, alors on sera tenu de respecter les lignes budgétaires adoptées cette année jusqu’en 2025. Malheureusement, le FMI est là et on n’aura pas d’autres choix que l’austérité. Déjà, on annonce l’arrivée des « contrats de performance ». On y reviendra.

Donc, nous blaguons souvent avec des sujets importants. Les députés de l’Union pour le Changement (UPC) ont joué leur partition. Ils étaient entièrement dans leur rôle. A chacun son rôle ! Pourquoi seulement maintenant ? Mais, quelle question ! Nous disions tous qu’il fallait que ça commence, non ? D’ici au vote du budget en novembre 2022, je m’attends à ce que le « Tribalisme POSITIF » s’exprime véritablement à travers le pays à savoir que le NOUS que certains aiment incarner doit s’assurer que ses préoccupations ont été intégrées dans le budget-programme. Je vais citer deux exemples (dans l’Extrême-Nord et le Sud-Ouest) :

Dans la ville de Maroua où j’enseigne, je ne suis pas sûr que l’on a 10 Km de route bitumée. Question : Comment peut-on comprendre que les députés du Diamaré aient acclamé ce texte inéquitable au point de menacer l’honorable Joshua Osih qui a mené la résistance ? Si Cavayé Yegué lui-même, le PAN, était un vrai politicien au service de son peuple (et non de ses intérêts personnels et de ceux de sa famille) alors, il aurait fait le ponce-pilatisme (pour échapper à la prétendue discipline de son parti) en « renvoyant/condamnant » le MINFI et son texte. Après, vous allez entendre que les Nordistes n'ont pas le pouvoir ou que les Sudistes n’aiment pas le Nord. Qui a ce pouvoir budgétaire et ne sait pas l’exercer depuis 30 ans qu’il est au perchoir ?

Allons dans le Sud-Ouest et prenons le département où le pays puise son pétrole : Le Ndian. En 2022, je ne suis pas sûr qu’il y ait un seul kilomètre de route bitumé dans tout ce département. Entre Kumba et Ekondo Titi, il y a 50 km non bitumés. Je ne parle même pas de la capitale Mudemba qui est à 80 km plus loin. Expliqué ainsi, l’on ne perçoit pas bien la discrimination. En fait, lorsque l’on sort de Kumba, le goudron s’arrête et l’on continue dans la boue pour aller sur les terres qui nous fournissent le pétrole dont l’argent est géré par la fameuse SNH à Yaoundé (tout le monde parle maintenant de l’affaire GLENCORE en espérant que cela fera tomber le régime). Voilà le visage de la discrimination. Et après, on va dire que les citoyens qui s’indignent au niveau local sont des terroristes. Et après, on va dépenser des centaines de milliards de FCFA pour aller lutter contre ce terrorisme. Quel gâchis ! Et après, vous allez entendre les OPPORTUNISTES même au sein de l’opposition dire qu’ils aiment les « Anglophones » : avec la bouche ? Ou qu’il faut le dialogue : Le dialogue dans le vide ? ZERO DIALOGUE A FAIRE SANS POLITIQUE D’INCLUSION !

Si vous aimez tant les Anglophones (plus que les Anglophones eux-mêmes), alors vous devez vous assurer que leurs préoccupations élémentaires ont été intégrées dans le budget national et qu’ils jouiront DESORMAIS de leurs droits (de par la loi) sans avoir à perdre leur DIGNITE (à travers le clientélisme ou le griotisme imposé). C’est tout ce qu’ils demandent ! ET C’EST PENDANT LE DOB QU’IL FAUT MONTRER CETTE BONNE VOLONTE DE SOUTENIR LES ANGLOPHONES ET NON LORSQUE L’ARMEE AURAIT FAIT UNE BAVURE qui peut arriver dans une guerre ! J’aurai pu parler des préoccupations réelles dans le Sud, l’Est, le Littoral, etc.

Soyons sérieux ! Si nous voulons un pays où la dignité des citoyens est garantie (c’est-à-dire un pays dans lequel les gens n’ont pas besoin de se compromettre pour exister), alors nous devons désormais faire en sorte que le DOB soit plus incisif que ce que l’on a pu voir à l’Assemblée. Et NOUS AVONS ENCORE 4 MOIS POUR NOUS RATTRAPER D’ICI LE VOTE DU BUDGET EN NOVEMBER 2022. En l’état, on a l’impression que certains au gouvernement prépare un « coup d’État » dans la mesure où la question de la cherté du coût de vie n’a pas été adressée.

L’économie du pays est extravertie et le déficit de production est très important : 700 000 tonnes de défit de production du maïs, 1,1 million de tonnes de déficit de riz, 3 millions de tonnes de déficit du manioc, 1 million de tonnes de déficit d’huile de palme, 350 000 tonnes de déficit de poisson, 900 000 tonnes de déficit de blé, etc. La crise alimentaire au Cameroun est garantie d’ici peu.

Le pays important 100% de son besoin en blé, 97% de son besoin en riz, 90% de son besoin en lait, etc. Pire, l’activité économique est informelle à plus de 90%. Vous comprenez que LA SITUATION EST INTENABLE ! Et curieusement, le gouvernement n’a rien prévu de pertinent pour booster considérablement la production locale compte tenu des fluctuations observées sur le marché international. On observe que pour sauver le POUVOIR en place, les « hautes instructions de la présidence » se sont vues en train d’être obligées dans la foulée du DOB de procéder par voie de « SUBVENTION » pour encourager la culture du blé. Les choses de ce pays. Quelle incongruité !

La question est de savoir comment dans un paradis d’investissement comme celui-ci, tout ce que le gouvernement trouve à faire, c’est de donner l’incitation pour produire la banane de Njombé-Penja (que l’on ne mange pas au Cameroun) ou pour importer des préfabriqués comme les serres ? Entre nous, c’est dans les serres (agriculture urbaine) que l’on produira les 1,1 million de tonnes déficitaires de riz au moment où le MINADER annonce la disponibilité de 200 000 hectares de terre rizicole au Cameroun ? Soyons sérieux ! Si nous laissons passer ce genre de fautes gouvernementales pour après dire que c’est la tête de Joshua Osih ou des Betis, des Bamilékés, des Francophones, des Sudistes, etc., qui nous énervait, alors c’est que nous sommes TOUTES et TOUS cons appelés à périr comme des cons (excusez-moi du terme !).

D’ailleurs, l’acte de la Présidence de la République montre que le MINFI a été immédiatement désavoué après le DOB. Cela montre aussi que c’est nous qui sommes « cons » et non les gens de la Présidence qui ont la LUCIDITE de protéger leur pouvoir (contre ce coup d’État préparé au gouvernement). Sauf que, techniquement, ce n’est malheureusement pas une « MODIQUE » subvention de FCFA 10 milliards échelonnée sur 5 ans qui permettra de résoudre le problème de déficit de production en vue de prévenir une crise alimentaire au Cameroun. C’est bel et bien à travers la loi de finances que l’on résout ce genre de problèmes en attirant l’investissement privé. Je suis convaincu que si l’on donnait les mêmes 7 ans d’exonération fiscale attribuée à la filière banane (que l’on ne mange pas au Cameroun) à d’autres filières (que l’on mange au Cameroun) comme le riz, le blé, le maïs, l’huile de palme, le manioc, le sorgho, etc., alors l’on attirerait au moins FCFA 1000 milliards d’Investissements Directs Étrangers (IDE) et de capitaux nationaux. Et c’est ainsi que d’autres pays se développent.

En matière d’investissements productifs, FCFA 10 milliards représente L’ARGENT DE BEIGNETS ! A mon petit niveau individuel (je n’ai pas encore les moyens de l’État), j’ai déjà des Israéliens et des Turcs qui sont intéressés par la production de blé au Cameroun. Pourquoi ne pas assainir l’environnement des affaires pour accueillir ces capitaux qui veulent venir gratuitement à NOUS ? Je ne parle même pas des Nationaux qui sont aujourd’hui focalisés sur les importations massives parce que les conditions de production locales sont difficiles. Congelcam par exemple que j’ai acculé à un moment donné m’a expliqué comment il était difficile de rendre rentable la production locale du poisson. Honnêtement, il a raison en l’état du cadre des affaires où seules les importations paient ! Chacun année, la PRESSION FISCALE augmente sur les entreprises locales au lieu de baisser. C’est incompréhensible ! C’est pourtant la politique budgétaire et fiscale qui permet de développer un pays et non le clientélisme politique ou le griotisme que l’on observe de nos jours.

Choisissons LE CHEMIN DE LA DIGNITE et de la RAISON pour développer notre pays. Rejetons l’émotion, l’extrémisme radical ou l’endoctrinement qui desservent la CAUSE. On ne peut pas sortir de la brousse à Droite pour aller entrer en brousse à Gauche sous prétexte que l’on est déjà à Gauche. Tous ceux qui conduisent savent que le ravin peut être à Gauche ou à Droite ! Nous devons rester sur le goudron du BON CHEMIN vers notre émergence. C’est dans la loi que cela se passe. C’est au Parlement que cela se passe.

Un MINFI normal doit être heureux de se présenter devant les représentants du peuple au Parlement non pas pour faire un « séminaire » et accueillir des « acclamations » mais, pour recueillir les préoccupations de nos populations locales et de nos citoyens de la diaspora en vue de proposer au final une LOI DES FINANCES INCLUSIVE. C’est une exigence de la BONNE GOUVERNANCE. C’est ce que nous ferons le moment venu et c’est de ça qu’il s’agit.