Opinions of Friday, 14 July 2017

Auteur: Christian Ntimbane Bomo

Présidentielle 2018: Maurice Kamto entre espoir et illusion

C'est le fameux effet androïde. Le nouvel androïde vieillit l'ancien C'est le fameux effet androïde. Le nouvel androïde vieillit l'ancien

Fin 2011 ou début 2012 qui ne souvient plus de cette déclaration frappante du Professeur Maurice Kamto, ancien Ministre démissionnaire du gouvernement : " Quelque soit la durée de la nuit ,le jour finit toujours par se lever". L'homme venait d'annoncer au peuple camerounais, la création d'un nouveau parti qui fera désormais la politique autrement.

De nombreux intellectuels, jeunes élites , membre de la diaspora affluent de toutes parts et de toutes régions pour adhérer à cette vision portée par un éminent, sinon le plus grand des juristes internationaux que notre pays ait jamais connu . Plus est, auréolé d'une reconnaissance patriotique à la suite de ses retentissantes plaidoiries ayant contribué à donner la victoire judiciaire au Cameroun dans l'épineuse affaire qui l'opposait au Nigéria relativement à la dispute de la presqu'île de Bakassi. Le Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (M.R.C) était né.

Le nouveau parti impressionne et fait frémir d'inquiétudes les affidés et autres caciques du RDPC le parti du Président Biya. Quelques autorités administratives y trouvent une belle occasion pour manifester leur zèle afin de prouver leur attachement au pouvoir de Yaoundé, et ce dans l'espoir d'une promotion. De nombreux réunions et meetings du MRC sont interdits. Le parti incarne désormais la vraie opposition au régime de Yaoundé; effaçant au passage le SDF dont le leader Ni John Fru Ndi est accusé à tort ou à raison d'être devenu Biya compatible. C'est dans cet intervalle que surviennent les élections législatives et municipales. Les attentes de positionnement du MRC dans l’échiquier politique camerounais sont importantes.

Peu ou prou, le parti s'en sort avec un député à l'assemblée nationale et de quelques conseillers municipaux, preuve de son ancrage local.Le fait le plus marquant de cette vigueur politique c'est quand le MRC réussit l'exploit de mettre le RDPC en difficultés dans l'un de ses bastions les plus solides Monatélé dans la lékié où le jeune Mrciste, ancien président des mouvements estudiantins Emilien Atangana remporte haut la main les élections à la Mairie de Monatélé.
Mais la suite ? Pourrait-on dire : "Aussitôt apparu, aussitôt disparu " ?

PREMIÈRE CAUSE DE L'AFFAIBLISSEMENT DE MAURICE KAMTO : LE MANQUE DE TACT POLITIQUE DANS LA GESTION DES CONFLITS INTERNES AU PARTI;
A peine sortis des élections, la presse et les médias sont inondés d'une affaire de plainte pour détournement de la modique caution de près de 1 million représentant les frais de candidature aux élections contre le jeune Atangana Emilien qui a réussi , il faut le reconnaître l'exploit de faire gagner le parti du Président Kamto dans une partie du département de la Lékié considéré comme le département le plus fidèle au régime du renouveau. Ce jeune homme est traîné et humilié devant les tribunaux par un homme de l'ombre du Président Kamto, le professeur FOGUE. Cette affaire est très mal perçue dans l'opinion. Une bonne occasion était donnée aux thuriféraires du tribalisme pour en voir "une chasse des bétis par le parti du bamiléké Kamto". Malgré des appels à l'abandon des poursuites comme ceux de Fabien Assigana, un membre du directoire, le Professeur Kamto restera de marbre. S'en est suivi des démissions en cascade de ces jeunes originaires des régions du centre qui avaient adhéré massivement à ce parti. Or cette image du MRC fortement implantée dans le fief du RDPC était le symbole fort d'un MRC parti national sans coloration tribale.

2ème CAUSE D'AFFAIBLISSEMENT : L 'EFFECTIVITÉ DE LA GESTION DU PARTI PAR DES RESSORTISSANTS D'UNE MÊME RÉGION :

Il ressortait régulièrement des récriminations de nombreux anciens cadres démissionnaires du MRC dont Fabien ASSIGANA que le MRC était en réalité l'affaire de Kamto et de Fogue tous originaires de l'ouest. Cette très grande visibilité ostentatoire du Professeur FOGUE aura certainement conforté à donner au MRC, l'image d'un parti tribal dont certaines personnes auraient bien voulu le caractériser pour l'affaiblir politiquement. A cela, s'ajoute l'exubérance des jeunes militants originaires de Baham, département dont serait aussi originaire le Professeur Kamto qui ont passé leur temps à stigmatiser la tribu béti sur les réseaux sociaux. Ils se reconnaîtront et vous les reconnaîtrez. Au Cameroun, le facteur tribal est une donnée essentielle pour faire de la politique. L'équilibre régional étant ancré dans les habitudes citoyennes, toute inflexion à ce principe même au sein des partis politiques est considérée comme du tribalisme.

3ème CAUSE D'AFFAIBLISSEMENT : LE MANQUE DE PRISE DE RISQUE DANS LA LUTTE POUR PLUS DE LIBERTÉ.

De nombreux observateurs se seraient attendus à voir le Profeseur Kamto, homme de droit, porter le flambeau de la lutte pour plus de libertés au Cameroun. C'est le cas lors de l'adoption de la loi sur le terrorisme qui contient dans certaines de ses dispositions des risques d'atteintes aux libertés démocratiques et individuelles. Le Professeur s'est limité à faire des condamnations intellectuelles et à écrire beaucoup comme s'il était à l'université. Or le bas peuple ne lit pas toutes ces littératures. Les vrais leaders politiques qui ont réussi à ébranler les pouvoirs en place sont ceux qui ont pris le risque de manifester publiquement contre certaines décisions gouvernementales, même au risque de faire la prison. Abdoulaye Wade, Laurent Gbagbo ont à plusieurs fois fait la prison au Sénégal et en Côte d'Ivoire. Un vrai opposant politique en Afrique passe au moins une semaine en cellule.

QUATRIÈME CAUSE D'AFFAIBLISSEMENT : LE MODÈLE MACRON.

N'en déplaise, l'élection de Macron en France a impacté le choix politique des camerounais. Les leaders politiques d'une certaine génération ont et auront du mal à susciter un engouement populaire autour de leur candidature. C'est le fameux effet androïde. Le nouvel androïde vieillit l'ancien.