Agé de 51 ans, George Weah a été élu président de la République du Liberia le 28 décembre dernier.
« Mister George », comme on l’a surnommé dans les arènes de football, est un modèle abouti de talent et d’opiniâtreté, tant sur le plan sportif que politique. Tous ses coéquipiers du Tonnerre Kalara Club de Yaoundé (Tkc) reconnaissent son génie et son humilité.
Mais aussi la résilience de celui qui a commencé sa carrière comme gardien de buts dans un club de banlieue de Monrovia, avant d’exploser au poste d’avant-centre au sein du Tkc, d’affoler les statistiques dans de grands clubs européens, et surtout, d’être aujourd’hui l’unique Africain à avoir remporté un Ballon d’or.
Patriote ? Weah l’est assurément. Cet « enfant de ghetto », qui a vendu des chewing-gums et des cartes téléphoniques, aurait pu jouer pour l’équipe nationale du Cameroun, les Lions indomptables. Mais, en dépit de ses rapports privilégiés avec le sélectionneur d’alors, Claude Leroy, il est resté attaché à son pays, le Liberia, jadis déchiré par la guerre civile.
Lorsqu’il s’engage en politique après avoir raccroché les crampons, beaucoup lui prédisent une reconversion ratée. Lui-même se berce de l’illusion qu’il peut tutoyer automatiquement la lune, comme jadis en sport.
Manque de pot ! En 2005, il est battu par Ellen Johnson Sirleaf au second tour de l’élection présidentielle, laquelle devient la première femme chef d’Etat en Afrique. Six ans après, l’ex-ambassadeur de bonne volonté de l’Unicef perd à nouveau, cette fois à la vice-présidence.
Finalement conscient de ce que ses prouesses sur les pelouses ne font pas nécessairement de lui une bête politique, George Weah repart à l’école et décroche un diplôme de management en Floride (Etats-Unis) en 2011. En 2014, il est élu sénateur du Montserrado, dans la capitale.
Le rêve de « Mister George » de devenir président ne s’évanouit pas. Il sait que la Constitution proscrit à la présidente sortante de faire plus de deux mandats. Le prix Nobel de la paix évite de voir son nom figurer sur la liste peu glorieuse des chefs d’Etats africains qui ont révisé la Constitution pour briguer un nouveau mandat.
Déjà populaire auprès des couches défavorisées (62% de Libériens vivent sous le seuil de pauvreté), Weah se rapproche encore plus d’elles. Début 2017, il entreprend des tournées en Afrique et en Occident. Il consulte des chefs d’Etats influents.
George Weah comprend surtout l’importance des alliances en politique. La vedette du football devenue star en politique ratisse large, parfois au-delà de ses convictions de départ. Le choix de Jewel Howard-Taylor, l’ex-épouse du sanguinaire Charles Taylor (condamné à 50 ans de prison pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité), comme colistière (vice-présidente) fait des vagues.
Mais, les proches du footballeur arguent que cette sénatrice et économiste chevronnée n’a pas les mains tachées de sang et que sa cote de popularité est grande auprès de l’électorat. L’option Taylor va s’avérer payante. Notre pays va connaître cette année un nouveau cycle électoral.
Sans postuler que les règles électorales sont les mêmes au Cameroun qu’au Liberia, il est possible qu’un George Weah émerge à l’issue de la prochaine élection présidentielle. A condition que ceux qui se sentent un destin na-
tional travaillent à réunir les qualités de l’icône libérienne et planétaire.