Opinions of Sunday, 10 April 2022

Auteur: Michel Biem Tong

Putsch manqué du 6 avril: les confidences inédites de Fochivé, ancien patron des renseignements

Jean Fochivé était le patron des renseignements de Paul Biya Jean Fochivé était le patron des renseignements de Paul Biya

Dans une tribune publiée ce dimanche 10 avril, le journaliste d'investigation Michel Biem Tong a fait des révélations sur "Essigan", un clan ethnofascite béti qui a été derrière le coup d'Etat manqué du 6 avril 1997 au Cameroun. La tribune de Biem Tong a été écrite à partir des révélations faites par l'ancien chef des renseignements camerounais Jean Fochivé. Lisons plutôt.

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"Pour Jean Fochive, l’ancien patron du CENER devenu DGRE(service de contre-espionnage camerounais) décédé en avril 1997, il n’y a jamais eu de tentative de coup d’Etat manqué le 6 avril 1984 au Cameroun: « ce que les Camerounais jusqu’à ce jour ont toujours pris pour une tentative de coup d’Etat n’était en fait qu’un montage perpétré par l’obscur clan tribaliste qui faisait pression sur M.Biya, afin que ce dernier se démarquât de M.Ahidjo », peut-on lire dans l’ouvrage Les révélations de Jean Fochivé: Le chef de la police politique des présidents Ahidjo et Biya, paru en 2004.

Selon le redoutable chef des services secrets camerounais, le vrai-faux coup d’Etat n’avait pour seul et unique objectif que d’« implanter l’autorité, le pouvoir et la suprématie de la tribu beti ». Fochive précise que Paul Biya est otage de ce clan ethnofascite encore appelé « Essingan » qui, selon lui, est « sérieusement armé et militairement bien protégé ».

Dans son récit, Jean Fochive laisse croire que les proches collaborateurs de Paul Biya était bien informés de la préparation d’un coup d’Etat mais ont laissé faire pour sans doute prendre la situation à leur avantage: « Je fus quand même surpris par la tentative de coup d’Etat du 6 avril 1984 parce que, n’ayant pas eu le feed-back de mon rapport, je m’étais dit que le chef de l’Etat avait certainement pris d’autres dispositions et qu’il n’était pas obligé de m’en parler.Plus tard je découvris que non seulement mon rapport ne lui était pas parvenu, mais qu’il était resté sous pli fermé au secrétariat général (de la présidence de la République, ndlr) ». Le secrétaire général à la présidence s’appelle alors Joseph Zambo.

Au moment où Fochive était en train d’enquêter sur le coup d’Etat manqué, le clan ethnofasciste Essingan va obtenir son limogeage de la tête du CENER, lequel limogeage intervint le 4 août 1984, à quelques jours de la cérémonie de la sortie d’une promotion de jeunes élèves-officiers de l’Ecole militaire interarmées (EMIA). En effet, dans ses investigations, le chef de la police politique découvrit que : « le coup d’Etat du 6 avril 1984 avait été monté par le clan (beti-bulu, ndlr) dans le seul but de massacrer les jeunes officiers nordistes, de se débarrasser ses cadres (sic) et impliquer M.Ahidjo qui fût condamné à mort ».

Les enquêtes de Fochivé ont également révélé qu’un français au nom de Gérard Delafarge était au centre du montage en question. Ce dernier, qui avait ses habitudes dans les couloirs du ministère des Forces armées alors dirigé par Gilbert Andzé Tsoungui, avait remis à Salatou Adamou, l’aide de camp de l’ancien chef d’Etat, une mallette contenant 66 millions de FCFA et une lettre prétendument écrite par Amadou Ahidjo et qui portait sur le déroulement du coup d’Etat. Rappelons que Salatou Adamou fut condamné à mort le 28 février 1984 par le Tribunal militaire de Yaoundé pour « tentative d’assassinat du chef de l’Etat»."